Elections en Espagne : percée historique des Indignés
L’Espagne a connu selon LeMonde un bouleversement politique, dimanche 24 mai, au soir des élections régionales et municipales. Le bipartisme qui y organise la vie politique depuis quarante ans se voit ébranlé par la percée de forces politiques nouvelles, Ciudadanos (« Citoyens », centre) et Podemos (« Nous pouvons », gauche radicale).
Le Parti populaire (PP, conservateur) du chef du gouvernement, Mariano Rajoy, paie ainsi le prix de quatre années de politique d’austérité et de scandales de corruption, qui touchent aussi le Parti socialiste ouvrier (PSOE).
- Régionales : « correction » pour la droite au pouvoir
Si le PP arrive en tête, juste devant le PSOE, il réalise son pire score depuis 1991 et est en passe de perdre la majorité absolue dans la plupart de ses régions. Selon les calculs d‘El Pais, le PP a perdu 2,55 millions de votes par rapport aux précédentes élections, en 2011.
Le parti conservateur contrôlait dix des treize régions appelées aux urnes dimanche. Au terme du scrutin, il n’est assuré de rester au pouvoir que dans trois Comunidades (régions) — Castille-et-Leon, La Rioja et Murcie. Il a perdu sa majorité absolue dans quatre régions : Cantabrie, Castille-La Manche, Valence et Madrid, et pourrait être poussé dans l’opposition — par la constitution de coalitions de gauche, une situation qu’il n’a plus connue depuis vingt ans — dans l’Aragon, dans l’Estrémadure et aux îles Baléares.
Le PSOE reste le deuxième parti du pays en nombre de votes, mais il a perdu 775 000 électeurs depuis 2011. Pedro Sanchez, secrétaire général du Parti socialiste, a estimé dimanche que les Espagnols avaient montré qu’ils voulaient un coup de barre à gauche, assurant qu’il appartiendra à son mouvement de faire en sorte qu’il y ait « des gouvernements progressistes » et « un changement sûr ».
Les différents partis entrent à présent dans une délicate période de tractations et de compromis pour former des coalitions régionales.
- Municipales : Madrid et Barcelone aux Indignés
A Madrid, bastion conservateur depuis 1991 et berceau du mouvement des Indignés, le PP, bien qu’arrivé en tête du scrutin, pourrait perdre au profit de l’alliance de gauche Ahora Madrid (Maintenant Madrid), emmenée par l’ex-juge Manuela Carmena et soutenue par Podemos. Si le Parti socialiste la soutient, ce qui fait peu de doute, Manuela Carmena deviendra maire de la capitale espagnole.
A Barcelone, deuxième ville d’Espagne, une autre alliance de gauche, dirigée par Ada Colau, fondatrice de la plate-forme de victimes d’hypothèques, qui milite contre les expulsions immobilières, et soutenue là aussi par Podemos, l’a remporté face aux partisans de l’indépendance de la Catalogne, un coup dur pour le mouvement séparatiste. Sa liste obtient onze sièges, contre dix pour les nationalistes conservateurs de CIU, cinq pour le nouveau parti Ciudadanos (centre droit) et quatre pour le Parti socialiste catalan (PSE).