Naufrages en Méditerranée: l’UE en ordre de bataille


019042015104752000000migPlus de 11 000 migrants secourus en une seule semaine, peut-être plus de 700 morts, à la suite du naufrage d’un vieux chalutier dans la nuit de samedi à dimanche au large des côtes libyennes, l’Italie se sent trop seule pour affronter les flux incessants de migrants et tous les drames qui y sont liés. Le gouvernement réclame la tenue d’un sommet européen extraordinaire.

Encore une fois, Rome lance un appel urgent pour que l’Italie ne porte pas seule un poids de plus en plus lourd et ingérable. Le chef du gouvernement Matteo Renzi a donc demandé la tenue d’un sommet européen extraordinaire au plus tôt, précisant devant la presse que celui-ci pourrait avoir lieu ces prochains jours.

Concernant le nouveau naufrage au large des côtes libyennes, qui pourrait avoir provoqué la mort de 700 migrants, le chef du gouvernement a préféré parler de « massacre » plutôt que de « tragédie », rapporte notre correspondante à Rome, Anne Le Nir. « Chaque jour, en Méditerranée, nous sommes témoins d’un massacre, de la douleur de tant d’hommes et de femmes que nous faisons semblant d’oublier », a-t-il relevé. « On ne sauve pas nos frères et nos sœurs uniquement grâce au contrôle des unités navales. Il faudrait surtout ne pas les laisser à la merci des criminels que sont les trafiquants d’être humains », a poursuivi Matteo Renzi.

Renforcer la coopération avec les pays d’origine et de transit

Dès l’annonce ce dimanche matin de la nouvelle tragédie de l’immigration en Méditerranée, les réactions se sont ainsi multipliées en Europe pour réclamer que le problème soit pris à bras le corps. Les Européens ont de toute évidence l’intention de se concentrer d’abord sur les moyens d’améliorer la coopération avec les pays d’origine des candidats à l’exil et avec les pays de transit, en particulier la Libye.

Comme l’a affirmé Matteo Renzi, parmi les objectifs, figure au premier rang la lutte contre le trafic d’êtres humains. La surveillance de la Méditerranée est aussi au centre des préoccupations. L’opération Triton, chapeautée par l’agence Frontex de surveillance des frontières extérieures de l’UE, est soumise au feu roulant des critiques parce qu’à peine un tiers des pays de l’Union y participent et que son budget n’arrive qu’au tiers de celui de Mare Nostrum, l’opération italienne qu’elle a remplacée.

La crainte des Européens risque cependant de créer un appel d’air. La présence de leurs escadres en Méditerranée peut, selon eux, servir aux passeurs d’argument, comme garantie de sauvetage en quelque sorte, ce qui pourrait renforcer la motivation des migrants. Mais la véritable pierre d’achoppement est celle du partage du fardeau migratoire à parts égales entre les 28 pays de l’Union, ce que les riverains de la Méditerranée réclament à cor et à cri depuis des années.

D’ici la mi-mai, la Commission européenne est censée présenter une nouvelle stratégie sur l’immigration en préparation depuis la mort de 400 migrants en octobre 2013 au large de Lampedusa. Mais dans un premier temps, et à la demande de Federica Mogherini, la réunion des 28 ministres des Affaires étrangères à Luxembourg ce lundi sera centrée sur la question des migrants qui tentent de traverser la Méditerranée. Quant à la question d’un prochain sommet extraordinaire, le président du Conseil européen Donald Tusk a annoncé envisager sa tenue prochainement.


L’opération Triton remise en question

C’est le 1er novembre dernier que l’Union européenne a lancé son opération Triton. Une réponse communautaire à ces traversées de la mer Méditerranée réclamée par l’Italie. Depuis un an, avec l’opération Mare Nostrum, elle menait seule les interventions de secours aux bateaux en détresse. Mais même si elle est menée au niveau continental, Triton est de bien plus petite envergure que Mare Nostrum. Elle a été conçue avec un budget mensuel de 2,9 millions euros de budget mensuel alors que l’Italie débloquait à elle seule 9 millions pour Mare Nostrum.

Triton se veut une opération de surveillance des côtes plus qu’une opération de secours en mer, car pour certains dirigeants européens, la certitude d’être secourus incite les passeurs à se lancer dans cette périlleuse traversée. Mare Nostrum, disaient-ils, est donc une incitation à l’immigration clandestine. Mais la succession des drames remet Triton en question, y compris parmi les dirigeants européens. Plus de moyens sont nécessaires, a jugé ce dimanche François Hollande pour qui même le nom devrait être changé. Pour le président il n’est pas très heureux que cette opération soit assimilée à un animal aquatique.

rfI

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