Politique

A quelques semaines de la présidentielle au Gabon la justice veut faire passer un scandale sous silence #gabon


-Delta Synergie, ce scandale économique passé sous silence par la justice gabonaise

Abidjan, 23-07-16 (lepointsur.com) Après les révélations d’avril dernier du journal français Mediapart sur l’omnipotence illégale de la holding familiale des Bongo, Delta Synergie, sur tous les pans de l’activité économique gabonaise, l’analyste économiste Mays Mouissi avait dressé dans le détail, l’ampleur de ce scandale politico-financier qui, jusqu’à ce jour, n’a suscité aucune réaction de la part des autorités judiciaires. Retour sur un scandale qui éclabousse le clan présidentiel mais passé sous le silence complice de la justice gabonaise.

Le président gabonais, Ali Bongo Ondimba. Ph.Dr

Le président gabonais, Ali Bongo Ondimba. Ph.Dr

Quant on voit la dextérité avec laquelle le procureur de la république près du tribunal de première instance de Libreville, M. Steeve Ndong Essame Ndong a diligenté une enquête nationale après les révélations du même Mediapart sur les commissions mirobolantes gravitant autour du scandale Sinohydro, l’on s’étonne que rien ne soit fait pour enfin mettre la lumière sur les exactions financières de la famille Bongo à travers le scandale de Delta Synergie.

Quand bien même le rapport de mission sur l’audit des participations fait par le cabinet d’avocats parisiens Fénéon & Delabrière circule et est accessible depuis avril 2015. Pourquoi un tel mutisme de la part de la justice gabonaise ? Les gabonais se saisissant du droit d’inventaire qui attendent parler du programme d’égalité des chances s’interrogent. Il faut souligner que plusieurs hauts cadres, ministres de la république sont complices et bénéficient de cette pratique illégale qui siphonne les caisses de l’Etat gabonais. Drôle de patriotisme à la mafia sicilienne !

A quand une enquête de la très silencieuse Commission nationale de lutte contre l’enrichissement illicite (CNLCEI) au Gabon ? L’inexistence des procédures judiciaires contre la holding familiale des Bongo, Delta Synergie fait tâche au rôle de la CNLCEI. Cette justice à deux vitesses, ces cas d’enrichissement illicites enfuient sont symptomatiques de la mauvaise gouvernance et de l’absence d’une orthodoxie financière en vigeur au Gabon depuis près de 50 ans sous les règnes d’Omar Bongo et d’Ali Bongo.

Pour rappel, Delta Synergie est cette holding aux participations aux multiples ramifications et omnipotente dans le tissu économique gabonais. Les actifs de cette société tenue jusque-là secrète par le clan Bongo, figurent en bonne place dans la succession et l’héritage légué par Omar Bongo à ses héritiers dont les principaux sont Ali et Pascaline Bongo. Un scandale finalement étouffé en raison de ses implications grandement étatiques ?

A l’occasion d’un article publié le 27 avril dernier, le site d’informations en ligne Médiapart a rendu public un Audit des participations de la holding Delta Synergie dont le commanditaire demeure inconnu. Resté confidentiel depuis avril 2012, l’audit des participations de Delta Synergie lève le voile sur ce qui apparaît comme l’un des plus grands scandales financiers de l’histoire du Gabon. Holding tentaculaire, détenant des participations dans tous les secteurs d’activité lucratifs du pays, Delta Synergie apparaît comme un monstre insatiable qui cannibalise l’économie du Gabon au seul bénéfice du Président Ali Bongo et sa famille.

D’où viennent les fonds investis par les actionnaires de Delta Synergie ?

Dans n’importe quel pays de droit, le cas de Delta Synergie interpellerait la cellule nationale de lutte contre le blanchiment d’argent et obligerait la justice à s’auto-saisir ne serait-ce que dans le cadre d’une information judiciaire. La Holding Delta Synergie est détenue à 19,5% par Ali Bongo, à 19.5% par sa sœur Pascaline Bongo, à 18.5% par la succession Omar Bongo. Les 43% restant se répartissent entre d’autres membres de la famille Bongo et des proches.

