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Equipement des Universités de Côte d’Ivoire, pas d’argent #étudiants


Abidjan, 25-06-16 (lepointsur.com)- Le président de la République a pris “l’une des difficiles décisions” et réhabilité les universités de Côte d’Ivoire, à hauteur de 110 milliards FCFA.

Pas d'argent pour l'équipement des universités ivoiriennes à l'image de UFHB(Ph:Dr)

Pas d’argent pour l’équipement des universités ivoiriennes à l’image de l’UFHB(Ph:Dr)

Mais la plus grande, la plus belle université de l’Afrique de l’Ouest, l’Université Félix Houphouët-Boigny (UFHB) de Cocody et la non moins splendide Université Alassane Ouattara (UAO) de Bouaké  n’ont pas obtenu l’équipement digne de leur standing. Conséquence: les étudiants ont subi deux années blanches et luttent contre une troisième depuis 2012, date de la réouverture de ces universités.

Approchés, les responsables de ces structures académiques tiennent la langue de bois. Comme s’ils craignaient de perdre leur poste, ils n’osent pas dépeindre la situation telle qu’elle se présente. On les entend plutôt s’empêtrer dans les clichés et autres formules figées: L’Etat a déjà beaucoup fait”. Ou bien,il faut encourager notre gouvernement’’. Ou encore “Il n’est pas donné à tous les pays d’avoir des gouvernants aussi compréhensifs”… Et patati patata.

Avec le standing de ces universités, doit-on encore lésiner sur les moyens? Le gouvernement de Côte d’Ivoire a doté toutes les préfectures et sous-préfectures de moyens de locomotion conséquents. Chaque année, les différents tourismes religieux (pèlerinages qui sont, eux, facultatifs, c’est-à-dire effectués par ceux qui en ont les moyens), sont financés en partie par l’Etat à coups de milliards FCFA. Pour les différentes compétitions sportives, notamment celles des Eléphants footballeurs, des milliards FCFA sont dégagés. Là, on ne fait pas de calcul.

Mais depuis 2012, date de la remise des clés des universités, on est encore au stade des commandes de matériels de laboratoires et autres salles spécialisées. Si l’Etat n’a pas d’argent pour l’équipement des différentes universités, quel intérêt avait-il à les réhabiliter avec la faramineuse somme de 110 milliards? L’Etat ne peut-il pas débloquer 10 milliards pour offrir les commodités nécessaires à ses étudiants? Connaissez-vous un Ivoirien qui construise une villa de 100 millions et qui n’ait pas d’argent pour l’équiper en mobiliers et en électroménagers? Comment ‘’Ado solution” ne peut-il pas résoudre un problème aussi simple que l’équipement d’une université? Avec quels Ivoiriens comptent-ils atteindre l’émergence en 2020?

Par ailleurs, d’autres questions fouettent notre esprit. Les responsables des UFR adressent-ils des requêtes bien claires et détaillées à qui de droit? Ont-ils peur de perdre leur poste en revendiquant des équipements adéquats pour leurs étudiants? Au fait, ces années blanches ne profitent-elles pas aussi aux enseignants abonnés à toutes les universités privées et grandes de Côte d’Ivoire et d’ailleurs? Quiconque trouvera des réponses à ces interrogations aura dénoué la nébuleuse à laquelle sont confrontés les étudiants.

Voilà, pour le moment, des étudiants qui se lèvent à 4 heures du matin, s’alignent à des arrêts de bus pendant des heures, parfois sous la pluie, suivent des cours parfois debout…. Certains d’entre eux font toute la journée sans consommer un morceau de pain; d’autres marchent d’Adjamé-Liberté à l’Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody ou à celle de Nangui Abrogoua d’Abobo.

