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Transition politique : Si on en parlait… #LalettreaColette (De Omar Samson)


Telles sont les deux questions qui pendant tout le weekend ont composé le plat de résistance de notre réflexion. Ces questions tirent leur fondement dans la manière dont la loi fondamentale de ce pays a été vue, revue, corrigée, recorrigée et amendée selon qu’on veuille la rendre commode, adaptée, bref plus actualisée en fonction des tenants du pouvoir, contre les opposants, ou l’opposant. Quels sont les différentes manigances dont elle a subi, et vue le raisonnement des détracteurs, n’y a-t-il pas lieu de leur accorder un éventuel crédit dans leur logique de transition ?

Revenons sur certains faits pour mieux cerner les contours du problème. Lorsqu’en Avril 1990, le Président de la République Félix  Houphouet Boigny nommait M. Ouattara président du comité interministériel, nombreux sont les novices qui comme nous à cette époque voyaient en l’homme un simple économiste venu juste pour redresser une pente et disparaitre. Tellement l’homme paraissait extérieurement inoffensif, moins politique, peu nourri à la mamelle des débats nocturnes cachés. Malheureusement, lorsque le 06 novembre 1990 l’article 11  de notre constitution a été modifié en ces termes : «  en cas de vacance du pouvoir  à la Présidence de la République (…) les fonctions de Président sont dévolues de plein droit au président de l’assemblée nationale » contre l’ancien article qui prévoyait un intérim de 45 à 60 jours, nous avons fini par comprendre qu’une machine était en marche. Et pour augmenter la peur chez l’ennemi, on n’hésita pas à enfoncer le clou en octobre 1992, en effet, au cours d’une conférence de presse et répondant à une question d’un journaliste de la RTI, il répondit : «  on verra » ces deux mots ont retenti comme un son de cloche dans le camp d’en face. Et alors que le « vieux » trainait une prostate dans les couloirs de l’hôpital Cochin de Paris, un mur de méfiance s’est édifié entre la primature de Ouattara et le parlement de Bédié, d’ailleurs, le second à travers « ses députés » surseoir en mars 1993, à tous les programmes de privatisations émanant de la primature.

Et c’est au cours de ce conflit naissant que disparaitra le « vieux ». Ayant hérité du pouvoir et pour barrer  la route à son concurrent,   Bédié révisera une seconde fois la constitution le 8 décembre 1994 en son article 49. Dorénavant : « Nul ne peut être président (…) s’il n’est pas né de père et de mère eux-mêmes Ivoiriens de naissance. Il doit n’avoir jamais renoncé à la nationalité ivoirienne. Il doit en outre avoir résidé de façon continue en Côte d’Ivoire pendant les cinq années qui précèdent la date des élections ». Lorsqu’on sait qu’à moins d’avoir été métis, commis, agents de maisons, ou vendeurs pour les quelques occidentaux, rares sont les autochtones qui se retrouvaient dans les registres d’Etat civil avant 1960, et mieux, la nationalité ivoirienne n’existant qu’après 1960, comment prouver son ivoirité dans ce contexte. Point n’est besoin de chercher midi à 14 heures, la victime était toute connue. Suivra donc une série de dérapages xénophobes qui accouchera des termes à la limite haineux : ivoiriens à part entière contre ivoiriens entièrement à part. La confusion entre origine et nationalité fut largement entretenue. Et le résultat fut l’exclusion de M. Ouattara des joutes électorales du 22 octobre 1995.

Quatre  ans plus tard, le Général Guéi accède au pouvoir et dans les heures qui suivirent, le Général suspendit ce texte aux motifs qu’« il contribuait à diviser le pays et qu’il était dirigé  contre Alassane Ouattara ». C’est alors que s’engage le débat autour des conjonctions « OU » ou « ET ». La Commission consultative constitutionnelle et électorale (CCCE) composée de 27 membres parmi lesquels Me Ouraga Obou a remis aux autorités un texte dans lequel le « ou » figurait, mais revenant d’une campagne à l’intérieur du pays, et sous la pression de son entourage FPI de l’époque, le Général opta pour le « ET ». Et plus grave, à la notion de résidence continue va se greffer le terme de « prévalence ». Le visé est encore reconnu. Et cette constitution sera votée par referendum le 22 juillet 2000. Puisque ne se sentant pas concerné le visé appellera à voté oui et le oui l’emporta à plus de 80%.

