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Être un intellectuel, une posture au-delà du diplôme : Une espèce en voie de disparition ?


Cette réflexion peut nous paraître sans enjeu et sans intérêt vu les positions tranchées sur les questions d’ordre politique, observées sur les différents forums. Ils ne passent un jour sans qu’on ne voit des commentaires et des posts publiés par des Ivoiriens instruits. Qu’ils soient de gauche ou de droite, du parti au pouvoir ou de l’opposition, vivant en Côte d’Ivoire ou à l’étranger…tous ces posts riches et effrayants attirent mon attention. Je souhaite donc partager avec vous, qui le voulez bien, ces quelques réflexions. Elles seront sujettes à débat et je souhaite que ce débat soit mené en toute responsabilité.

Qu’est-ce qu’un diplômé ? Qu’est-ce qu’un intellectuel ? Un diplômé est-il un intellectuel ? Autant de réflexion qui méritent que l’on s’attarde et que chacun sache la terminologie qui colle à son statut et à ses actes.

Le Diplômé

Le diplômé est celui à qui l’on confère un titre et qui atteste de son grade. Ce grade étant l’aboutissement d’un processus éducatif et d’apprentissage. Ce grade ou diplôme signifie que l’individu possède les connaissances liées au domaine d’étude. Et il est manifesté par la remise d’un parchemin pour prouver et justifier la graduation. Au sens commun donc du terme, toute personne qui a suivi un enseignement dans un domaine donné et qui en sort avec une reconnaissance écrite de ses supposés connaissances est un diplômé. Je sors de HEC Paris, Sciences Po, Harvard ou INPHB, je suis un diplômé…

L’intellectuel

Ce terme en lui-même est une polémique ! Mais on peut retenir cette définition qui me semble appropriée : Un intellectuel est une personne dont l’activité repose sur l’exercice de l’esprit, qui s’engage dans la sphère publique pour faire part de ses analyses, de ses points de vue sur les sujets les plus variés ou pour défendre des valeurs, qui n’assume généralement pas de responsabilité directe dans les affaires pratiques, et qui dispose d’une forme d’autorité. L’intellectuel est une figure contemporaine distincte de celle plus ancienne du philosophe qui mène sa réflexion dans un cadre conceptuel. C’est aussi un homme de culture, créateur ou médiateur, mis en situation d’homme politique, producteur ou consommateur d’idéologie.

Le décor est donc planté. Un diplômé est-il un intellectuel ? Ou vice versa. La réponse ne se trouvera certainement pas dans mes écrits mais chacun saura, honnêtement, dans quel cas il se situe. Le diplôme nous confère des connaissances. Ses connaissances elles-mêmes sont liées qu’à notre domaine d’étude. Donc limitatif ! Lorsqu’on décide de jouer la carte de l’intellectuel on sort donc du cadre du « diplôme » pour évoluer vers un cadre plus large, plus varié et plus complexe. L’intellectuel intervient sur des sujets de toute nature ; il produit des idées et les véhicule dans la société. Il prend position pour ou contre sur des sujets qui intéressent les populations. Il peut même par la diffusion de ses réflexions influencer et changer les comportements décisionnels de ceux qui l’approuvent. Par ce jeu de l’esprit, il se positionne comme un leader d’opinion. Leader en vogue ou en disgrâce… L’intellectuel a l’impérieux devoir de pousser la réflexion et d’user d’esprit critique pour impacter le quotidien des populations. Il est une sorte de lumière qui doit guider les populations. L’intellectuel doit sortir de la sphère purement émotive pour se placer dans un champ plus cognitif.

Cet exercice « sacré » doit être accompagné d’une éthique, sans quoi l’œuvre de son esprit est vaine et destructrice. L’éthique chez l’intellectuel est une posture constante. Une quête perpétuelle. L’éthique garantie l’indépendante de l’intellectuel. Elle lui assure une crédibilité et inspire la confiance. Cette éthique peut s’articuler autour de :

– Ce que je dis est-il vrai ?

– Ce que je dis est-il constructif ?

– Ce que je dis a-t’il un caractère impersonnel ?

– Ce que je dis est-il empreint d’Amour ?

– Ce que je dis est-il libellé dans le respect de l’autre ?

On voit clairement qu’être intellectuel ne s’improvise pas. Ce n’est pas un titre que l’on s’arroge mais plutôt un statut que l’on acquiert par la pratique et la constance du raisonnement.

Cela m’amène à faire une introspection sur nos écrits postés sur les différents forums. Que d’injures…d’irresponsabilité…et de haines. C’est à se demander si les personnes, qui interviennent, se lisent ou pensent aux conséquences de leurs écrits sur la cohésion sociale. Que l’on soit du RHDP ou de LMP, la Côte d’Ivoire appartient à Tous sans exclusion. Elle doit être le BAOBAB sous lequel Tous se retrouve pour évoquer l’avenir de façon sereine. Je comprends donc que l’enjeu soit important mais cet enjeu risque d’être dévoyé si l’on ne prend garde à ce qu’on dit et écrit. Le plus surprenant c’est que ces écrits émanent de nos « diplômés », ceux qui ont des connaissances dans des domaines indispensables au développement du pays. Ces chers diplômés qui usent de tous les moyens pour affirmer et imposer leurs opinions. Ces diplômés qui ont décidé de porter le maillot de l’équipe intellectuelle. A ces diplômés, je souhaite la bienvenue. Je leur enjoins de rentrer de plein pied dans ce « championnat » passionnant mais qui a aussi ses règles. Règles que je souhaite qu’ils apprennent et respectent. Il est temps pour eux de laisser les habits limités de diplômé pour enfiler ceux d’INTELLECTUEL. C’est-à-dire la lumière du peuple. Lumière qui guide et non lumière qui détruit.

Libre de penser, libre de vivre !

Ahmed Adaman Traoré, CRHA, CHRP

Président du Club’I.N.

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