Entretien / Drissa Bamba (Secrétaire général diaspora UK) : ‘’Nous voulons investir en Côte d’Ivoire, mais les choses traînent avec la banque du trésor’’

En vacances à Abidjan, Drissa Bamba, le Secrétaire général de Diaspora UK a rendu visite au journal lepointsur.com dans le cadre d’un entretien. Au cours duquel il a égrené les différents projets que les Ivoiriens du Royaume-Uni comptent réaliser au profit de la Côte d’Ivoire et de leurs concitoyens. Il n’a pas manqué de souligner la nécessité pour les populations de son pays de se réconcilier, en vue d’entrevoir son développement.

Bamba Drissa face aux journalistes ivoiriens (Ph:Dr)

Monsieur Drissa Bamba, vous êtes le Secrétaire général de la Diaspora UK qui est l’ensemble de tous les Ivoiriens du Royaume-Uni. Ils sont en association qui constitue une sorte de faîtière de toutes les associations au Royaume-Uni. Comment avez-vous mis sur pied, la Diaspora UK ?

Merci de me donner l’occasion de présenter la Diaspora UK aux populations. La Diaspora UK est la faîtière de toutes les associations d’Ivoiriens au Royaume-Uni. Elle a été portée sur les fonds baptismaux grâce au passage du Président de la République lors des Jeux Olympiques de 2012. Au cours de ce séjour, il a demandé à ses compatriotes du Royaume-Uni de se regrouper autour d’une association plus importante. En guise d’encouragement, il nous fait don de la somme de 20 000 Dollars, soit 10 millions Fcfa. A la suite de ce passage, nous avons eu à travailler avec l’ambassade de Côte d’Ivoire dans cet Etat. Je salue au passage, Son Excellence Boua Kanon, l’Ambassadeur de Côte d’Ivoire près le Royaume-Uni et son équipe avec laquelle nous avons constitué un comité Ad’ hoc. A partir de ce comité nous avons écrit les statuts et règlements de l’association. Nous eu l’Assemblée générale élective le 25 novembre 2012. Sur cinq candidats en lice, monsieur Jean-Marie Angoua a été élu pour diriger la jeune association.

Quelles sont les principales missions que vous avez assignées à cette association ?

Notre slogan est le ‘’Rassemblement est notre force’’. Notre première mission est de rassembler tous les Ivoiriens du Royaume-Uni sous un préau et travailler ensemble et relever les défis. Comprenez que l’Ivoirien qui vit à Londres n’est pas le même que celui qui est à Abidjan. Nous travaillons sur le volet social, mais notre volonté n’est pas d’organiser des funérailles et autres. Nous voulons plutôt les aider à se soigner et à faire face à certaines difficultés. Nous avons fait une conférence sur l’immigration, afin de permettre aux Ivoiriens de la diaspora de comprendre les lois qui règlementent l’immigration. En plus, nous guidons nos frères vers des avocats parlant Français et Anglais. Notre volonté est de créer la maison des Ivoiriens de Londres. Une sorte de centre culturel où tous viendraient se retrouver. Nous sommes certes allés en aventure, mais nous avons nos enfants qui sont nés là-bas. Et ceux-ci ne connaissent souvent pas leur pays. Nous voulons, à travers ces échanges, leur donner des informations sur la culture de leur pays d’origine, la Côte d’Ivoire.

Quels sont les problèmes récurrents auxquels les Ivoiriens du Royaume-Uni sont confrontés ?

Nous sommes le plus souvent confrontés au problème de travail. C’est le lieu de dire à nos jeunes frères d’ici que ce n’est pas toujours facile de tenter l’aventure. Là-bas, il faut pouvoir se trouver un emploi garanti pour subvenir aux besoins du ménage. Parallèlement, il y a le souci de papier. Jusque-là 2/3 des Ivoiriens de Londres ont leurs papiers en règle. Nous nous battons pour que la situation du tiers restant soit régularisée. L’un de nos grands problèmes est de pouvoir épargner au maximum pour, en retour, venir investir dans notre pays. C’est ainsi que nous organisons les frères à s’orienter vers des organismes spécialisés dans ce sens. Nous travaillons au Royaume-Uni pour pouvoir revenir en force. Voilà l’un de nos grands défis qui hantent sans cesse mes nuits.

