Politique

Peut-on parler de gouvernement des juges ? (Par Toni Lokadi)


Abidjan, le 19-09-2020 (lepointsur.com) Toni Lokadi, est une personnalité publique. Il se présente sur sa page Facebook comme étant détenteur d’un Master en droit et sciences politiques : droit économique et législation sociale. Dans ce post, il donne un cours de philosophie et sociologie du droit.

Question : peut-on parler de gouvernement des juges ?

  • Les juges sont-ils créateurs de droit ? gouvernent-ils ?

Le juge doit trancher les litiges entre particuliers, applique la loi. Le juge dit le droit avec une autorité de chose jugée.

Qu’elle est la place de ce juge par rapport aux autres pouvoirs ?

Quels sont ses liens avec le législatif ?

Le juge ne va-t-il pas usurper le pouvoir des autres pouvoirs ?

  • Faut-il craindre le gouvernement des juges ?

Filiation, mariage, laïcité, détournent… : sur tous les grands sujets, le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État ont tendance à avoir le dernier mot. Les magistrats seraient-ils en train de conquérir le pouvoir, au détriment des élus ?

Les « juges rouges », l’opération « mani pulite » en Italie, la figure du juge Balthazar Garzon… : nous aimerons toujours ces figures de « justiciers » capables de faire plier les puissants du moment dans tous les types de régime politique. Mais pour comprendre véritablement la place que tiennent nos juges dans nos sociétés, il faut aller au-delà de ces cas spectaculaires, au cœur du fonctionnement de nos démocraties.

Chaque pays relève d’une tradition historique qui singularise son rapport à ses juges. La Grande-Bretagne connaît des juges peu nombreux et très respectés. L’Allemagne­, en raison de la division ancienne et durable du Saint Empire, accorde au droit et aux juges une place d’élite. En France comme Congo se singularise autrement : le juge y est, au moins en apparence, dans une position assez soumise et même inférieure.

  1. Le juge dans la séparation des pouvoirs

Le juge dans la conception américaine de la séparation des pouvoirs est un véritable pouvoir. La situation France (comme chez nous) est différente. Le juge n’est pas un pouvoir, c’est une simple autorité. Autorité : prend des décisions. A moins d’importances qu’un véritable pouvoir. Pour Montesquieu le pouvoir judiciaire est un pouvoir « nul », il n’a qu’à appliquer la loi, n’a pas à la créer.

Le contre-exemple des parlements d’Ancien Régime avaient le pouvoir de bloquer certains édits royaux. Le pouvoir royal a essayé de transformer l’Ancien régime et souvent ce sont les parlements qui ont bloqués cette réforme.

Les révolutionnaires français se méfiaient des juges, ils ne veulaient pas leurs donner un pouvoir trop important. Dans la constitution française à son article 64 mentionne l’autorité judiciaire pour dire que cette simple autorité est indépendante et protégée par le Président.

On a toujours craint en France le « spectre du gouvernement des juges ». Cette expression est dût à Edouard Lambert.

  1. La notion de gouvernement des juges

On mêle la fonction gouvernementale, l’exécutif et le judiciaire. Le juge crée le droit. Un gouvernement des juges c’est la politique faite par les juges autrement dit l’adoption d’une jurisprudence politique (juge impose une interprétation qui reflète ses propres vues politiques ou autres, lorsqu’il statut en légalité).

  1. Le gouvernement des juges existe-t-il ?

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Chapitre 1. La question du juge créateur du droit

Section 1L’existence de la création du droit

  • Qu’est-ce que créer le droit ?

Pour dire que le juge crée le droit on va dire que le juge détermine une norme qui n’est pas rattachable à un texte.

  • Qui crée le droit ?

En France par exemple, ce sont les juges administratifs et européens créent des principes généraux du droit. Le conseil d’Etat a des effets normatifs et la cour de justice de l’UE fait également référence à des principes non écrits.

Le juge constitutionnel et judiciaire ont une position plus nuancée.

Le juge constitutionnel : plusieurs auteurs affirment que le juge constitutionnel crée le droit.

Principe de la liberté d’association : le juge interprète la Constitution. En ce qui concerne la liberté d’association elle-même. Nulle part dans la Constitution on trouve les objectifs de valeur constitutionnelle. Lorsque le Conseil la consacrée cette catégorie il l’a crée. Lorsqu’on étudie chacun de ces objectifs, chacun peut se rattacher à un texte. Lorsqu’on se fonde sur un texte on est dans l’interprétation et non la création.

Le juge crée certes le droit mais de manière limitée.

Section 2 : l’appréciation de la création

  • Le caractère à priori contestable de la création.

