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Yamoussoukro-Reportage/5 ans après la crise postélectorale : La décrispation entre communautés


lepointsur.com (Abidjan, le 15-4-2015) Cinq ans après la terrible crise postélectorale en Côte d’Ivoire, si les hommes politiques peinent encore à s’asseoir pour discuter, les communautés de Yamoussoukro ont toujours montré leur volonté de préserver la paix.

Chef Baoulé

Selon Kouamé Marcelin, chef du village de Morofé, l’héritage de paix de Félix Houphouët-Boigny a été préservé à Yamoussoukro.

Dans leur ensemble, les populations de Yamoussoukro ont tout mis en œuvre pour perpétuer la volonté de Félix Houphouët-Boigny de faire de la cité des Lacs, un havre de paix. Selon Atsé Yapi Aimé, un allogène domicilié depuis 2010 à Morofé, un quartier périphérique de la ville, « les habitants n’ont pas souffert de la crise, parce que le Président Fondateur avait préparé les esprits à la culture de la paix. »

Entre autres facteurs qui ont contribué à épargner la capitale politique de la Côte d’Ivoire, la religion figure en bonne place. En effet, dès que les premiers coups de fusil ont retenti à Abidjan, des cellules de prières se sont spontanément constituées à Yamoussoukro, à l’initiative de plusieurs associations. Celle dénommée « Anouanzè » a été particulièrement active à travers toute la ville, invitant les femmes à la prière et à la sensibilisation.

L’héritage de paix d’Houphouët-Boigny

Bien avant, les balises de la paix avaient été savamment posées par feu le Président Félix-Houphouët-Boigny à travers l’édification de monuments dédiés à la prière. La grande mosquée pour les musulmans, la cathédrale et la basilique Notre Dame de la paix pour les chrétiens. Ces différents symboles, objets de fierté nationale, ont contribué à rassembler les populations autour des valeurs de paix et de cohésion sociale.

L’harmonie est ainsi demeurée intacte entre les autochtones Baoulé et leurs « hôtes » Malinké, cela grâce à une réglementation rigoureuse. Ainsi, toutes les palabres ont été réglées à l’amiable, créant du coup une sorte de familiarité entre les populations autochtones, allogènes et étrangères. Touré Lassina, chef de la communauté musulmane, se souvient : « dès le déclenchement de la crise, nous avons multiplié les réunions. Nous tenions des rencontres pour sensibiliser les uns et les autres, en véhiculant des messages de paix. » Et d’ajouter : « lorsqu’un problème survient, nous n’avons pas recours à la gendarmerie ou à la police. Nous le réglons plutôt entre nous. »

Evoquant quelques cas minimes d’exactions, comme l’agression commise par un jeune Malinké sur un Baoulé, il a souligné que ce problème a été réglé à l’amiable : le mis en cause a été sanctionné conformément aux règles établies au préalable par les deux communautés. Selon N’Guessan Kouakou et Kouamé Marcellin, chefs des quartiers de Morofé (N’kraodjo) et d’Assabou, la communauté Baoulé a soutenu la candidature d’Alassane Ouattara au second tour de l’élection présidentielle d’octobre 2010 pour préserver la paix qu’ils ont toujours entretenue avec les populations allogènes.

Le métissage culturel, facteur de rapprochement

Communauté Malinké de Yamoussoukro

Sous l’autorité de Touré Lassina son chef, la communauté Malinké vit en bonne intelligence leurs hôtes.

Selon un journaliste résidant à Yamoussoukro, le Président Houphouët-Boigny a fait du métissage culturel l’une des conditions fondamentales pour l’installation des populations étrangères.

L’exemple de la capitale politique de la Côte d’Ivoire avait pour but d’inspirer les autres régions du pays dans la course effrénée vers le retour à une paix durable, et surtout à la réconciliation de tous les Ivoiriens. L’esprit de partage entre les différentes communautés est aussi à la base du climat de paix qui a toujours régné dans la ville.

Ainsi, pendant le mois du jeûne musulman, les communautés allogènes font don de sucre et de lait pour soutenir « leurs frères » dans la pénitence, et vice-versa. La grave crise traversée par la Côte d’Ivoire a défiguré le visage de nombreuses villes. A Yamoussoukro, toutes les communautés se sont déjà préparées aux élections d’octobre 2015, qui devraient bien se dérouler : depuis 4 ans, ils n’ont cessé de cultiver le métissage culturel.

Opportune Bath (Envoyée spéciale à Yamoussoukro)

Encadré: La taille de Yamoussoukro, un atout pour la cohésion

S’il y a un avantage dont la ville de Yamoussoukro peut s’enorgueillir, c’est bien évidemment sa petite taille qui a favorisé le brassage entre les communautés.  En effet, sous la houlette du Président Félix Houphouët-Boigny, les différentes familles autochtones, allogènes et étrangères ont brisé les mythes de la différence pour créer un véritable rapprochement.

Ce faisant, les enfants nés de ces alliances ont grandi ensemble et se regardent en frères. Evidemment, dans une telle atmosphère ne peut prospérer que l’amour, au détriment de la violence et de la haine qui font le lit de la guerre et de la division. Si la ville a connu une croissance notable au niveau de sa taille, il n’en demeure pas moins que les fondements du brassage sont déjà ancrés dans les esprits, faisant de la ville natale du premier Président de la république de la Côte d’Ivoire un véritable havre de paix.
O.B

Portrait : Mme Koné née Diakité Djénébou, présidente de l’association ‘’Anouanzè’

Djénébou

Frêle, élancée, avec de grands yeux marron, le tout assorti d’une peau couleur d’ébène, dame Diakité, veuve de onze enfants, a la cinquantaine révolue. Habillée dans une longue robe, elle arbore un large sourire. A Yamoussoukro, elle un modèle du vivre ensemble.  Battante, courageuse et dévouée, dame Diakité originaire du nord a su réunir au sein de son organisation une cinquante de femmes.

Cette dame dont le rêve a toujours été d’inculquer le sens du partage à son entourage, ne ménage aucun effort pour véhiculer des messages de fraternité. Du haut de son 1 mètre 80, Diakité Djénébou s’impose pour les habitants du quartier 220, comme une référence en matière d’actions et d’initiatives en faveur de la paix et de la réconciliation.
O.B

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