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Anoh Christ Simplice (président de l’Avidga) : « Les victimes ne sont la propriété d’aucune structure… »


Abidjan, le 1-8-15 (lepointsur.com)-Le gouvernement ivoirien a décidé d’un début d’indemnisation des victimes des différentes crises qui ont secoué la Côte d’Ivoire durant plus d’une decennie. Un tel projet, ne peut aboutir sans le concours de tous ceux qui sont impliqués dans l’opération. Telles, les associations de victimes de guerres. Dans l’entretien qui suit, M Anoh Christ Simplce, président de l’Association des victimes et déplacés  de guerres d’Abidjan (Avidga), par ailleurs, vice-président du Conseil d’administration de la Covici (Confédération des organisations de la crise ivoirienne) se prononce sur les relations avec les partenaires, la structure mise en place par les autorités ivoiriennes, les difficultés que rencontre l’Association, l’espoir  de voir l’opération se poursuivre après les élections etc.

« La réparation des préjudices permet de prévenir d’autres conflits… »

Lepointsur.com : pouvez-vous nous présenter l’association que vous dirigez (date de création, objectif) ?

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Anoh Christ Simplice : l’Avidga (Association des victimes et déplacés de guerre d’Abidjan) est née  le 02 décembre 2010 à l’église catholique saint Ambroise de Cocody- Angré. Nous étions déjà des déplacés de guerre sur ce site et nous avons jugé opportun  de nous organiser. L’Avidga  est présente  dans 47 villes de la Côte d’Ivoire avec 63 sections,  sans oublier les sections du Ghana, Togo et du Libéria. A ce jour, nous avons 157.063 membres et nos objectifs sont l’assistance alimentaire, sanitaire et juridique de nos membres, la protection des personnes vulnérables et la sensibilisation à la paix et à la cohésion sociale.
Quelles sont les conditions pour faire partie de l’Avidga ?

Pour être membre de l’Avidga, il faut d’abord se faire enregistrer comme victime de guerre ou personne rendue vulnérable du fait des crises ivoiriennes. Ensuite un comité de contrôle statue après enquête pour vérifier votre état de victimisation et enfin si les preuves sont suffisantes, alors on valide votre demande ou enregistrement par l’octroi d’une carte de membre qui vous donne droit à tout type d’assistance dans la limite de nos possibilités.
A ce jour quelles sont les actions qui ont été menées sur le terrain et qu’est-ce qui reste à faire ?

Depuis notre création, nous avons mené plusieurs actions mais nous nous contenterons de citer quelques unes qui sont entre autres,  l’organisation des sites de déplacés de guerre, la sensibilisation des réfugiés au retour au pays, la prise en charges financière des victimes à travers des activités génératrices de revenus, la protection des enfants à travers la production de plus de 8600 extraits de naissances ,l’organisation d’arbre de Noël et la sensibilisation des ex-combattants au dépôt d’ armes.  Je voudrais profiter de cette opportunité pour remercier tous les partenaires techniques et financiers sans qui toutes ces actions n’auraient pas été possibles.
Etes-vous, la seule association des victimes, si non, quels sont vos rapports avec les autres ?

L’Avidga  n’est pas la seule association de victimes. Il y’a à ce jour,  plus de 54 associations avec qui nous entretenons des rapports cordiaux. Aujourd’hui,  toutes ces associations à part deux ou trois sont membres de la Covici (Confédération des organisations de victimes de la crise ivoirienne) dont je suis le vice-président du Conseil d’administration.

Certains observateurs vous reprochent d’avoir limité l’association à la seule ville d’Abidjan. Un commentaire.

Comme je l’ai dit plus haut, nous sommes nés à Abidjan mais aujourd’hui, nous sommes dans 47 villes avec des bureaux locaux animés par des Bénévoles très dynamiques à l’écoute des préoccupations de nos membres. À ce jour,  grâce a notre implantation nationale, nous avons déposé  97.436 dossiers de victimes au PNCS (Programme national de cohésion sociale).

Dites-nous concrètement, ce qu’il y’a eu comme acquis depuis que vous êtes sur le terrain.

