Côte d’Ivoire/Entretien Saouré Martin : «Nous n’avons pas accusé M. AGO d’avoir détourné notre argent »
Abidjan 26-03-2017 (lepointsur.com) Les Structures d’Exécutions dans le cadre de l’insertion des ex-combattants, ont finalement eu gain de cause. Toutes leurs factures ont été entièrement payées. Regrettant la tournure que cette affaire avait prise, Martin Saouré appelle à une réconciliation avec le Coordonnateur.
Quel bilan faites-vous après plusieurs mois de combat qui ont favorisé le remboursement totalement de vos dus ?
Je tiens d’abord à dire merci à la presse qui est la voix des sans voix. Après l’épisode des cabinets face à la Cellule de Coordination du Suivi et de Réinsertion (CCSR), par la grâce de Dieu, et avec l’aide des autorités de la place, nous sommes très satisfaits, aujourd’hui.
En effet, depuis le 22 février 2017, tous les cabinets et toutes les Ong qui ont participé à la réinsertion des ex-combattants, ont été payés. Nous sommes aujourd’hui heureux d’un tel dénouement parce qu’il y va de la survie de nos jeunes entreprises et de la crédibilité de la CCSR. Je pense qu’il serait honnête d’être reconnaissant. C’est pourquoi, je tiens à dire merci à tous ceux qui, de près ou de loin, nous ont aidé à aboutir à ce résultat que nous espérions et attendions de tous nos vœux.
A combien est estimée la facture globale que les cabinets attendaient de l’ex- ADDR ? Un premier montant avait été annoncé au départ, un autre a ensuite été avancé. Combien avez-vous reçu, en définitive ?
Je disais à un de vos confrères de Onuci-FM que notre dû avoisinait les 700 Millions FCFA. Mais le coordonnateur de la CCSR, M. Ago Christian, ayant constaté des irrégularités dans l’exécution de nos différentes missions, a souhaité un audit préalable avant tout paiement. Mais finalement, à l’issue d’une évaluation interne, il y a eu des ponctions sur les factures estimées à environ 200 Millions FCFA. Globalement, c’est plus de 500 Millions de nos francs que l’ensemble des cabinets et ONG ont perçu. Il est important de préciser que nous étions tous d’accord sur le résultat desdites évaluations. C’est une autorité qui a constaté des irrégularités et ses services ayant procédé àcette évaluation, il était tout à fait logique qu’il y ait un réajustement de nos factures. C’est ce qui a été fait, et les factures viennent d’être réglées maintenant.
Malgré votre approbation des réajustements effectués et la production de nouvelles factures, le Coordonnateur faisait toujours des difficultés à ordonner le paiement de vos factures. Peut-on savoir concrètement la pomme de discorde qui existait entre vous ?
A dire vrai, depuis le 15 mars 2016, le Coordonnateur nous a rassemblés et nous a fait savoir que l’argent était disponible et qu’il fallait un audit avant tout paiement. Après l’évaluation, nous avons résigné de nouvelles factures que nous lui avons adressées croyant que les mois qui suivaient, nous allions être payés. Courant Juin-Juillet 2016, j’étais en formation en Israël. A mon retour, il s’avère que nos factures étaient toujours en souffrance. Et mon ami, en l’occurrence M. Gbamélé Joseph, notre porte-parole, a plusieurs fois tenté de joindre M. AGO sans succès. Il a fait des courriers de relance sans suite. C’est ainsi qu’ensemble, nous avons décidé de porter cette situation devant l’opinion nationale à travers une première conférence de presse tenue le 25 août 2016. C’est ce qui a, à mon avis, déclenché les hostilités. Aujourd’hui Dieu merci, tout est entré dans l’ordre, nous ne voulons plus revenir là-dessus. C’est du passé !
Pourtant, le coordonnateur estime qu’il mérite un traitement à la hauteur de celui qui l’a incriminé.
Nous tenons à mentionner ici, que notre intention n’a jamais été de salir qui que ce soit encore moins M. Ago. Loin de là !
‘’En aucun moment, nous ne l’avons accusé d’avoir détourné notre argent.’’
C’est plutôt la lenteur et surtout l’absence de communication qui ont favorisé de telles interprétations tendancieuses. Sinon, nous ne pouvons pas accuser quelqu’un d’avoir détourné notre argent et en même temps lui demander de nous payer. Cela n’a pas de sens. C’est une aberration. Toutes nos actions menées, l’ont été parce que nous avions des pressions énormes en tant que chefs d’entreprises. Nos employés pensaient que les cabinets et Ong ont été payés sans que leurs arriérés de salaires ou honoraires leur soient en retour réglés. Nous étions alors menacés de toute part. Il y a aussi les obligations fiscales, en tant qu’entreprises qu’il fallait honorer. Vous avez de l’argent quelque part, on ne vous paie pas et il n’y a pas de communication pour vous dire quoique ce soit. Et quand on va voir les travailleurs de la CCSR, ils nous disent de nous adresser directement à M. AGO lui-même parce que disent-ils, « nous ne savons pas ce que nous pouvons vous dire ».
C’était vraiment difficile à supporter! C’est ce qui nous a amené à recourir à la presse. Le dossier a été porté à la connaissance de l’Inspection générale d’Etat qui finalement a donné quitus à M. Ago de nous payer. C’est au vu de tout cela que nous disons que si de par nos actions, nous avons heurté sa crédibilité ou son intégrité morale nous lui présentons nous toutes nos excuses.
Notre intention n’était pas de porter atteinte à son honorabilité. Nous savons que c’est un haut fonctionnaire international qui a fait ses preuves qui lui ont valu son rappel au pays pour prendre aujourd’hui la tête de cette importante institution dont les résultats sont si éloquents et connus de tous. Plus de 60 mille ex-combattants insérés aujourd’hui, grâce à sa dextérité et son savoir-faire. On ne peut pas lui dénier cela. Mais une fois encore je tiens à relever que s’il n’y avait pas eu un manque de communication, nous n’en serions pas arrivés là. Le mandat de la structure (en termes de réinsertion des ex-combattants) venant à expiration en août 2016, il nous fallait notre argent avant sa disparition ou sa réorientation. Mais ici notre seul interlocuteur était la voix des sans voix ; c’est-à-dire, la presse. Nous lui présentons toutes nos excuses. Nous sommes tous des jeunes entrepreneurs et n’avons aucun intérêt à vilipender une autorité, qui plus est, M. Ago.
Vous êtes satisfaits et présentez vos regrets, mais le coordonnateur n’est pas d’avis avec vous.
Nous pensons que nous pouvons fumer le calumet de la paix. Nous souhaitons convenir avec le Coordonnateur d’une date pour le faire publiquement. Avec les cabinets et Ong prestataires, nous aurons une rencontre avec lui pour échanger sur le sujet et faire la paix Ce sont des situations malencontreuses qui peuvent arriver et c’est le cas que nous avons vécu.Nous allons bientôt fixer une date pour nous retrouver et clore définitivement cet épisode vraiment difficile pour les deux parties. La presse sera ce jour-là encore témoin de l’histoire.
Les cabinets sont-ils prêts à renouveler le partenariat avec la CCSR après cette difficile expérience ?
Evidemment ! Parce que nos cabinets ne vivent que de prestations de services. Moi, je suis 100% un cabinet qui ne fait que des prestations de services. Comme je le dis toujours, je dors cabinet et je me réveille cabinet. C’est dire que mon cabinet n’est pas une activité secondaire. Toutes les fois qu’il y aura des avis à manifestation d’intérêt, nous serons parmi les premiers à déposer nos dossiers.
Avec JEN une correspondance particulière