L’analyse des participations de Delta Synergie fait naître un soupçon de conflit d’intérêts permanent doublé de prises illégales d’intérêts. En effet, alors qu’elle n’a jamais cessé d’avoir parmi ses principaux actionnaires des chefs d’Etats en exercice (Omar Bongo y détenait 37% du capital, Ali Bongo détient 19.5%), Delta Synergie s’est constitué un portefeuille de participation au sein de 50 entreprises parmi les plus lucratives au Gabon.

Comment les fonds investis ont-ils été constitués ? Quels sont les éléments de preuve ? L’origine des fonds est-elle licite ? Autant de questions dont on n’a aucune réponse mais pour lesquelles la proximité des actionnaires de Delta Synergie avec les cercles financiers de l’Etat semble donner une indication.

Des participations dans 50 sociétés s’élevant à 25.79 milliards FCFA

A TELECHARGER: http://info241.com/IMG/pdf/audit-des-participations-delta-synergie.pdf

Valorisée à 27.8 milliards FCFA dans le cadre de la succession Omar Bongo mais manifestement sous-évaluée puisque cette valorisation ne prend pas en compte les flux futurs actualisés, Delta synergie est certainement l’une des plus importantes sociétés de participations d’Afrique centrale. Notre analyse du rapport d’audit des participations de Delta Synergie nous a permis de mettre en évidence :

  • Des participations dans 50 sociétés ;
  • Un montant global des participations s’élevant à 25.79 milliards FCFA ;
  • Des dividendes perçus sur la période 2006 -2011 d’au moins 8.4 milliards FCFA.

Soit un total participation + dividendes égale à 34.2 milliards FCFA.

Fait curieux, parmi les 50 sociétés dans lesquels Delta Synergie détient des participations, le rapport d’audit révèle qu’il en est 2 pour lesquelles elle ne détient aucune documentation pertinente, ni information. Il s’agit des sociétés :

SEGUIBAT, basée en Guinée Equatoriale, au sein de laquelle Delta Synergie a investi 470 millions FCFA mais dont elle ignore pourtant si elle y détient toujours des actions ou pas. Un non-sens économique.
AMEP dont Delta Synergie détient 20 % des parts mais ignore à combien s’élève le capital auquel elle a pourtant souscrit. Un non-sens financier.

Ali Bongo : Le conflit d’intérêt permanent

Plus surprenant encore l’analyse des participations de Delta Synergie fait ressortir que le Président de la République se met régulièrement en situation de conflit d’intérêts et de délit d’initiés. Comment cela peut-il être interprété autrement lorsque l’Etat gabonais attribut régulièrement des marchés à des sociétés dont le Chef de l’Etat gabonais est l’un de principaux bénéficiaire via Delta Synergie ?

Quelques exemples :

En 2010 pour le très lucratif chantier de la route Pont Octra-Port d’Owendo, s’élevant à 20.06 milliards FCFA, c’est SOCOBA détenue à 50% par Delta Synergie qui fut choisie par l’Etat. C’est encore SOCOBA à qui fut attribué le chantier d’extension du stade de Franceville. La même SOCOBA s’est vue attribuée le chantier de construction de 3 échangeurs à Libreville pour plusieurs milliards de francs.

En 2013 lorsque l’Etat gabonais a sollicité un financement bancaire de 100 milliards FCFA pour la construction de logement sociaux, c’est BGFI Bank détenue à 6.4% par Delta Synergie qui a été retenue ;

Alors que l’Etat s’est engagé dans un projet d’exploitation d’un gisement polymétallique à Moubounié, la société Maboumine, créer pour conduire le projet, s’est empressée d’ouvrir son capital à hauteur de 5% à Delta Synergie dont le Président Ali Bongo est le principal bénéficiaire. Par ailleurs, Delta Synergie détient 0.03% dans Comilog, principale société minière du pays.

Un mélange de genre bien fâcheux pour un chef d’Etat qui au moment de sa prestation de serment et conformément aux dispositions de l’article 12 de la Loi fondamentale a juré « de respecter et de défendre la Constitution et l’État de droit » et « d’être juste envers tous ».

Une analyse de l’économiste Mays Mouissi (Source: Info241.com)

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