«Gilbert Diendéré, vous ne faites même plus peur au petit cafard, rendez les armes ! » André Silver Konan
Bonjour mon Général,
Je vous écris cette lettre, la première et certainement la dernière. Je sais que votre nuit a été longue. Longue comme toutes ces nuits maudites, depuis le jour tout autant maudit du mercredi dernier, où vous avez entrepris de faire le coup d’Etat le plus impopulaire du 21è siècle. Vous devez comprendre hic et nunc, ce message aussi simple que ferme, que vous envoient les révolutionnaires burkinabé, la communauté internationale et vos frères d’armes : vous êtes fini. Vous êtes un homme isolé, et par-dessus tout, vous êtes humilié. Vous êtes entré dans l’histoire du Burkina Faso, par effraction, vous allez en sortir, avec déshonneur. L’homme échappe rarement à son destin…
Lette ouverte à Gilbert Diendéré : « Vous êtes un homme fini, isolé et humilié, rendez les armes ! »
Mon Général,
Vous êtes un homme fini et je vais vous expliquer pourquoi, si vous feignez de l’ignorer, emmuré que vous êtes, dans votre palais factice et temporaire de Kosyam, vous qui avez toujours rêvé d’être Président. Pendant 30 ans, vous étiez au cœur des intrigues militaires et politiciennes du pouvoir burkinabé. D’abord avec le capitaine Thomas Sanakara, que vous avez fini par trahir, puis avec Blaise Compaoré, que vous avez aussi fini par trahir, puisqu’on sait désormais avec clarté, que c’est vous qui avez intrigué pour positionner Isaac Zida (qui a fini par s’échapper de votre puissance tutélaire), et récupérer subtilement une révolution qui était pourtant destinée à vous emporter, vous, votre ami Compaoré et tous les comparses (je parle de ceux qui ont trempé dans cette entreprise tyrannique de modification de la constitution) du CDP.
Vous êtes un homme fini, parce qu’aujourd’hui, toutes vos manigances sont découvertes, votre stratégie est dévoilée et décryptée d’avance. Et pire, vous ne faites plus peur, même pas au petit cafard de la plus petite maison de Gounghin, à plus forte raison au dernier margouillat de Yako, votre propre village où vos propres parents vous ont vomi et désavoué, en passant au feu ravageur, votre mini château de puissant. Vous êtes un homme fini.
Mon Général,
Vous êtes un homme isolé. Quand vous aviez décidé de passer à l’acte, en réalité, pour protéger votre avenir judiciaire (cf. assassinats de Thomas Sankara et de Norbert Zongo, je ne vous accuse de rien, soit dit en passant) et politique, sous le fallacieux prétexte de l’intérêt général (même si je continue de penser qu’une loi exclusionniste crée davantage de problèmes qu’elle n’en règle) ; vous n’aviez pas compté avec la farouche détermination, des révolutionnaires.
Vous avez misé sur deux choses. La première était la réaction de la communauté internationale. Vous saviez que celle-ci avait dénoncé la loi qui excluait certains Burkinabé du CDP, des élections générales ; et que de ce fait, elle condamnerait des bouts des lèvres, une action tendant à combattre cette loi. Vous avez aussi misé sur la peur que suscitait jusque-là, votre criminel Régiment de sécurité présidentielle (RSP) chez les civils et chez les militaires. Mais voyez-vous, votre prétendument unité d’élite ne fait plus peur aux jeunes officiers de l’armée qui ont décidé de passer à l’offensive, pour vous démystifier.
Vous vous êtes doublement trompés, comme se trompent ceux qui ont une estime surdimensionnée d’eux-mêmes. Mais regardez donc la réalité en face. Le Président de la Transition, Michel Kafando, (un homme qui a certes manqué de discernement en n’usant pas de son autorité pour arrêter la machine de l’exclusion) est accueilli à la résidence de l’ambassadeur de France. Tout un symbole diplomatique… Des chefs d’Etat de la Cedeao, dont votre propre frère d’armes, Idriss Déby, qui réclament votre reddition. Et par-dessus tout, les révolutionnaires qui ne lâchent pas prise, alors que vous aviez misé sur leur essoufflement, dans une pathétique stratégie de l’usure ; tout comme vous pensiez que l’armée vous rejoindrait, à tout le moins, resterait silencieuse face à votre insupportable forfaiture. Vous êtes un homme fini et seul.
Mon Général,
Vous êtes un homme humilié. La dernière fois, j’ai regardé votre image à l’aéroport, quand vous receviez le Président Macky Sall (un homme de bonne volonté, malgré les critiques dont il fait l’objet), flanqué de votre outrancièrement ambitieuse épouse Fatou, qui devrait rappeler aux Ivoiriens, une certaine Rose Doudou-Guéi, l’épouse défunte du défunt général putschiste Robert Guéi ; j’ai dit à des amis : « Cet homme a peur, on le sent dans ses yeux. Il suffit que les manifestants tiennent et que l’armée prenne position pour eux, pour que tout bascule ».
Oui, j’ai senti la peur dans vos yeux. Mais pire, j’ai senti la honte dans vos yeux. Vous avez fait le coup d’Etat le plus impopulaire du 21è siècle et cela vous a couvert de ridicule. Il vous reste à ne pas en faire le coup d’Etat le plus stupide, après celui du capitaine fantasque Amadou Haya Sanogo, au Mali.
Mon Général,
Vous avez maintenant le choix entre vous rendre avec armes, femme et bagages ou fuir, tel un plouc sans honte, en abandonnant vos 1 300 hommes qui vous ont suivi dans cette aventure ambigüe. Vous pouvez aussi décider, dans un baroud d’honneur du désespoir, de résister et d’aller à la confrontation armée, alors je vous promets au mieux la justice nationale, au pire la CPI. Vous avez donc le choix. Vous avez sorti votre ultime arme, tiré votre dernière cartouche et vous avez raté votre cible tant convoitée. Vous venez de perdre la première bataille de votre vie. Elle restera dans les annales de l’histoire comme la dernière, et sans doute la plus humiliante. Vous êtes un homme fini ! Entendez-vous ? Fini !
André Silver Konan Journaliste-écrivain Spécialiste du Burkina Faso
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