On parle souvent négativement de la création du droit  par le juge.  Si le juge à crée le droit il usurpe le rôle d’autres organes, il se met à la place du législatif. C’est pour ça que le Conseil constitutionnel cite toujours les dispositions textuelles qu’il utilise.

  • La légitimation par l’autorité politique

L’idée est simplement de dire qu’un juge qui crée la loi est contestable mais c’est le pouvoir politique qui doit avoir le dernier mot, il peut reverser la position du juge.

  • Le lit de justice : Au 18ème siècle le parlement de paris pouvait bloquer à certains actes royaux (édits, ordonnances…), on dit que le parlement faisait des remontrances au roi en convoquant le lit de justice. Le roi vient dans l’enceinte du Parlement pour peser son acte au parlement. Il surmonte la décision du juge et vient imposer son avis.

Aujourd’hui on a globalement le même mécanisme, on appel lit de justice les révisions constitutionnelles. Le constituant est donc supérieur au pouvoir juridictionnel, il peut surmonter une révision négative du conseil constitutionnel.

Chapitre 2. la question du juge, interprète politique

Section 1 : des juges politiques ?

Les juges sont-ils politiquement marqués ?

Est-ce que ma jurisprudence témoigne de convictions politiques religieuses ou philosophiques ?

  • Distinction entre jurisprudence politique et politique jurisprudentielle.

Une jurisprudence politique est une jurisprudence politiquement marquée. Un politique jurisprudentielle est une stratégie d’interprétation retenue par le juge.

Le cas américain :

  • Cour Suprême des EU, est-ce que le juge américain est un juge politique ?

L’élection est un enjeu politique ce montre que la Cour suprême est un pouvoir plus qu’une autorité mais que c’est aussi un juge politique car les membres de la cour sont nommés pour des raisons politiques. Ces 9 juges déterminent une part de la politique américaine.

La question de l’avortement est réglée en franc par la loi mais aux USA est réglée que la cour suprême qui a considéré que l’avortement est  conceptuel. Cela montre bien que la Cour suprême se prononce sur des raisons politiques et qu’elles sont prises en compte.

Le cas du conseil constitutionnel est bien différent.

Est-ce que le conseil constitutionnel  peut être qualifié de Constitution politique. On aurait tendance à dire que le conseil est partiellement politique car on a :

Des nominations en parti politique : les anciens présidents, ministres, parlementaires…

Il faut se méfier des lectures trop politiciennes car un élu peut ne pas suivre son courant et interpréter un texte de manière différente.

Le cas des juridictions suprêmes

La cour de cassation :

  • La cour de cassation est-elle une juridiction politique ?

On peut constater que les dirigeants de cette juridiction sont politiquement marqués. Le premier président est le procureur général.

  • Le conseil d’Etat :

Il y a peu de nominations politiques. Le vice président du conseil d’état a des convictions plutôt de gauche mais a été nommé par la droite donc il n’a pas un profil de politique. Il n’y a pas de jurisprudence politique.

Le cas du juge européen

  • La cour de justice de l’UE :

Nous ne sommes pas face à une juridiction politique. Les juges sont nommés par les institutions européennes. Il peut y avoir une part de politique dans la proposition mais il faut des personnes qui ont des compétences juridiques.

La cour de justice cherche surtout à protéger  l’UE. Si on s’intéresse au Président de cette cour (grec) il a fait parti du gouvernement, serait plutôt classé à gauche. Il doit être élu par les autres juges de la cour, ses pairs. Il a été réélu ces qui montre qu’il n’apparait pas comme un juge à fond dans ses convictions.

  • La cour européenne des droits de l’homme :

On lui reproche souvent de ne pas tenir compte des traditions nationales. La cour attire d’avantages de critiques les autres juridictions. Son président  (britannique) est élu par ses pairs. Il est élu par ses pairs qui sont proposée puis choisis. Système qui limite le risque de politisation de la cour.

Ainsi aucune cour ne peut être décrite comme une juridiction politique.

Section 2 : la relativisation

Il s’agit de voir que quels que soient les opinions politiques des juges il y a des éléments qui relativisent :

  • Les contraintes pesantes sur l’interprète. Les contraintes de la lettre du texte par exemple. Le juge ne peut nier les grands principes.
  • Les contraintes de la jurisprudence : on ne peut faire abstraction de la jurisprudence antérieure.
  • Les normes de références sont elles même des expressions de vie politique. Les texte eux même sont politiquement marqués mais aussi politiquement équilibrés. La constitution française contient des droits plutôt de droit ou de gauche. Aujourd’hui ce sont des droits consentiels. Elle est un compromis entre 2 traditions politiques. Ses textes sont presque centristes.

Ainsi le juge gouverne aux Etats-Unis mais en France on ne peut le dire, sauf exceptions.

Conclusion : Qui gardera les gardiens (juges) ? Faut-il juger les juges ?

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