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[Interpellation de life tv par la HACA/Un militant de l’ex-UDPCI rétablit la vérité] « C’est Robert Guei qui a traité Laurent Gbagbo de Boulanger »


Abidjan, 01-08-2023 (lepointsur.com) Dans un communiqué du président de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle (HACA),  Maitre René Bourgouin, paru dans le journal en ligne, Koaci du 28 Août 2023, sous le titre : « Côte d’Ivoire : propos irrévérencieux à l’égard de Laurent Gbagbo « Life tv » une énième fois interpellée par la HACA », le média numérique rapporte une décision de la HACA, relative à des propos supposés « irrévérencieux » d’une des chroniqueuses de la chaine, à l’endroit de l’ancien Président de République , Monsieur Laurent Gbagbo.

Les faits

En effet, selon le Koaci, la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle (HACA) a constaté que « la chaîne Life tv a consacré la première partie de l’émission « le Talk » du 22 Août 2023, à la critique de la conférence de presse animée par l’ancien Président de la République, Monsieur Laurent Gbagbo, à travers le regard des chroniqueurs de l’émission ».

Selon le journal en ligne, la HACA indique dans son communiqué que « au cours de la séquence portant sur la forme de cette conférence de presse, une des chroniqueuses de l’émission » a dit ceci :

« …je sais déjà qu’à travers ce que je viens de dire, il y a beaucoup qui vont dire, oui, elle est partisane, elle mange au restaurant, mais moi, j’ai juste envie de vous répondre que c’est vous qui vous faites rouler dans la farine parce que vous aimez un boulanger ».

Suite à ces propos de la chroniqueuse, Koaci précise que le communiqué ajoute : « le collège des membres de la HACA s’est autosaisie » de la question, suite à la saisine par le Parti des Peuples Africains- Côte d’Ivoire (PPA-CI), le nouveau parti politique de Monsieur l’ancien Président de la République, Laurent Gbagbo.

Ainsi, poursuit le communiqué, le collège des membres de la HACA, se sont réunis le 25 Août 2023 en visio-conférence pour analyser la séquence de l’émission. Au terme de leur analyse, lesdits membres ont « décidé d’interpeller la chroniqueuse concernée mais également l’animateur pour avoir pas suffisamment maitrisé l’antenne à l’occasion de la séquence incriminé ». Car, pour la HACA « les propos tenus par la chroniqueuse à l’endroit du président du PPA-CI, Monsieur Laurent Gbagbo, sont irrévérencieux au regard de sa qualité d’ancien Président de la République ».

Notre analyse

Avant tout propos, je tiens à féliciter la chroniqueuse de « Life tv », pour sa brillante intervention et son analyse lucide et éclairée de la conférence de presse de l’ancien président fondateur du Front Populaire Ivoirien, Monsieur Laurent Gbagbo. J’apporte mon entière approbation aux propos de la chroniqueuse, dont l’élégance langagière n’a de pareille que sa beauté « Néfertitique ».

J’apporte un soutien sans faille à l’animateur de l’émission « le Talk » pour la parfaite tenue de son plateau, depuis qu’il fait cette émission de vacance. Je la suis avec grand intérêt. Je lui tire mon chapeau pour son courage à aborder les questions d’actualité « sans filtre ».

Je tiens enfin à encourager la chaîne de Télé « Life tv » et son Directeur, Fabrice Sawegnon, pour le respect, sans compromission, de la ligne éditoriale qu’ils se sont données, positionnant « Life Tv » dans le paysage audiovisuel ivoirien, comme « la chaine sans filtre ». C’est-à-dire, de mon point de vue, comme le media qui dit tout haut, ce que pensent la majorité des ivoiriens, tout bas, dans leur salon. Cette approche  de la communication audio-visuelle de la chaîne, est un signe de la vitalité de la liberté de presse et d’opinion, telle que prôné par la constitution de la troisième République. Le bon ton, utilisé par les chroniqueurs de la chaine dans tous les débats, est la preuve que le vivre ensemble est possible dans notre pays, en respectant les différences, sans avoir à refonder quoi que ce soit.