Combien d’Ivoiriens compte l’organisation que vous dirigez ?

Je ne pourrais pas vous dire exactement le nombre d’adhérents de l’association. Cependant, je pourrai vous dire que nous sommes plus de 15 000 Ivoiriens vivant au Royaume-Uni. Figurez-vous l’important vivier que nous constituerons si nous arrivons à faire converger le maximum de cette population vers la Diaspora UK. A l’Assemblée générale constitutive, la population présente pour le compte de notre association était estimée à environ un millier de personnes. Ce qui représente déjà une force pour nous. Je pense que c’est sur cette force humaine que nous capitalisons pour pouvoir avancer.

Le plus souvent, les associations de ce genre se transforment en soutiens politiques. Est-ce le cas pour Diaspora UK ?

Vous faites bien de poser cette question. Cela nous permettra d’éclairer tout le monde. Au niveau des textes de notre association, la Diaspora UK est une organisation apolitique. C’est vrai que nous sommes souvent taxés de pro-Rhdp ou Alassaniste. Je voudrais, ici et définitivement rappelé que notre structure est apolitique. Nous ne sommes arrimés au moindre parti politique, quand bien que chacun des membres est libre de militer dans la formation politique qui lui sied. Je crois que nous allons demeurer dans ce schéma. Nous sommes une structure reconnue. A cet effet, nous avons contact avec les autorités et les Institutions. Cela ne fait pas de nous des pro-Ouattara ou pro qui que ce soit. Notre volonté est d’aider les institutions de la République.

On sait que le pays est en chantier avec des initiatives mises à la disposition de la diaspora. Quelle est la perception de la diaspora ivoirienne du Royaume-Uni par rapport à tout ce qui passe en Côte d’Ivoire ?

Dès mon arrivée en Côte d’Ivoire en 2013 avec le président Angoua, nous avons constaté un bouillonnement avec une bonne partie du pays qui était en chantier. Les ponts qui se construisaient et des routes qui se traçaient. Nous avons aussi vu le Président de la République prendre son bâton de pèlerin pour parcourir le monde, à la recherche d’investisseurs. Nous sommes certes de potentiels investisseurs, mais c’est après les investisseurs à milliards Fcfa que le Président Ouattara court. J’ai un cri de cœur là-dessus. C’est à juste titre que je suis en Côte d’Ivoire pour rencontrer certaines banques. Nous avons pour optique de faire un forum économique que nous voulons mettre à la disposition des Ivoiriens millionnaires. Nous avons des personnes très dynamiques qui, à travers des Pme, ont pu faire fortune, ainsi que des femmes ont reçu à amasser beaucoup d’argent grâce aux tontines. Il y a aussi des amis de la Côte d’Ivoire qui veulent venir investir en Côte d’Ivoire.

Avez-vous des structures sur place qui peuvent orienter les potentiels investisseurs ?

Il faut remercier le Président de la République qui y a pensé, avec la création d’un ministère des Ivoiriens de l’Etranger et une direction spéciale pour les Ivoiriens de l’extérieur qui est dirigée par un ancien de Londres, du nom d’Issiaka Konaté. Au-delà, nous essayons de prendre d’autres contacts avec d’autres institutions. Malheureusement, parfois, nous sommes bloqués par des préalables et bien d’autres obstacles. Figurez-vous que plusieurs de nos lettres de demande d’audiences sont restées sans suite après qu’on les a déposées en 2012. Deux ans après, j’espère qu’on nous accordera une audience. Je comprends. Ici, les hommes très occupés, ils n’ont pas toujours le temps, mais ils doivent pouvoir consacrer un peu de leur temps aux Ivoiriens de l’extérieur. Parce que c’est ceux-là qui viendront investir ici.

Quelle est la position de Diaspora UK sur les cas des Ivoiriens encore en prison ou en exil, après la crise de 2010 ?

