GROSSESSSES EN MILIEU SCOLAIRE CAUSES ET RESPONSABILITE DES ENSEIGNANTS
Il y’a quelques jours l’on a assisté à la diffusion au cours du journal de 13h d’un sketch qui avait pour thème les grossesses en milieu scolaire. Il s’agissait pour les organisateurs de ce sketch de sensibiliser toutes les couches sociales sur les causes, les auteurs, et les inconvénients des grossesses en milieu scolaire. Ce théâtre était d’autant plus légitime que chaque année en Cote d’Ivoire plusieurs milliers d’enfants sont extirpés du système suite aux conséquences de rapports sexuels prématurés. Selon madame Raymonde Goudou, la ministre de la Santé, plus de 7.000 cas de grossesses ont été enregistrés durant les années 2012-2013. Avec un record pareil, il ne s’agit plus d’un fait banal, mais plutôt d’un drame généralisé. L’on avait pensé que les zones de concentration du phénomène étaient les régions autour d’Abidjan et les grandes agglomérations du sud. Mais les chiffres les plus récents indiquent que le record national est détenu par Bondoukou et sa région : 2500 cas en 2012. Malgré toutes les campagnes menées, en dépit des menaces ici et là, les taux s’accroissent au fil des années. Quels sont les différents facteurs qui,associés,sont à la base de ce fléau ? L’Etat ivoirien ne s’est t-il pas trompé de cible en se focalisant sur le rôle joué par les enseignants dans la recrudescence des grossesses en milieu scolaire ?
De la responsabilité des parents…
L’on a pensé qu’en en faisant un interdit dans les entretiens parents/enfants, ces derniers cités seraient à l’abri du sexe. Que non, plus nous mettons un phénomène en veilleuse, plus les curiosités sont aiguisées envers celui-ci. Ainsi, dans leur volonté de comprendre ce qui leur est voilé par leurs géniteurs, les filles finissent par découvrir le sexe. Et n’ayant jamais eu le conseiller familiale qu’il fallait, « l’autre » devient le confident. Mais que vaut le conseil d’un ami, d’une voisine, face à la couverture précieuse et l’éclairage légitime de la mère ou du père ? Et sans garde-fous paternels, elles s’y adonnent sans précautions, sans protections. Ironie du sort, ces mêmes parents n’hésitent pas à visionner les films érotiques d’avant-journal télévisé avec ces mêmes enfants. Pourquoi refuser de leur en parler au sens du conseil et de la méfiance, et les « inviter » à regarder en votre compagnie des émissions dont le contenu concoure à la précocité de leur sexualité. « Nos parents n’en ont pas parlé avec nous, et nous ne le ferons pas avec nos enfants ».Et pourtant, nous ne sommes plus à l’ère où une méfiance caractérisait les relations parents/enfants au détriment de la confiance et de l’ouverture dans tous les domaines envers les enfants. Pour avoir maintenu ce mur de peur, pour s’être confiné dans un obscurantisme vis-à-vis de leurs progénitures, ces dernières se retrouvent mère,prématurément.
… en passant par celle de la société en générale…
Si la démission des parents prend sa source dans le tabou et le paradoxe, disons le tout net, toute la société s’est mise à l’écart dans le processus d’éducation sexuelle de la jeune fille et des enfants,en général. Cette affirmation est d’autant plus fondée que l’on a,à tout bout de champ,des revues pornographiques, des CD, vendus au vu et au su de tous, sans qu’une structure chargée du devenir, ou de la défense des droits des enfants,ne lève le doigt,juste pour dénoncer. Ces CD et revues se bradant ou s’échangeant presque gratuitement, les jeunes filles ne fournissent pratiquement pas d’effort pour les acquérir. Nous avions pensé il y’a quelques années que le rôle de l’Association Ivoirienne pour le Bien Etre Familial (AIBEF), et du ministère de la famille et de l’enfant était de mener une vraie campagne, et procéder à une répression des vendeurs ambulants de porno. Non, ces structures se sont spécialisées plus dans la bureaucratie que dans les actions sur le terrain dans le but de protéger, et de prévenir le pire. Et pire, c’est la violence psychologique subie par nos enfants. violence qui crée en eux un choc et partant une volonté de découvrir ce qui se cache au sens propre et figuré sous ces revues et CD. C’est après avoir été témoins que nos filles s’érigent en acteurs de ces films. À ces deux grandes causes, il faut ajouter le gain facile, la pauvreté des parents, l’envie, l’influence des grandes sœurs, l’ignorance, la démission de certains tuteurs…
Voilà énumérés les quelques facteurs les plus récurrents dans la prolifération des grossesses des filles en milieu scolaire. Le phénomène est d’autant plus dramatique que les conséquences sont multiples sur le devenir des innocentes victimes,en âges mineurs. Contagions par les MST et VIH sida, grossesses précoces, tentatives d’avortement aboutissant quelques fois à des décès, abandons… si nous sommes tous d’accord pour reconnaitre que nous ne sommes plus à la phase de sensibilisation au niveau des coupables, mais plutôt à la répression, il faut se demander si la stratégie utilisée par le ministère de l’éducation et de l’enseignement technique est l’idoine, la meilleure et la plus efficace. Selon Madame Kandia Kamissoko CAMARA,ministre de l’éducation nationale , et ses collaborateurs, la cible à privilégier dans le processus de répression est le monde des enseignants. Et c’est justement parce qu’ils commettent cette erreur que le nombre va croissant d’année en année. Jusqu’ aujourd’hui, aucune statistique n’a pu produire des résultats prouvant que les enseignants sont généralement à la base de ces grossesses. Selon des chiffres produits par le ministère de l’Education Nationale même, l’essentiel des filles enceintes sont du premier cycle et moins de 10% des cas de grossesse sont l’œuvre des agents du système éducatif. Et malgré cette vérité qu’ils ont, ils préfèrent se focaliser sur leurs propres collaborateurs en les discréditant aux yeux de la société, des parents, et partant des enfants,élèves pour la plus part. Ainsi, elle n’a pas hésité à proférer des menaces à l’encontre des présumés coupables dans la presse le 06 Décembre 2013 : « Les auteurs seront radiés et sévèrement punis » et en terme d’auteurs, nous pensions à toutes les catégories socioprofessionnelles que non, elle a omis toutes les autres et a cité des présumés auteurs ne découlant que du système éducatif. Sur les 5076 cas évoqués, moins du dixième concerne les enseignants.
En somme, il faudra prendre le temps d’engager une étude sérieuse du phénomène et punir les vrais auteurs. Les grossesses en milieu scolaire sont d’autant plus graves pour la suite de la trajectoire des filles que l’on devrait régler le problème en amont. Cela est plus préventif que laisser le fait se produire. Et proférer des menaces, ressemble à l’arrivée du médecin tout juste après le décès du patient.
OMAR SAMSON