Point Sur

Côte d’Ivoire / Pagaille dans le secteur du transport terrestre : Le mutisme coupable de l’Etat


Une fois encore, le secteur des transports urbains vient de laisser une tache noire sur l’économie nationale en Côte d’Ivoire. L’arrêt brutal de travail observé en pleine journée du dimanche 28 septembre 2014, a fini par convaincre que trois ans après l’arrivée au pouvoir du Président Alassane Ouattara, le désordre reste le maître-mot de ce secteur d’activités importants.

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En effet, pour protester contre le prétendu décès accidentel d’un des leurs, causé par un substitut de syndicat ou ‘’gnambro’’, les transporteurs, principalement ceux qui opèrent au niveau des minicars communément appelés ‘’Gbakas’’, ont décidé d’arrêter tous services sur l’étendue du District d’Abidjan depuis dimanche 28 septembre 2014.

Bien entendu, cette situation n’est pas sans conséquences sur l’ensemble des usagers de ce type de transport urbain auquel les économiquement faibles se sont habitués. Plusieurs des usagers, même les plus adultes que la mesure avait surpris loin de leur quartier ont dû avoir recours à leurs jambes pour regagner leurs domiciles.

Une autre affaire de syndicats

Si au départ la mesure était partiellement respectée, la situation s’est radicalisée avec l’entrée en scène des nombreux syndicats qui pullulent le secteur.

Tous ceux qui s’hasardaient à enfreindre à la loi étaient violement pris à partie par des soi-disant syndicalistes. Qui, en plus de les tabasser, menaçaient de mettre à feu leur véhicule. Il n’en fallait pas plus pour voir des barricades se dresser à des endroits sensibles des voies importantes du District d’Abidjan.

Le tout, au nez et à la barbe des forces de l’ordre. Qui semblaient ne pas être concernés par l’agression des transporteurs dont la volonté était d’offrir le service minimum aux usagers.

Et pourtant, il ne se passe pas de jours comme de nuit sans que le pouvoir rappelle que la Côte d’Ivoire est un Etat de droit. Plusieurs questions n’arrêtent cependant pas d’aiguiser la curiosité des populations sur la volonté du gouvernement à mettre de l’ordre dans le secteur du transport terrestre, catalogué comme désordonné et désorganisé.

Une histoire qui date d’il y a plus de 20 ans…

La pagaille dans le secteur du transport terrestre ne date pas d’aujourd’hui. Elle tire sa source depuis les années 1994. En ces temps-là, les politiques s’en sont  servis pour se positionner.

Ainsi, le Syndicat national des marchandises et voyageurs de Côte d’Ivoire de Kassoum Coulibaly était sous la coupole du Pdci, tandis que le Syndicat national des transporteurs terrestres de Côte d’Ivoire de Yaya Fofana défendait les couleurs du Rdr.

Foulant aux pieds toutes les règles de l’art en matière de création de syndicats. Ainsi, naîtrons de nombreux syndicats dans les rangs des transporteurs sans appartenance à la moindre centrale syndicale.

Ce faisant, la mise en place des nombreuses structures syndicales s’effectuait dans le sang. Et la place revenait à celui qui possédait le plus grand nombre de bras valides ou « gros bras » prêts à user des armes blanches. C’était la période de l’intrusion des loubards qui ensuite vont devenir les « gnambro » dont on parle, ce jour.

Tant que cette situation pouvait renforcer le positionnement des responsables de syndicats auprès des leaders des différentes formations politiques, personne n’a senti le besoin d’y mettre de l’ordre. Et pourtant, la situation allait de mal en pis. Entrainant une sorte de mafia dans le milieu des syndicats.

Du coup, le syndicat est en même temps le syndiqué. Avec à la clef, la mise en place d’un vaste système de racket dont lui seul est le principal bénéficiaire au détriment des transporteurs qu’il prétend défendre. Aucune déclaration de ses chauffeurs à la Cnps, pas de couverture maladie pour eux et patati patata.

Pour preuve, ce jour, aucun syndicat des transporteurs terrestres ne peut lever le moindre doigt pour se targuer d’avoir permis à ses adhérents d’être déclarés à la Cnps avec de meilleures conditions de travail.

Le silence troublant du ministre des Transports

S’il y a un fait qui mérite que l’on s’y attarde, c’est bien entendu l’attitude du ministre des Transports qui semble avoir fait un black out sur les remue-ménages constatés dans le secteur des transports terrestres.

Pourtant, l’on a encore en mémoire, le discours prometteur de Gaoussou Touré quand il prenait la tête de ce département ministériel. Il dévoilait à cet effet, sa volonté de remettre de l’ordre dans ce secteur sensible, voire de rendre « formel« . En disant qu’il allait faire sortir le « secteur de l’informel ».

Trois ans après, le constat est le même, aussi douloureux qu’amer avec en toile de fond, des syndicats qui foisonnent ici et là en continuant de faire la loi à la place des lois existantes. Ce, sur des voies et routes tracées au frais des contribuables. Les usagers sont soumis à leurs désidératas parce que désormais les vrais patrons.

Bien entendu, le silence du ministre laisse planer le doute quant aux propos de nombreux syndicalistes qui prétendent lever des cotisations pour certaines autorités. Ce commentaire achève convaincre plus d’un dans la mesure où le communiqué signé des ministres de l’Intérieur, du Transport et de la Défense pour l’interdiction des taxis banalisés a été fourrés dans les oubliettes.

Le premier transporteur de Côte d’Ivoire, le ministre Gaoussou Touré pourra-t-il tenir ses promesses de prestation de serment ? Au risque d’abandonner un secteur aussi important qu’est le transport interurbain aux mains de groupuscules de bandits bien organisés. Dans lequel selon certaines langues son épouses et lui seraient devenus eux-mêmes transporteurs ? Il y a des signes qui ne trompent pas

Idrissa Konaté   

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