Relativement aux propos incriminés de la chroniqueuse, propos supposés « irrévérencieux » par la HACA, à l’endroit de l’ancien Président de la République, Monsieur Laurent Gbagbo, je voudrais signifier à Monsieur René Bourgouin, qu’ils ne sont ni irrévérencieux, ni injurieux à l’endroit de Monsieur Laurent Gbagbo.

Ces propos ne sont qu’un abrégé, de ceux tenus par le Général de Brigade à la retraite, Robert Guéi, Président du Comité National de Salut Public (CNSP) et chef de l’Etat de Côte d’Ivoire, qui a dirigé du 24 décembre 1999 au 24 octobre 2000, la première transition Militaro-civile que le pays a connue, suite au coup d’Etat militaire qui a emporté le régime du défunt Président Henri Konan Bédié. Le discours du Président Robert Guei, qui a ainsi été brillamment résumé par la chroniqueuse de « Life tv », a été prononcé par ce dernier, 13 septembre 2002, à la faveur d’une conférence de presse qu’il avait animé, pour analyser l’actualité du pays, comme vient de le faire l’ex époux de Simone Gbagbo. A cette époque, le Général brigade à retraite, Robert Guei, était le président de l’Union pour la Démocratie et la Paix en Côte d’Ivoire (UDPCI) le parti politique qu’il avait fondé le 21 février 2001.

Un rappel historique, pour rafraichir la mémoire de nos doctes de la HACA, s’impose pour mieux apprécier notre analyse, de peur d’être nous aussi accusé de propos « irrévérencieux » à l’endroit du collège des membres de la HACA.

En effet, en 2002, lorsque le Président Robert Guei, passait au bistouri, la gouvernance des refondateurs, cela faisait deux ans que Laurent Gbagbo était Président de la République de Côte d’Ivoire. Il avait été élu en octobre 2000 à la suite d’une élection calamiteuse (ce sont les mots de Monsieur Gbagbo lui-même), qui l’avait opposé au Président de la transition, le Général de Brigade Robert Guei.

C’est donc au sortir de cette scabreuse élection, que Robert Guei créé en 2001, l’UDPCI, un parti politique de centre-droite, pour reformer le pays, tel qu’il comptait le faire lors de la transition de l’an 2000. Malheureusement, il fut selon Robert Guei, roulé dans la farine, par celui-là même qui avait eu les plus belles parts de cette transition, Monsieur Laurent Gbagbo, alors président du FPI. Mais, convaincu que nul ne peut bâtir la nation ivoirienne sans le concours de tous, le Président Robert Guei, avait accéda à la volonté des députés indépendants qui lui étaient proches, de consentir une alliance parlementaire avec les députés du FPI, le parti du Président de la République d’alors, Monsieur Laurent Gbagbo. Grace à cette alliance, Laurent Gbagbo était devenu majoritaire à l’Assemblée Nationale.

En effet, n’ayant que 98 députés au parlement sur 225, Laurent Gbagbo ne pouvait pas gouverner. Afin de lui permettre d’avoir une majorité confortable pour mener à bien sa « refondation », le Président Robert Guei lui avait donné ses 15 députés qu’il avait gagnés lors des législatives de décembre 2000. Ainsi, avec les 15 députés pro-Guei et les 2 députés du PIT qu’il avait détourné, roulant ainsi dans la farine, Francis Wodié, son ami de la gauche plurielle, le chef des refondateurs obtient-il la majorité absolue au parlement et assoie la légitimité de son pouvoir. D’ailleurs, en 2001, lors d’un voyage d’amitié au Cameroun, il ne s’était pas fait prier pour narguer ses opposants, notamment le RDR du président Alassane Ouattara et le PDCI d’Henri Konan Bédié, en leur lançant au visage qu’il avait la majorité parlementaire qui lui permettait de gouverner.

Le sacrifice consenti par le premier Président de l’UDPCI, n’était pas sans contreparties ! Robert Guei et ses députés, attendaient en retours, de la part du chef des refondateurs, deux choses essentielles : le partage du pouvoir et la reconnaissance du statut d’ancien chef de l’Etat du Président Robert Guei.

