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Coupure d’internet en Afrique : réparer les câbles sous-marins, une tâche complexe et fastidieuse


Une partie du continent africain s’est vu privée d’accès à internet, jeudi 14 mars, après l’arrachage de quatre des cinq câbles sous-marins qui permettent de relier l’Afrique de l’Ouest au réseau mondial. Si les différents opérateurs ont rapidement réagi pour rediriger leurs flux et rétablir le réseau, la réparation des câbles pourrait prendre plusieurs semaines.

Après les perturbations internet qui ont touché de nombreux pays de l’Afrique de l’Ouest comme la Côte d’Ivoire, qui a été la plus impactée, le Liberia, le Burkina Faso, la Guinée ou encore le Ghana, la situation est progressivement revenue à la normale. Sur les cinq câbles sous-marins reliant cette partie du continent à internet, quatre ont été endommagés, dont ceux de deux des plus gros opérateurs, Orange et MTN. Dans la plupart des cas, ce type d’incident est dû à un arrachage des câbles par des ancres de navires, l’activité de bateaux de pêche ou par des mouvements de terrain sous-marins.

Un océan de câbles, les autoroutes du web en question

Les pannes concernent principalement les câbles West Africa Cable System, Africa Coast to Europe, SAT-3 et MainOne, tous longs de plusieurs dizaines de milliers de kilomètres, desservant plusieurs pays le long de la côte ouest-africaine et se branchant à l’Europe, notamment en Espagne, au Royaume-Uni et en France.

Le trafic redirigé pour rétablir le réseau

Pour rétablir l’accès à internet au plus vite, les fournisseurs d’accès ont rapidement réagi. Dans les heures suivant la panne, l’opérateur sud-africain MTN assurait que des « opérations » étaient en cours pour « rediriger le trafic par des voies alternatives au réseau ». Même chose du côté d’Orange qui s’est tout de suite dit « mobilisé pour trouver des solutions de reroutage du trafic et connecter les pays isolés par d’autres voies ».

En réorientant les flux, les opérateurs internet ont pu rapidement stabiliser la situation et rétablir un accès au réseau satisfaisant pour la plupart des pays concernés par cette panne. MTN a par exemple affirmé ce lundi 19 mars avoir « rétabli avec succès ses opérations, récupérant plus de trois térabits par seconde de capacité » sur l’ensemble de sa zone de couverture. « Tout au long de cette période, nous avons donné la priorité au rétablissement des services en activant rapidement de nouveaux câbles pour accroître l’interconnectivité et établir des itinéraires alternatifs, renforçant ainsi la résilience de notre réseau », s’est félicité l’opérateur sud-africain.

Leur réparation est désormais une priorité des opérateurs pour éviter une saturation du réseau, mais il s’agit d’une tâche complexe et fastidieuse. « Il faut commencer par localiser précisément la coupure, explique Stéphane Lelux, le président du cabinet de télécom Tactis au micro de RFI. Ensuite, il faut envoyer un navire spécialisé sur le site, qui va devoir détecter précisément la position des câbles. Déjà ça, ça prend quelques jours : trois, quatre voire cinq jours maximum ».

Ces navires spécifiques sont ce que l’on appelle des navires câbliers. Ils sont conçus pour installer des câbles de la taille d’un tuyau d’arrosage au fond des océans, mais aussi pour les réparer. Jusqu’à 2 000 mètres de profondeur, ce sont des robots sous-marins qui sont chargés d’aller récupérer chaque extrémité des câbles endommagés, mais au-delà de 2 000 mètres, la situation se complique. Dans ce cas, « on travaille à l’ancienne, avec un grappin qu’on va laisser traîner au fond. On le relève pour ramener le câble à bord et c’est une fois remonté qu’on peut voir si on a tapé juste », expliquait Didier Dillard, le PDG d’Orange Marine, l’une de la petite douzaine d’entreprises dans le monde capable de réparer des câbles sous-marins, au journal La Nouvelle République en 2023.

Une opération qui « peut prendre plusieurs semaines »

Le temps que peuvent durer les réparations est donc très variables. Une fois les câbles remontés, « on les coupe proprement et on refait les soudures sur ces câbles que l’on rejoint avec un manchon étanche qui va ensuite être remis au fond de la mer. Là, on a quatre câbles donc quatre opérations à faire. Ça peut prendre plusieurs semaines », estime Stéphane Lelux. La fibre optique étant très fragile, l’opération pour ressouder les fibres entre elles peut prendre entre 15 et 20 heures pour chaque joint. Un travail mené par du personnel très spécifique spécialement formé pour ce genre d’intervention.

Près de 99% du trafic internet intercontinental est assuré par des câbles sous-marins, leur importance est donc capitale, en particulier pour l’Afrique. Le continent est « très dépendant des câbles sous-marins, y compris pour les connexions continentales. Je pense que les leçons à tirer de tous ces incidents qui continueront malheureusement, c’est d’abord de diversifier les routes et renforcer les interconnections entre les pays », conclue Stéphane Lelux.

RFI

 

 

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