[Kalieh Festival 4] « Ce qui m’a le plus marquée, c’est la profondeur culturelle de cette édition », affirme Mme Ouattara Findahan Mariam, Directrice régionale de la Culture du Béré
Dianra, le 15 avril 2025 (lepointsur.com) À l’occasion de la 4e édition du Kalieh Festival, tenue du 10 au 12 avril 2025 dans le département de Dianra, Mme Ouattara Findahan Mariam, Directrice régionale de la Culture et de la Francophonie du Béré, s’emploie à faire du patrimoine un véritable moteur de développement dans une région où les traditions ancestrales cohabitent avec les défis de la modernité.
« Ce qui m’a le plus marquée, c’est la profondeur culturelle de cette édition »
Dans cet entretien exclusif, elle met en lumière les trésors culturels du Béré, les initiatives engagées pour leur valorisation, les défis liés à leur préservation, ainsi que l’impact du Kalieh Festival en tant que levier de développement local.
Entretien.
Vous êtes à la tête de la direction régionale de la Culture du Béré. Quel diagnostic faites-vous du potentiel culturel local ?
Le Béré dispose d’un patrimoine culturel d’une richesse exceptionnelle. Nous y retrouvons une diversité de danses, de rythmes initiatiques et de sites traditionnels d’adoration qui témoignent d’un ancrage identitaire fort. Ces sites se situent dans les trois départements de la région : Mankono, Dianra et Kounahiri. Parmi eux, le Tondo, également connu sous le nom de « la Glissade », est à la fois un lieu sacré et un espace de convivialité. Le Mont Limissa est un autre site hautement symbolique, notamment pour la communauté Koyaka. Cependant, en raison des interdits culturels, je ne peux en dévoiler tous les aspects.
Comment travaillez-vous à faire connaître et préserver ce patrimoine ?
Nous avons engagé plusieurs actions de sensibilisation, surtout auprès des autorités locales qui, hélas, ne sont pas toujours impliquées à la hauteur de l’enjeu. Notre message est clair : le patrimoine culturel n’est pas qu’un outil de distraction. Il peut devenir un véritable levier économique à travers les festivals, qui dynamisent les secteurs de l’hôtellerie, de la restauration et du transport. Nous voulons que les événements culturels du Béré attirent, à l’instar de ceux d’autres régions, des festivaliers venus de toute la Côte d’Ivoire et d’ailleurs.
Concrètement, quelles actions avez-vous mises en place dans ce sens ?
Nous avons créé les Journées Régionales de la Diversité Culturelle. Cette manifestation, qui en est à sa quatrième édition cette année, se tient à Mankono au mois de mai. Elle rassemble toutes les communautés vivant dans la région, y compris celles venues d’autres zones du pays. Elles y présentent leurs danses, leurs vêtements, leurs objets d’art anciens, leurs traditions. Il y a des stands d’exposition, des parades en tenues traditionnelles, une véritable vitrine culturelle vivante.
Ces événements permettent-ils aussi de prendre conscience de certaines pertes patrimoniales ?
Absolument. Lors d’une récente édition, la communauté Koyaka a reconnu qu’elle ne possédait plus de pagnes initiatiques, conséquence de la négligence. Ces pagnes, tissés autrefois avec patience et fierté, ont disparu. La jeune génération a été orientée vers le commerce, jugé plus rentable. Pourtant, tisser un seul pagne de qualité prend quatre jours. Ce patrimoine est aujourd’hui en péril, mais nous avons récemment organisé une réunion de sensibilisation avec la chefferie et les associations de femmes, qui ont pris conscience de l’urgence à agir pour préserver ces savoir-faire.
Quel bilan tirez-vous de cette 4e édition du Kalieh Festival ?
Je suis très satisfaite de cette édition. Bien que je n’aie pas pu lire mon discours, ce qui m’a le plus marquée, c’est la profondeur culturelle des activités proposées. Nous avons été témoins de rituels initiatiques rares, notamment ceux liés aux funérailles d’un initié et à la sortie des masques sacrés. Ce sont des éléments que l’on ne peut planifier, mais qui surgissent dans leur authenticité, enrichissant la portée spirituelle et culturelle du festival. Cela prouve que notre région a une base solide pour construire un véritable circuit culturel et touristique durable.
Par Médard KOFFI