Ainsi, en ce qui concerne le partage du pouvoir, le Président Robert Guei avait demandé à son successeur, Monsieur Laurent Gbagbo, avec qui il était en alliance au parlement,  de lui accorder la présidence d’une institution de la République, en occurrence, le Conseil Economique et Social, qu’il comptait donner à Monsieur Akoto Yao, le premier vice-président de l’UDPCI. Il désirait aussi obtenir cinq portefeuilles ministériels dans le gouvernement de large ouverture que comptait mettre en place le président Gbagbo en début de l’année 2002, au sortir du Forum de la réconciliation nationale.

En ce qui concerne le statut d’ancien chef d’Etat du Président Robert Guei, c’était une proposition de la Commission « Statut d’ancien chef de l’Etat », mis en place en l’an 2000 par le président de la transition, lors des constituantes de l’an 2000 pour la naissance de la deuxième République. Cette commission, présidée par le Professeur Samba Diarra, avait émis le souhait, et obtenu l’approbation de tous, d’accorder au président Robert Guei, à titre exceptionnel, le Statut d’ancien chef d’Etat. Cette position de tous, avait été réitérée dans l’un des 14 points de résolutions des conclusions du forum pour la réconciliation nationale tenue en novembre-décembre 2001. Ces assises, faut-il le rappeler, avait été organisées, à l’initiative du Président Laurent Gbagbo.

Malheureusement, la contrepartie de ce sacrifice ne viendra jamais. Toutes les promesses faites par Laurent Gbagbo au Général Robert Guei, ne seront jamais tenues. Laurent Gbagbo s’évertuera, dans des pitreries qu’il a seul le secret, à narguer le président Robert Guei, affirmant même dans son discours au forum pour la réconciliation nationale, que le président Robert Guei était « assimilé à un ancien président de la république » et qu’il le « payait » comme tel.

Alors, agacé par les félonies de Gbagbo, le Général Robert Guei, passa à l’offensive. Il décida de rompre l’alliance qu’il avait au parlement avec les députés FPI de Laurent Gbagbo. Le 13 septembre 2002, il organise, à l’hôtel Sofitel au plateau, une conférence presse, que les Guéistes caractérisent de « conférence d’adieu ». Ce jour-là, l’ancien homme fort du CNSP n’est pas tendre avec Laurent Gbagbo le roublarde. Comme un sniper des forces spéciales, enrobé dans son camouflage, et bien embusqué, il déverse sur «  le roi des doubleurs » dixit le chanteur reggae  Tiken Jah Fakoli, une pluie de « rafale de kalachinikov verbales ». Voici in extenso, l’extrait du discours historique du Présidant Robert Guei qui a conféré définitivement à Laurent Gbagbo, son statut structural de « boulanger ». Cette fraction de ce discours est extraite du journal le patriote de l’an 2002 -N°937 des samedi 14 et dimanche 15 septembre 2002.

Extrait : « ….voici un gouvernement qui se dit socialiste, alors que chaque ivoirien a, quotidiennement sa part de sourire moqueur des refondateurs. Et surtout sa dose de farine. Dans les journaux on lit tous les jours : « Gbagbo a roulé Guei dans la farine » ; « Gbagbo a roulé ADO dans la farine » ; « Gbagbo a roulé Bédié dans la farine »… Quel est donc ce chef d’Etat qui se transforme en boulanger pour baisser toujours la farine. Et pour rouler tout le monde dans la farine ? Ce que le FPI ne doit pas oublier, c’est que cette même farine sans levure sociale va lui boucher les narines, boucher la gorge, parce que pétrie par le peuple qui sait ce que Gbagbo ne sait pas. Le peuple n’est pas dupe…. ».

Ainsi, comme il l’avait annoncé, au terme de cette conférence de presse, le Président Robert Guei dissout définitivement et irréversiblement l’alliance avec le parti de Laurent Gbagbo et avec tout ce qui renvoyait aux refondateurs et à leurs affidés. A partir du 13 septembre 2002, tous ceux qui se reconnaissaient en Robert Guei, à sa pensée politique, à sa philosophie et à son parti l’UDPCI, étaient devenus opposant à Laurent Gbagbo et ses satellites.

Mais c’était mal connaitre « l’enfarineur » qui n’avait pas encore dit son dernier mot. Le 19 septembre 2002, alors que Robert Guei n’était opposant à la refondation que depuis sept (07) jours, il sera assassiné par une horde de soldats, conduite par l’ex General Dogbo Ble Brunau, un officier proche de Laurent Gbagbo (voir le procès des assassins du Général Robert Guei), suite à la tentative de coup d’Etat qui se transformera plus tard, en huit (08) années de rébellion armée. Rébellion dont le dénouement aura lieu en octobre 2010 avec les élections présidentielles auxquelles Laurent Gbagbo sera battu par le Président Alassane Ouattara.