Après tous ces efforts, ces mois d’intense labeur, les étudiants s’entendent dire en fin ou milieu d’année: “Votre année académique ne peut être validée parce que les laboratoires ou les salles des TP et TD n’ont pu acquérir   les matériels attendus.” Depuis deux ans malheureusement, c’est cette situation que vivent les étudiants et leurs parents. Et pourtant, si votre année 2013-2014, par exemple, est invalidée, vous payez la scolarité de l’année 2014-2015. Personne ne vous dira que puisque l’année n’a pas été validée par faute de matériels, vous êtes exemptés des frais de l’année suivante. Vous payez et vous redoublez votre classe malgré vous. Cette situation est des plus absurdes, et doit choquer le bon sens de tous ceux qui en ont encore. Et comme ils ne sont plus nombreux, alors on s’amuse avec l’avenir de milliers de jeunes.

Vivement que les responsables en charge des universités expriment sans faux-fuyant les préoccupations des UFR. Qu’ils n’augmentent pas la souffrance des parents et étudiants à travers des propos laudatifs déplacés. En effet, devant une situation aussi scabreuse et incompréhensible, il messied que des doyens exaltent: “Il n’est pas donné à tous les gouvernants d’être aussi compréhensifs” ou “l’Etat a déjà beaucoup fait”.

C’est indéniable, l’Etat a fait un grand effort en décaissant 110 milliards pour la restauration des universités. A qui le reste du travail appartient-il? Et puis, tout comme le comédien de “Bonjour 2016”, il faut se poser la question simple: “Les doyens et le représentant du président de la République, qui s’extasient devant les prouesses de l’Etat qui a “offert” deux années blanches aux étudiants des Sciences de la santé, ont-ils des enfants dans ces universités?

L’Etat de Côte d’Ivoire “ a déjà beaucoup fait”. Il serait malséant de le mettre au vitriol. Cependant, il y a quelque indécence à se perdre en louanges pour un Etat qui a oublié l’essentiel de sa tâche. L’Etat est invité à tout assumer. Il n’y a pas de sacrifice plus grand que la formation de sa jeunesse, surtout si elle a des défis à relever pour “l’horizon 2020”. L’Etat doit alors tout faire pour éviter les années blanches dans une université comme celle de Cocody (UFHB), déjà engorgée, surpeuplée. Le bon sens voudrait d’ailleurs que l’on accélère les cours par un système qui fasse d’une même année civile deux années académiques de 5 mois chacune, le 6e mois étant réservé aux évaluations finales. Malheureusement, c’est à la situation contraire qu’on assiste: une année académique se traîne sur 2 ans depuis 2012. Et comme la chaîne ne s’arrête pas dans le secondaire, chaque année de nouveaux bacheliers sont orientés à l’EPSS de l’université Nangui Abrogoua, en “Tronc commun”. Après être sortis des mailles de cette université, ceux des étudiants qui optent pour l’UFR des Sciences de la santé viennent grossir le rang. Conséquence: les facultés des Sciences de la santé sont engorgées. Alors, on se complaît dans des situations palliatives. Ainsi, pour ne pas augmenter la peine des étudiants de la 2e année en pharmacie, les professeurs ont accepté de regrouper la promotion 2014-2015 (80 étudiants) et celle de 2015-2016 (50 étudiants) pour des cours qui débutent dans ce mois de juin.

Une vue des étudiants à l'UFHB.Ph.Dr

Une vue des étudiants à l’UFHB.Ph.Dr

Pour conclure, nous formons ces vœux. Vivement que les promesses de dotation des UFR, dont les doyens ont fait cas dans leur faculté respective, soient enfin tenues afin que les étudiants des Sciences de la santé ne subissent pas une 3e année blanche.

Quand la Fédération ivoirienne de football (FIF), par exemple, exprime ses besoins, le gouvernement y pourvoit aussi tôt. C’est que la situation des étudiants peut être résolue avec la même célérité.

Vivement que les étudiants abandonnent les machettes aux planteurs et aux cultivateurs! A la fin de leur cycle, s’ils éprouvent le besoin de retourner à la terre, ils retrouveront leurs chères machettes. Pour le moment qu’ils privilégient le matériel d’étude, l’achat d’œuvres universitaires, la fréquentation des bibliothèques et Internet. A chacun son outil de travail et chaque chose en son temps.

Sériba Koné

 

 

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