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Menace jihadiste en Côte d’Ivoire/Comment 80.000 chiites libanais freinent la propagation terroriste


Guides religieux musulmans

La communauté musulmane de Côte d’Ivoire s’insurge contre une éventuelle propagation du terrorisme sur le territoire ivoirien. Ph. A titre d’illustration

La récente attaque de l’hôtel Radisson de Bamako la semaine dernière qui fait une vingtaine de morts remet au goût du jour, le débat sur une éventuelle menace jihadiste en Côte d’Ivoire. Certains guides religieux et non des moindres rejettent du revers de la main  l’idée d’une attaque terroriste. Pour ces derniers, l’Islam est doux en Côte d’Ivoire.

En effet, partageant avec le Mali une frontière commune, la Côte d’Ivoire peut-elle être la future cible des djihadistes de la bande sahélo-saharienne ? Telle est la question que se posent nombre d’observateurs. « Ce que l’occident appelle djihadisme, c’est en réalité du banditisme qui prétend agir au nom de l’islam. Il suffit qu’un porteur de kalachnikov ouvre le feu en criant Allah Akbar pour qu’il soit catalogué par les médias occidentaux de djihadiste », répond Cheikh Abdoul Kader.

Avant d’ajouter qu’en Côte d’Ivoire, Dieu merci, l’islam est doux. Occasion pour lui, de stigmatiser certains groupes terroristes, tels Aqmi,  Ansar Dine, Boko Haram, Daech, dont il qualifie la foi de douteuse, parce que leurs motivations sont plutôt à chercher du côté de l’argent, du pouvoir et de la notoriété . Guide spirituel de la  confrérie  Khadiriya en Côte d’Ivoire Cheikh Abdoul Kader pense que dans un, pays, où environ 40 % de la population est musulmane, et représente  l’un des réseaux les plus puissants de l’islam confrérique, avec la Tidjaniya, il sera difficile pour ces marchands de la mort de pénétrer sur le territoire ivoirien, qu’il  juge d’ailleurs, suffisamment armé pour faire obstacle à une éventuelle invasion.

Par ailleurs, le guide musulman n’a pas manqué de pointer du doigt les médias, qu’il accuse de jouer le jeu des « jihadistes », en les confortant dans leur position de musulman. « Je m’étonne que la presse feigne de ne pas voir que ces « djihadistes » utilisent la religion comme un paravent pour assouvir leur désir de richesse et de pouvoir. Leurs victimes sont essentiellement musulmanes ! Lorsqu’ils parlent aussi mal de djihadisme, les médias éparpillent des vibrations négatives dans le monde ». Soutient-il. Comme lui, un autre chef religieux musulman cheikh Coulibaly  de la confrérie Tidjaniya ne dit pas autre chose. A l’instar de son collègue, il est convaincu que le jihadisme ne s’installera pas en Côte d’Ivoire, parce que tous ceux qui épousent cette doctrine meurtrière sont minoritaires. .

« De plus en plus de jeunes reçoivent leur formation d’imam en Arabie saoudite où des réseaux extrémistes peuvent facilement les approcher. C’est pourquoi, ils sont un certain nombre à revenir en parfaits petits salafistes. Mais ils restent minoritaires. Leur islam est trop rigoriste, trop extérieur à nos traditions ». Souligne-t-il.  En dépit de cette pseudo-assurance, cheikh Coulibaly n’exclut pas le fait que des jeunes, sans perspective d’avenir sont des portes ouvertes à toutes sortes de dérives. « L’incapacité des politiques d’assurer à tous un avenir acceptable fait le lit des idéologies. Les extrémistes captent à leur profit une partie des exclus du système en leur promettant des lendemains meilleurs. C’est aussi un processus que l’on peut voir dans le christianisme évangélique ».

Non sans ajouter que les terroristes qui se revendiquent de l’islam agissent surtout pour le compte de puissants parrains. « Lorsque je croise un jeune wahhabite, je lui montre qu’il est en réalité au service d’intérêts bien profanes. Il ne met pas beaucoup de temps pour ouvrir les yeux sur ces réalités. » Précise-t-il. Autre figure de proue de la religion musulmane en Côte d’Ivoire, cheikh Ibrahima Al Hadj Koné, secrétaire général du Forum national des confessions religieuses de Côte d’Ivoire,  une plateforme inter-religieuse réunissant les hautes autorités religieuses musulmanes, protestantes et catholiques de Côte d’Ivoire. Comme, les autres guides religieux musulmans, il se veut lui aussi rassurant.

Pour lui, il n’est pas possible de tomber dans le piège islamiste, parce que cela ne fait pas partie de la tradition. Surtout que depuis1994 avec  les  frères chrétiens,  une plateforme inter-religieuse a été créée  pour contribuer à la cohésion sociale tout en respectant les diversités. Fort heureusement, cela a été un frein, pendant la crise post-électorale, à l’embrigadement des religions par les politiques. « Lorsque le Saint Coran a été brûlé pendant la crise, que des mosquées ont été détruites et des églises saccagées, qu’un imam et sa famille ont été assassinés… nous avons été proches de l’explosion religieuse. Mais nous avons su éviter cette catastrophe. », A-t-il rappelé rassurant. « Il n’y a pas de quoi s’inquiéter d’une pénétration d’un islam intolérant dans notre pays, dit-il. Le wahhabisme est divers. Celui dont se revendiquent les groupes armés de la bande sahélo-saharienne n’est pas le nôtre en Côte d’Ivoire ». A-t-il poursuivi pour se conforter dans sa position.

À écouter ces hauts responsables musulmans et surtout un diplomate, sous le sceau de l’anonymat, le djihadisme a peu de chance de prendre racine en Côte d’Ivoire. Pour la simple raison que le  terreau ne serait pas favorable. D’autant que l’on trouve en Côte d’Ivoire, une grande communauté chiite libanaise d’environ 80 000 personnes parfaitement intégrée dans la société ivoirienne, proche, dit-on du Hezbollah, cette communauté est un rempart au salafisme armé. « Avec l’islam des confréries, avec l’islam sunnite traditionnel, les Libanais présentent un nouvel obstacle à la propagation des idées d’Al-Qaida ou de Daech dans le pays », pense-t-on, dans certaines chancelleries  accréditées en Côte d’Ivoire.

EKB

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