Interview/Jean-Marie Koné (Président du FCE-CI) : ‘’Le gouvernement est responsable des actes de l’agro-business et doit en assumer toutes les conséquences’’
‘’ La stabilité est le gage d’un climat d’affaires prospères’’
CIV-lepointsur.com (Abidjan, le 6-6-2017) Le président du Forum des chefs d’entreprises de Côte d’Ivoire est très remonté contre les mutineries à répétition qui, selon lui, dépeignent négativement sur le développement des entreprises. A juste titre, au cours de l’interview qu’il nous a accordée, Jean-Marie Koné a invité le gouvernement à contribuer à l’instauration d’une paix durable. En plus, il s’insurge contre le laxisme des autorités qui a abouti au grand désordre dans le secteur de l’agro-business.
Monsieur Jean-Marie Koné, vous êtes Président directeur général de Technopole et président du FCE-Ci (Forum des chefs d’entreprises de Côte d’Ivoire). L’on pourrait dire que vous êtes très occupé.
Ma double casquette est le résultat de mon amour pour le travail. Voyez-vous, le travail doit symboliser l’ensemble des Ivoiriens. D’autant qu’il apporte le bien-être social et le bonheur. Pour moi, le travail constitue une passion et une satisfaction personnelle. J’éprouve franchement beaucoup de plaisir à exercer mes deux fonctions de Pdg de Technopole et président du FCE-Ci.
Y avait-il urgence à créer le Forum des chefs d’entreprises quand l’on sait qu’il existe la Cge-Ci (Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire) qui défend les intérêts des entreprises en Côte d’Ivoire ?
Je voudrais que vous reteniez que nous sommes dans un pays de démocratie. Bien entendu, cela laisse la latitude de créer autant de structures pour défendre un secteur d’activités. Notre volonté, en créant le FCE–Ci n’était pas de nous mettre à dos les structures existantes, encore moins nous démarquer d’elles. Nous n’avons été poussés que par un souci de donner une tribune d’expression aux entreprises, même aux moins importantes. Le Forum des chefs d’entreprises, à mon sens, est une sorte de complémentarité. Nous travaillons avec les structures étatiques.
Depuis quand existe le FCE-Ci et, combien d’entreprises revendique-t-il à ce jour?
Le Forum des chefs d’entreprises de Côte d’Ivoire existe depuis octobre 2016. Nous intervenons dans l’économie, la communication, le tourisme, l’import-export et l’artisanat. A ce jour, nous sommes à plus de 400 entreprises. Les chiffres augmentent tous les jours. Nous sommes régulièrement en contact avec les entreprises, même avec celles de l’intérieur du pays.
Quels sont les domaines de compétence du Forum des chefs d’entreprises de Côte d’Ivoire ?
Tous les secteurs d’activités sont représentés au FCE-Ci, de sorte à relayer les informations et aider plus aisément les entreprises à se réaliser. En plus, nous voulons amener les entreprises ivoiriennes à devenir plus compétitives. Malheureusement, cette volonté est de plus en plus contrariée par la passation des marchés qui nous échappent. D’autant que ces marchés sont le plus souvent attribués aux entreprises de certains décideurs. Aujourd’hui, c’est un secret de polichinelle. Plusieurs Ministres du gouvernement, par des prête-noms, ont créé des entreprises qui raflent pratiquement tous les marchés. En plus de cette difficulté, comprenez que nos entreprises ne bénéficient pas de financement pour se développer. Le financement en Côte d’Ivoire n’existe pas pour les petites entreprises. Les banques préfèrent accompagner les entreprises les plus importantes. Et pourtant, ce sont les entreprises débutantes qui ont le plus besoin d’aide. Pour nous, l’Etat a le devoir d’assister toutes ces PME stressées eu égard aux récents événements.
Il y a quelques semaines éclataient des mutineries à Bouaké pour s’étendre sur l’ensemble du territoire national. Les entreprises ont dû souffrir le martyr de ces mouvements d’humeur des militaires. A combien pouvez-vous chiffrer les pertes enregistrées au cours de ces remous sociaux ?
C’est déplorable, lorsqu’un pays atteint de tels remous sociaux. Vous convenez avec moi que la stabilité est le gage d’un climat d’affaires prospères. Tant qu’il n’y a pas de stabilité, il va s’en dire que les affaires prennent du plomb dans les ailes. Dans le cas d’espèce, nous ne pouvons pas chiffrer les pertes enregistrées, d’autant qu’elles peuvent à la fois être morale, financière ou matérielle. Je voudrais que vous reteniez que les dégâts sont énormes, mais le préjudice moral l’est encore davantage. Au niveau de Technopole S.A, l’entreprise est restée fermée pendant 3 jours. Ce qui représente des pertes énormes en termes d’entrées. Retenez surtout que la commission juridique du FCE-Ci a introduit une requête auprès des autorités compétentes. Pour l’heure, nous invitons le gouvernement à mener une enquête sérieuse, afin de situer les responsabilités et pensez à l’indemnisation des entreprises victimes. Nous pensons qu’il est temps qu’on nous laisse travailler. Les entreprises veulent contribuer au développement de la Côte d’Ivoire et cela ne peut être possible que dans un climat de paix et de stabilité.
Quel est votre sentiment par rapport au ralentissement constaté au niveau des entreprises du fait de ces mutineries à répétition, avec en toile de fond, une volonté de délocalisation de plusieurs entreprises ?
Nous ne sommes pas étonnés par la volonté de plusieurs entreprises de quitter la ville de Bouaké. En pareille circonstance, la meilleure façon pour un chef d’entreprise de sécuriser son entreprise est de fermer ou délocaliser. Il serait souhaitable que le gouvernement s’implique davantage pour redonner la confiance à ces entreprises. Nous avons besoin de paix durable pour développer nos entreprises.
Croyez-vous à l’émergence de la Côte d’Ivoire ?
Bien–sûr ! Nous croyons à l’émergence de la Côte d’Ivoire. Ce pays n’est pas le seul à connaître des crises. De grandes nations ont aussi connu des turbulences. Cela ne les a pas empêchés pour autant de se développer à travers leurs entreprises. Nous voulons que le gouvernement comprenne qu’une plaie mal soignée revient toujours. Il est important que nous réfléchissions sur le long terme en matière de paix et de stabilité, si notre volonté est de parvenir à l’émergence. Surtout, que les décideurs politiques mettent tout en œuvre pour trouver des solutions aux problèmes des militaires.
Monsieur le président du FEC-Ci, quel est votre point de vue sur la situation des entreprises d’Agro-business qui traversent des moments difficiles actuellement ?
Cette situation est d’autant regrettable que ces entreprises ont eu l’approbation du gouvernement avant d’initier leurs activités. Nous sommes curieux de savoir où se trouvait le gouvernement pour qu’elles arnaquent un nombre aussi important de citoyens ivoiriens ? Pourquoi a-t-il laissé faire pendant tout ce temps ? Bien entendu, le gouvernement est responsable de ces actes et doit en assumer toutes les conséquences. Je voudrais terminer en invitant les entreprises à nous faire confiance. Nous attendons les opérateurs économiques. C’est ensemble que nous allons relever le défi du développement de notre économie.
Réalisée par Idrissa Konaté et Opportune Bath
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