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Scandale dans l’affaire du « déchet dollar »/ Quand le président du Tribunal de première Instance disqualifie le procureur en matière civil #civ


Abidjan, 13-05-16 (lepointsur.com)- L’action judiciaire  intentée par le colonel Tibé Bi Balou Jean-Christophe et son conseil d’avocats depuis le 18 décembre 2014, contre la richissime société Trafigura de Claude Dauphin, dans l’affaire des déchets toxiques qualifiée de « déchets dollars » a  atteint  son point culminant le jeudi 12 mai 2016. Le président du Tribunal de première instance du Plateau, Coulibaly Hamed  a déclaré « mal fondée » la plainte du colonel Tibé Bi Balou Jean-Christophe.  Le plaignant a décidé de porter l’affaire devant la Cour d’appel.

Le colonel Tibé Bi Balou Jean-Christophe. Ph. Archives

Le colonel Tibé Bi Balou Jean-Christophe. Ph. Archives

Lui et son conseil d’avocats ont assigné Trafigura devant les tribunaux ivoiriens pour réclamer 300 milliards FCFA ( 457,351 millions d’euros) de « dommages et intérêts. » Les raisons. Le colonel Tibé Bi Balou est débarqué de son poste de directeur général de la direction des Affaires maritimes et portuaires (Dgamp), depuis 2006 puis jeté en prison avant d’être blanchi, sans jamais retrouver un point de chute. Depuis, il  n’a pas été rétabli dans ses droits . Suspendu pour une durée de trois mois, cela fait  dix ans que cette situation perdure … sans que cela n’interpelle les autorités compétentes. Tous les avantages, auxquels il a droit, au motif qu’il n’a pas de bureau, ni de poste d’affectation, lui ont été retirés.

« Ils sont trop jeunes, ce dossier est très lourd pour leurs frêles épaules. La décision de ce jour ne me surprends pas », a déclaré avec un large sourire le Colonel Tibé Bi Balou, au sortir de la délibération. Il semble ne pas avoir tort. En effet, après les échanges d’écritures (entre les conseils des deux parties), à un moment donné, au cours du long procès, faute d’arguments à faire prévaloir, aux vérités assénées par le conseil du colonel Tibé Bi Balou et son conseil d’avocats, Trafigura et Puma Energy ont opéré une assignation forcée contre l’Etat de Côte d’Ivoire. En réponse, l’Etat les a renvoyés à leurs copies.

A partir de cet instant, la plainte du colonel Tibé Bi Balou était fondée. Et les dommages et intérêts devaient être payés par Trafigura et Puma Energy. Dès lors, l’on pouvait affirmer que le débat était clos. Mais, contre toute attente, il sera question  d’une mise en l’état, au sortir de laquelle, la date de la délibération a été fixée au 12 mai  2016. Après deux ans d’attente, le verdict est tombé : « La plainte est mal fondée ».

Une grande première dans l’histoire  judiciaire en Côte d’Ivoire

Au cours d’une des nombreuses audiences, Hamed Coulibaly a renvoyé Trafigura et Puma Energy à leur copie en soutenant que : « l’Etat n’a rien à voir dans l’affaire ». D’où vient-il que le même juge trouve mal fondé la requête du colonel Tibé Bi Ballou à la délibération du jeudi 12 mai 2016 ?

C’est la première fois que la première instance ne suit pas le procureur, en matière civil. En attendant que le colonel Tibé Bi Balou Jean-Christophe fasse appel, le ministère public n’est-il pas en droit d’en faire autant ?

Une décision incongrue

Le colonel Tibé Bi et l'un de ses avocats.Ph.Dr

Le colonel Tibé Bi et l’un de ses avocats.Ph.Dr

« C’est une décision incongrue », martèle  l’un des avocats du colonel Tibé Bi. Il qualifie la décision d’ « incongrue », parce que dans l’entendement des juges, c’est contre l’Etat de Côte d’Ivoire que le colonel Tibé Bi Balou Jean-Christophe devait porter plainte, alors qu’ils sont eux-mêmes représentants de l’Etat.

Dans le fond, et nous l’avons écrit à plusieurs reprises, noir sur blanc l’Etat de Côte d’Ivoire n’est pas propriétaire du navire probo-koala encore moins son contenu. Ce n’est pas l’Etat de Côte d’Ivoire qui a demandé à ce navire qui est à l’origine d’un scandale environnemental et humanitaire d’envoyer les déchets toxiques à Abidjan. Mieux, les déchets qui étaient à bord du probo-koala ne sont pas la propriété de l’Etat de Côte d’Ivoire, donc ne portait le nom : « Etat de Côte d’Ivoire ». La société d’avitaillement maritime, Tommy qui a enlevé les déchets sur le bateau n’a pas été recommandé par un organisme de l’Etat de Côte d’Ivoire. L’Etat n’a aucun droit de regard sur le contrat qui a lié les deux sociétés privées : Tommy (la société qui a enlevé les déchets et Trafigura et Puma (qui les ont transportés). C’est une affaire entre des sociétés privées.

Sur cette base, on ne peut pas demander au colonel Tibé Bi Balou Jean-Christophe de porter plainte contre l’Etat de Côte d’Ivoire. Pis, les déchets déversés en Côte d’Ivoire en août 2006, sont des déchets assimilables aux déchets nucléaires. Ce ne sont  pas des slops ordinaires que les sociétés d’avitaillement maritime ont l’habitude d’enlever sur les bateaux. Il y a eu fausse déclaration. C’est sur la base du déversement des déchets toxiques qu’il  a fait la prison. Depuis lors,   il n’a plus  eu de point de chute. C’est pourquoi, il réclame aux sociétés pollueuses Trafigura et Puma Energy  300 milliards FCFA ( 457,351 millions d’euros) de « dommages et intérêts. »

Que dit le droit maritime ? « Il y a une convention internationale en la matière qui stipule que c’est le pollueur qui paye », soutiennent les experts environnementaux maritimes. Là, où la plainte dite non fondée,  elle  est donc, bel et bien  fondée. A moins que le fondement soit ailleurs et non dans les documents de droit.

Sériba Koné

 

 

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