Je n’avais pas pensé à cette question, mais je vais répondre. Pour construire une nation, il faut avant tout une réconciliation entre tous les fils du pays. La diaspora UK n’a jamais fait de déclaration, mais pour moi, il est important qu’on se donne la main et qu’on se réconcilie pour vivre dans un pays de paix. Au Royaume-Uni, nous sommes plus de 15 000. Si nous ne rassemblons pas, nous ne pourrons rien faire. Là-dessus, je vous donne un seul exemple. A la diaspora, dans les textes, nous avons demandé à chaque Ivoirien de cotiser l’équivalent de 830 Fcfa. A partir de cette somme prenons seulement 5000 personnes qui adhèrent au principe, en un an, nous pourrons amasser des dizaines de millions de cotisations Francs Cfa. Avec cette somme, c’est sûr que nous réaliserons des prouesses en Côte d’Ivoire, en matière d’investissement. Si nous échelonnons nos cotisations sur deux ou cinq ans, vous comprenez ce que cela nous rapportera en termes de fonds d’investissement ! A ce rythme, il est évident que nous pourrons influencer le milieu des affaires dans notre pays. Même au niveau, de l’Europe, nous aurons notre mot à dire. C’est à travers cette forme de cotisation que des communautés fortes ont réussi à s’établir en Europe et aux Etats-Unis. Nous voulons faire comme elles. Mais alors, pourquoi s’attarder sur des choses qui ne nous mèneront nulle part. Pourquoi vouloir tout politiser ?

A quel niveau êtes-vous pour ce qui concerne les contacts avec les banques ivoiriennes ?

Il y a une banque qui a répondu favorablement. Le reste c’est un peu compliqué. Je prends l’exemple de la banque du Trésor. Au cours de notre visite en 2013, nous avons eu à rencontrer avec les responsables de cette banque, notamment le directeur, le fondé de pouvoir. Nous voulons seulement ouvrir des comptes pour commencer. Car, le système anglais est différent du système français. Dans ce système, en effet, depuis le Royaume-Uni, il n’est pas facile d’alimenter son compte en Côte d’Ivoire, comme c’est le cas lorsque vous êtes en France. Il faut absolument passer par une tierce personne qui, de facto, devient un réel blocage à notre volonté. D’autant plus qu’elle peut disparaître dans la nature avec notre argent. La possibilité d’ouvrir des comptes en Côte d’Ivoire et les alimenter facilement était l’une de nos doléances contenues dans le livre blanc remis au Président Alassane Ouattara lors de sa visite à Londres. La structure la plus apte à nous accompagner était, pour nous, la banque du Trésor qui appartient à l’Etat. En effet, au niveau de Londres l’on nous a fait savoir qu’il n’y avait pas de problème à ce niveau. Pace qu’au niveau des représentations de l’Iran et dans bien d’autres cette démarche fonctionnait déjà. Bien entendu, c’est que nous avons expliqué aux responsables de la banque du Trésor en Côte d’Ivoire. Mais, depuis les choses traînent, je ne sais pourquoi. Nous voulons seulement faciliter la capitalisation de l’argent des Ivoiriens de la diaspora du Royaume-Uni.

Vous-ont-ils expliqué pourquoi ça tarde ?

Non. Cependant, il y a des structures privées qui veulent travailler avec nous. Ainsi, nous avons réussi à ouvrir 500 comptes pour les Ivoiriens de la diaspora du Royaume-Uni. A travers cette démarche, nous permettons aux banques ivoiriennes d’avoir du cash profitable aux Ivoiriens qui veulent entreprendre. En plus du projet d’ouverture de comptes, nous sommes sur d’autres projets, notamment dans l’immobilier.

Quel message pouvez-vous adresser à l’endroit des Ivoiriens de la Diaspora UK ?

Mon message est celui du rassemblement, la condition de notre développement. A cet effet, je prévois un tournoi de football qui va rassembler tous les Ivoiriens vivant à Londres. Pour moi, c’est une véritable aubaine de rapprochement. En plus de cela, je souhaiterais que 2015 soit pour, une année de réconciliation et de joie. Contrairement à 2014 qui a vu le décès de plusieurs Ivoiriens du Royaume-Uni. Je profite de votre espace pour dire merciau Président de la République pour son implication à faire baisser le coût du visa qui est passé de 100 à 50 Euros. Un fort louable. Je voudrais signaler que Diaspora UK a son site internet qui fait un large écho des activités et des papiers administratifs. Je ne saurai finir sans dire merci à toutes les institutions bancaires qui nous font des facilités sur les conditions et frais immobiliers.

Réalisé par Idrissa Konaté, Sériba Koné, Opportune Bath