Depuis que nous sommes sur le terrain, on nous associe de plus en plus aux décisions concernant les victimes de la crise ivoirienne. Nous avons été impliqués dans le processus d’exhumation des corps à Abidjan, dans tous les cas d’assistance de l’Etat vis à vis des victimes de guerre. Nous sommes intermédiaires entre les victimes et la CPI (Cour pénale internationale) et nous sommes consultés dans les procédures judiciaires engagées par la cellule spéciale d’enquête et d’instruction.

Quels sont les sources de financement de l’Avidga ?

Des personnes de bonnes volontés et des partenaires nous aident  financièrement à atteindre nos objectifs. Nous n’avons aucune subvention de l’Etat. Et pourtant,  à ce jour,  nous travaillons sur le terrain avec 179 bénévoles qu’il faut de temps à temps désintéresser.
Etant donné qu’il s’agit d’indemnisation, qu’elles sont les dispositions que vous avez prises pour ne pas tomber dans les mêmes erreurs de la parenthèse malheureuse des déchets toxiques qui fait couler encore beaucoup d’encre et de salive ?

Pour éviter les erreurs des déchets toxiques,  nos avons fait plusieurs propositions au cours de divers ateliers. Aucune somme d’argent ne doit passer par les associations et les victimes ne sont la propriété  d’aucune structure.

Pouvez-vous nous parler de vos relations avec l’ICTJ, avec qui nous avons travaillé au forum des média ?

ICTJ est notre coach. L’arrivée  de cette structure à permis aux autorités et aux associations  de savoir ce qui a été fait ailleurs et comprendre les mécanismes de réparation. Les associations  de victimes ont plusieurs fois bénéficié des renforcements  de capacité grâce à cette structure sans oublier qu’elle assiste aussi financièrement les associations les plus sérieuses. C’est grâce à ICTJ que toutes les associations se sont mises en confédération pour parler d’une et seule voix. Je dis vraiment grand merci à monsieur Sumah Mohamed  et ses collaborateurs  qui ont épousé la cause des victimes de la crise ivoirienne.
Quelles étaient vos rapports avec la CDVR et aujourd’hui, avec la CONARIV ?

Au temps de la Cdvr,   les structures de victimes étaient royalement ignorées ; mais aujourd’hui avec la Conariv nous sommes consultés et associés aux décisions. Je salue tous les commissaires de la Conariv  avec à leur tête Monseigneur Ahouanan  qui ont compris que les associations de victimes sont  des partenaires sur qui s’appuyer pour avancer.

Faites-vous confiance au gouvernement et à la Conariv? Si tel n’est pas le cas, que proposez-vous pour une meilleure collaboration ?

Nous faisons confiance au gouvernement car nous sentons une volonté politique autour de la question des victimes de guerre. Nous voulons encourager le Président de la République à prendre toutes les dispositions pour que ce processus entamé  ne soit pas grippé. La réparation des préjudices est un droit pour les victimes et un investissement pour l’Etat ; car elle permet de prévenir d’autres conflits. À quoi serviraient tous ces investissements et ces chantiers, si demain il doit avoir une autre crise? Nous ne voudrions pas croire que toutes ces annonces soient simplement le fait d’une quelconque   récupération politique, parce que   la période  est très sensible et le gouvernement doit prendre des mesures courageuses pouvant permettre au prochain gouvernement de continuer le processus même après les élections. La Conariv et le Pncs doivent veiller à cela.

La Conariv a effectué récemment une tournée à l’Ouest de la Côte d’Ivoire pour échanger avec les victimes. Etiez-vous  associés ?

Oui,  nous avons été associés  à la tournée de Monseigneur Ahouanan  à l’Ouest à travers nos comités locaux de Man,Bangolo,Duekoué ,Blolequin et Toulepleu. A Toulepleu, le comité local à offert un grand boubou à Monseigneur Ahouanan  pour lui signifier notre confiance totale.
Il est de plus en plus question d’un début d’indemnisation des victimes. Avez-vous une idée précise du mode opératoire ?

Nous continuons de travailler sur le mode opératoire concernant l’indemnisation. Je  voudrais à toutes fins utiles  rappeler que la réparation n’est pas forcément pécuniaire ; elle peut  être symbolique ou prendre la forme de différents programmes ou projets.

Interview réalisée par EKB

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