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Après avoir salué le courage de Traoré Moussa/ Les larmes de crocodile de Assalé Tiémoko


Juste quelques mots

Assalé Tiémoko, Directeur de Publication de "L’ELEPHANT DECHAÎNE"

Assalé Tiémoko, Directeur de Publication de « L’ELEPHANT DECHAÎNE »

Bonsoir à tous !

Je voudrais remercier toutes les personnes qui depuis hier nuit et depuis ce matin, n’ont cessé de me manifester leur soutien.

Depuis hier et depuis ce matin, je me suis gardé, devant l’avalanche des réactions, de dire quoi que ce soit de nouveau sur cette affaire. Je voudrais que les uns et les autres acceptent que je m’en tienne à la décision rendue par le CNP et qui a été publiée partout.

Je réalise avec amusement que certains publient par personnes interposées les arguments qu’ils ont sortis devant le Conseil et qui n’ont pas prospéré. Je ne réagirai pas à cela. Je n’ai pas peur des révélations qu’on annonce ! On a tous eu le temps au CNP de nous défendre, d’abord individuellement, puis dans une confrontation qui a duré des heures et les membres du Conseil dont certains sont des magistrats, se sont faits leur propre conviction. Je ne dirai donc rien d’autre sur cette affaire quoi que les gens puissent publier sur internet.

Depuis deux ans, je ne fais que le répéter. Dans ce pays, chacun sait que je suis allé en prison pour 12 mois, non pas pour avoir tué, ni pour avoir volé. J’ai passé 12 mois en prison juste pour avoir dénoncé la corruption. Et c’est à la suite de cet emprisonnement que je suis devenu journaliste, donc par accident. Parce que, avec mon casier judiciaire, malgré mon niveau de formation intellectuelle, je ne peux passer dans ce pays, aucun concours administratif. C’est une punition continuelle…

Je n’ai pas créé « L’Eléphant Déchaîné » pour célébrer moi-même les pratiques que j’ai dénoncées. Et ce journal est mon seul avenir, l’avenir de mes enfants, aussi. Je ne l’ai pas créé pour l’utiliser comme un outil de chantage, de racket et de célébration de la corruption. Je ne l’ai pas créé aussi pour que des gens l’utilisent à mon insu pour se faire de l’argent sur mon dos auprès de personnes qui ont des choses à cacher aux Ivoiriens sur leur gestion des ressources publiques mises à leur disposition.

Je l’ai créé pour essayer, à mon niveau, d’aider ce pays à avancer sur le chemin de la bonne gouvernance. Ceux qui me suivent depuis 2007 savent que je n’ai fait aucun cadeau au régime Gbagbo. Et que je n’entends pas en faire au régime Ouattara. C’est une question de principes. Je ne m’intéresse qu’à tout ce qui ne fait pas partie du contrat social que nous avons signé avec ceux qui ont décidé librement de se mettre à notre service et qui sont suffisamment rémunérés pour cela. La ligne éditoriale du journal est donc très claire. Dénoncer, et la répétition a son sens ici, tout ce qui ne fait pas partie du contrat social que nous avons signé avec les autorités que nous nous sommes librement données : mauvaise gouvernance, corruption, faux appels d’offres, détournements de deniers publics…et tous les autres exploits qui sapent la cohésion sociale et mettent la vie des Ivoiriens en danger.

Depuis deux ans, si j’avais voulu m’enrichir avec ce journal, ceux qui le lisent assidument savent que j’aurais déjà engrangé des dizaines de millions rien qu’en renonçant sur intervention, à la publication de certains dossiers. Combien de fois je ne me suis pas fait traiter de « fous » par des confrères pour avoir publié des dossiers qui auraient pu me procurer beaucoup d’argent ?

Mais j’ai toujours essayé de ne pas tomber dans ce système. Les seuls dossiers que nous n’avons pas publiés, c’est juste parce que nous n’avons pas pu avoir la preuve qui aurait protégé le directeur de publication qui n’est pas moi, devant un tribunal correctionnel et non parce que quelqu’un serait intervenu pour nous dissuader de le faire moyennant de l’argent. J’ai déjà l’avantage d’avoir séjourné en prison et jamais plus elle ne peut me faire peur…
Donc, si des confrères, parce que je leur donne du « grand frère », parce que j’ai accepté, une ou deux fois, à leur demande, de rencontrer telle ou telle autorité de ce pays mécontente d’un article et qui refuse d’user des moyens que lui offre la loi pour obtenir réparation, pensent que de ce fait je fais partie de la « confrérie des sorciers », ils se sont lourdement trompés.

Je viens d’apprendre que le président de l’UNJCI, M. Traoré Moussa, a décidé de se mettre en « congé’ » de la tête de cette organisation dont je suis membre. C’est un acte de courage que je salue et que je respecte. C’est aussi un message que notre corporation envoie à nos dirigeants qui trop souvent, ont tendance à s’accrocher, malgré les scandales qui les éclaboussent…

Je regrette qu’on en soit arrivé là. Je regrette les effets dévastateurs que cette affaire a sur l’image de notre corporation même si cette image de toutes les façons, n’était pas bien reluisante.

Je n’avais pas le choix. Où je réagissais comme je l’ai fait, quoi que cela me coûte, où bien c’est mon entreprise qui mourait, sous l’effet nocif des rumeurs qui enflaient sur mon compte et qui avaient étendu leur venin jusque dans certaines sphères où se trouvent des personnes de nationalités diverses , lesquelles ont un peu d’estime pour moi et qui s’alarmaient devant ces rumeurs persistantes.