L’histoire retiendra, qu’à la suite de sa défaite, balayant définitivement la refondation ou si l’on veut « la rebfondation », Laurent Gbagbo, refusera sa défaite et ira, comme Adolphe Hitler, se réfugier, avec ses intimes, dans son bunker ou il sera débusqué, gazé comme un rat qu’on enfume dans son trou, par les forces libératrices du pays. Ainsi, se réalisa, la prédiction du « prophète Guei ».

Conclusion

En définitive, nous disons qu’il est donc injuste et dénué de tout fondement, d’accusé la chroniqueuse de « Life tv » d’avoir tenu des propos prétendument « irrévérencieux » à l’endroit du président du PPA-CI au regard de son statut d’ancien Président de la République. Puis qu’il a été taxé de « boulanger », lorsqu’il était encore Président de la République. Si pendant qu’il était dans l’exercice de ces fonctions, ces propos n’ont pas été qualifiés d’ « irrévérencieux », pourquoi le seront-ils aujourd’hui, quand il n’est plus qu’un simple ancien Président de la République ?

La métaphore filée utilisée par le Président Robert Guei, pour affubler  Monsieur Laurent Gbagbo de son nouveau sobriquet de « boulanger » n’est que l’expression d’une vérité empirique qui reste observable, vingt un ans (21 ans) après. Car comment qualifier la relation de Monsieur Laurent Gbagbo avec Charles Blé Goudé, après leur sorti de la CPI ? N’est-ce pas une autre forme d’enfarinement ? Et que dire de celles avec la première Dame Simone Gbagbo ou de l’actuel Président du FPI, Affi N’guessan, ne sont-elles pas des entourloupes politiques bien ficelées ?

Même si le travail de boulanger est un métier noble, il fallait qu’en Côte d’Ivoire, un concept soit inventé, pour caractériser les hommes politiques qui ne respectent pas leurs paroles et passent tout leur temps à « faire des coups » et « donner des coups » dans le dos à leurs adversaires. Et c’est Robert Guei qui l’a forgé. Ainsi, en Eburnie, sont caractérisés de « boulanger », tous les hommes politiques qui pratiquent « l’art de rouler leurs amis dans la farine ». Et pour le moment, le maitre en la matière, c’est Monsieur Laurent Gbagbo.

Evitez, messieurs de la HACA, de laisser prospérer dans le corps social ivoirien, l’idéologie du « blanchiment de l’histoire » par certains hommes politiques, qui veulent effacer une page de leur histoire en se faisant passer pour des néo-panafricanistes alors qu’on sait, que de panafricaniste, ils ne le sont que par opportunisme politique.

Non, messieurs de la HACA, la presse est le quatrième pouvoir dit-on. Et les journalistes sont des historiens du présent. Alors, empêcher un journaliste ou un chroniqueur de rappeler notre histoire commune, un est frein à la construction d’une conscience collective. Construction indispensable pour bâtir une nation.

Bravo donc madame la chroniqueuse de « Life tv », d’inviter les ivoiriens à ne pas se faire rouler dans la farine, parce qu’ils auraient donné du crédit aux tartufferies d’ « un boulanger » !

Ce n’est pas parce que le parti du Président Robert Guei est mis en veilleuse, en hibernation voir en cryogénisation à l’intérieur du RHDP, par la volonté de ces dirigeants, que l’on va penser que les  « Guéistes » n’existent plus, pour rappeler à la mémoire collective, ce que nous ne devons pas tous oublier du passage de cet illustre homme à la tête du pays. Déconstruire notre histoire récente pour la reconstruire à la mesure de quelqu’un, serait oublié le martyr de ces milliers d’ivoiriens morts sur le chemin de la construction de notre démocratie.

Fait à Abidjan le Mercredi 30 Août 2023

GOUESSE DIOMANDE

Ancien président de la JUDPCI d’Adjamé

Membre de la Cellule électorale du RHDP d’Adjamé de 2010 à 2022

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