…Le balayeur balayé, et le nouveau président n’ayant pas la langue dans la poche, il étala officiellement la vérité qu’on savait tous. « L’article 35 à été élaboré pour régler le cas Ouattara » or donc, notre constitution était personnelle… malgré la recommandation du forum qui exigeait qu’un certificat soit donné à M. Ouattara, l’abcès s’enfla pour aboutir à la rébellion de 2002. Vu que la barque refondation prenait de l’eau de toute part, tous les protagonistes de la crise furent invités dans la pleine légumière de Marcoussis du 15 au 26 janvier 2003. Et lorsque Me Keba Mbaye, et Pierre Mazeaud, demandèrent aux juristes ivoiriens le contenu de la notion de prévalence, tous restèrent pantois, scrutèrent le plafond de la salle, comme si la réponse s’y trouvait. Malgré de nouvelles recommandations, toujours pas de solution, mais un gouvernement d’union… enfin, rendez-vous à Prétoria le 6 avril 2005 pour le dénouement final. Après donc consultation d’Olusegun Obasanjo et de Kofi Annan, l’article litigieux, s’il en est, fut amendé, M. Ouattara et M. Bédié pouvaient de manière exceptionnelle être candidat en 2005. Mais, ce qu’on ne nous a pas dit, c’est que cet accord engendra une série de tergiversation (accord de Ouaga…) qui permit à M. Gbagbo d’aller au bout de 10 ans de pouvoir, avec possibilité de se représenter en octobre 2010.  D’ailleurs,  M. Gbagbo lui-même le reconnaitra plus tard,  lorsqu’il dira qu’à Pretoria, on a signé un « accord acceptable pour tous. » comme pour dire, tout le monde perd un peu, et chacun gagne quelque chose… la suite, M. Gbagbo perdra les élections de 2010…

Pourquoi toute cette narration ? Reconnaissons-le en toute honnêteté, tous les prédécesseurs de Ouattara ont joué avec la constitution contre lui. Des passages du texte ont été manipulés, tronqués, abâtardis, le situant dans un nid de haine. Juste pour qu’il ne soit jamais plus rien dans ce pays. Et comme lâchés par des « démons qui les avaient possédés », une lucidité étrange les envahi lorsque le pouvoir s’éloigne d’eux à la manière de M. Yao N’dré, et Tia Koné. Selon maitre Ouraga Obou, certains membres du (CCCE) avaient même exigé que la femme du candidat soit de teint noir. Allez y comprendre quelque chose…

Et 5 ans après,  nous revoilà à la case départ en 2015. Qui pour appliquer l’article 48 et pour quelles raisons ? En tout cas, pas M. Gbagbo qui se « cherche » dans les couloirs de la prison de  Scheveningen. Et c’est ainsi que la folie s’empara de certains compatriotes et des néo-juristes qui pensent que notre justice à nous est identique à celle que doivent appliquer les politiciens lorsqu’ils sont en position de force. Ces apprentis greffiers issus des ex-espaces de propagande oublient que M. Gbagbo a fracturé le cou à la loi en naturalisant « un matin » M. Dahico qui n’en avait pas besoin car la dernière loi sur la nationalité faisait de lui de facto ivoirien (cf. analyse de M. Wodié après la mascarade de la  naturalisation de Dahico), et le même « soir », exhorta son ami Yao Paul N’dré à le rendre éligible, sans que le décret n’ait fait sa mue. M. Ouattara se retrouve maintenant avec le stylo rouge. Une décision applicable qu’en 2005 l’a rendu éligible en 2010, sans que personne ne  soit capable de l’éliminer au niveau du conseil constitutionnel. Ainsi, puisque rien ne l’a rendu éligible en 2010, bien qu’ayant été inéligible, rien ne le rendra éligible en 2015, et il sera éligible. Simple question de logique.  Et sortez de votre syncope. En aucun cas,  il ne barrera son nom pour votre plaisir. Qu’il pleuve, neige, vente, même si ce sont des givres qui sortent des nuages, il n’y aura  point de transition. Cherchez plutôt à le contrecarrer au sujet de ses manquements que sur une hypothétique reforme des textes. Débat clos.

Cependant, nous pensons que les partisans de la transition ont raison,  vu sous une autre forme. Il importe donc de définir le terme raison. La raison, c’est l’aptitude propriété de l’homme dont l’application conduit à la fixation de critères du vrai, ou du faux. Sous cet aspect, la mamelle à laquelle l’on a été nourrie devient le fournisseur de vérité, et de raison. Vu le fait qu’après le vote du referendum de 2000, Mme. Danielle Boni Clavérie (partisan de Guéi) répondant à un journaliste de J.A (juillet 2000)  qui lui demandait si le « ET » ne condamnait pas certains membres de son entourages, pire ses progénitures a répondu sans crier gare que … le texte a été écrit par la main de l’homme, par conséquent, il pourrait être modifié en temps opportun par l’homme.  Et plus grave, M. Fologo qui a parrainé une promotion de CFP en 2000, disait ceci devant ces jeunes « … Nous en avons assez de ces artisans qui ne sont tous qu’étrangers… » (In Le Jour Plus N° 20 et 21/05/2000.) Alors ces enfants qui ont été nourris pendant 10 ans  à cette  « vérité », ne pensez-vous pas qu’ils soient dans leur logique de penser qu’une transition pourrait être décrété par M. Ouattara,  qui par la même occasion se retirerait ? Pendant longtemps, une génération d’Ivoiriens à été embrigadée psychologiquement. Tant qu’elle ne sera pas « désenvoutée »,  elle aura toujours l’impression d’être dans la vérité, en  parlant de transition, et d’ivoirité de M. Ouattara.

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