Je suis membre du Forum des Jeunes Leaders Africains et je me suis retrouvé à la Maison Blanche en août 2010 en même temps que d’autres jeunes Leaders Africains aux frais du contribuable Américaine , et récemment, en septembre 2013, à Dakar aux frais d’une organisation Américaine. Au cours de ces rencontres, nous essayons d’identifier les causes qui font que la vie sur notre continent est insupportable. Et l’une de ces causes identifiées est justement la corruption. Pendant de longues minutes, nous essayons de voir comment, nous, la jeune génération, pouvons procéder pour combattre ces fléaux afin de rendre la vie plus supportable sur notre continent.

Quelle image les gens (ceux qui financent ces rencontres) auraient de moi, si en sortant desdites rencontres, je me mettais à piétiner tout ce que j’ai appris en célébrant moi-même la corruption ou en laissant courir de folles rumeurs sur ma moralité ?

C’est pour mettre fin à ces rumeurs que j’ai agi ainsi. Je ne suis pas le meilleur journaliste de Côte d’Ivoire et je n’aurai jamais cette prétention. Je suis conscient de mes lacunes et chaque jour j’essaie de travailler à les réduire. Je n’ai jamais mis les pieds dans une école de journalisme, je remplis juste les conditions que la loi a définies en Côte d’Ivoire pour pratiquer ce métier. Pas plus mais je n’ai aucune espèce de complexe vis-à-vis de qui que ce soit.

Je ne suis pas le journaliste le plus propre, le plus honnête de Côte d’Ivoire, je n’aurai jamais cette prétention. Il y en a, et ils sont nombreux, qui sont plus honnêtes et plus propres que moi. Je n’ai que deux ans d’expérience dans le métier et j’essaie juste de ne pas pourrir trop vite…Je suis un homme et comme tous les hommes, j’ai mes faiblesses. Mais j’essaie de ne pas laisser ces faiblesses m’empêcher de regarder mes enfants droit dans les yeux chaque matin et de leur dire que telle chose est bonne à faire et que telle autre n’est pas bonne à faire.

Quand j’ai essayé de savoir pourquoi l’on dit de la presse qu’elle est le 4ème pouvoir, j’ai découvert que c’est juste parce que son rôle est d’œuvrer pour la transparence, pour la bonne gouvernance, pour la vérité, pour la justice, pour la défense des bonnes causes qui font évoluer la société, bref : pour la démocratie. Si j’avais découvert un autre sens à cette appellation, notamment si cela signifiait « célébration de la corruption, outil de fabrication des rumeurs, outil de protection des actes de mauvaise gouvernance, outil de dissimulation de la vérité…outil de destruction de la cohésion sociale … », j’aurais fait autre chose.

Quelle est notre justification en tant que journaliste, si nous ne nous mettons pas au service de la transparence, de la bonne gouvernance ?

En 2012, lorsque l’actuel président du CNP est arrivé dans nos locaux dans le cadre de sa tournée de prise de contact avec les entreprises de presse, je lui ai demandé, devant les membres de sa délégation, d’être particulièrement sévère avec moi et avec mon organe de presse. De ne pas me laisser tomber dans la médiocrité et dans la violation des règles de notre métier. De ne faire aucun cadeau à « L’Eléphant Déchaîné ».

Mais depuis, en tant que journaliste professionnel, je n’ai jamais reçu la moindre interpellation, le moindre blâme ! Le journal, en plus de deux ans d’existence, n’a reçu qu’un seul blâme, pour avoir violé consciemment une disposition de la loi sur la presse en réagissant à un droit de réponse alors que cela est interdit par la loi. C’est la seule sanction. Nous n’avons jamais été sanctionnés pour avoir raconté des histoires, pour avoir diffusé de fausses informations, pour avoir incité à la haine. Pourtant, Dieu seul sait combien de journaux sont blâmés par jour, voire suspendus pour avoir commis ces fautes.
Donc nous essayons d’être professionnels autant que nous le pouvons.

Je sais que cette histoire me met sous les projecteurs de l’actualité. Je sais certaines personnes y compris des confrères, me maudissent et ne jurent depuis hier que par ma perte, comme certains ont déjà écris que je suis un pro-Gbagbo encagoulé financé par des gens en exil pour dénigrer le régime Ouattara.
Je sais que tout le monde m’attend désormais au tournant. Je sais que je me suis fait beaucoup d’ennemis avec cette affaire et que désormais, on scrutera tous mes faits et gestes, on essaiera d’obtenir ma tête au bout d’un piquet pour prouver que je ne suis pas mieux que ceux que je dénonce dans mes écrits. Je suis conscient de tout cela, comme je suis conscient aussi que ma sécurité même s’en trouve impliquée. Mais cela ne m’empêchera pas de faire ce que je crois juste pour la corporation et pour mon pays.

Cette affaire, comme certains esprits brillants l’ont déjà compris, est autrement plus grave qu’on ne le croit. Et c’est justement pour cette raison que de mon point de vue, le CNP est allée jusqu’au bout pour tenter de découvrir la vérité. Une occasion unique nous a été donnée de faire notre autocritique en tant que journalistes. On devrait la saisir plutôt que de tenter de brûler Assalé Tiémoko. Je ne laisserai personne détruire ce que j’essaie de construire avec beaucoup de difficultés depuis plus de deux ans. Faire de « L’Eléphant Déchaîné », un journal exclusivement au service de la transparence et de la démocratie. Cela ne peut faire aucun mal à la Côte d’Ivoire. Qu’on ne cherche donc pas à me faire du mal…

ASSALE TIEMOKO ANTOINE

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