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[Côte d’Ivoire] « L’hiver de la haine est passé. Ou doit passer. Le printemps de la réconciliation doit s’installer »


Abidjan, 01-04-2021 (lepointsur.com) À Barthelemy Zouzoua Inabo: La CPI a tranché. Laurent Gbagbo et Blé Goudé sont acquittés, libres. La Côte d’Ivoire doit prendre la main. Dieu ne descend pas pour parler aux humains. Il leur donne le discernement pour décoder les signes et agir pour un monde meilleur.

L’hiver de la haine est passé. Ou doit passer. Le printemps de la réconciliation doit s’installer. Ton Camarade tient la télécommande du temps. De la couleur du temps.

“ Dans la bataille devant la CPI, Laurent Gbagbo et Blé Goudé ont gagné. ’’

Les hommes et les femmes du Sport connaissent les joies de la victoire et les douleurs de la défaites. Cependant, ils-elles le savent : dans la victoire comme dans la défaite, il faut rester digne. Savoir savourer son succès en respectant la douleur de l’autre. Et surtout, tirer les leçons pour le futur. Pour demain.

Dans la bataille devant la CPI, ton Camarade a perdu. La camarilla de conseillers et de thuriféraires (j’emprunte les mots à mon formateur Bamba Alex Souleymane) qui ont rivalisé d’imaginations autour de lui, ont agi dans leurs propres intérêts. Ton Camarade l’apprend à ses dépens : la défaite est orpheline. Il est aujourd’hui seul face au monde. La solitude du chef. Il devrait même lancer un audit de la cellule technique et juridique qui a piloté le procès. Le président de la Confédération des victimes des crises en Côte d’Ivoire est formel : les victimes des événements indexés devant la CPI existent. Ils sont répertoriés. Mais les témoins de l’Accusation qui ont défilé devant le tribunal, il ne sait pas qui les a choisis et comment ils ont été sélectionnés.

Ton Camarade doit agir pour la Côte d’Ivoire, en qualité de « Président de tous les Ivoiriens », garant de la constitution.

Il est face au miroir de l’histoire. Il tient l’occasion de rentrer dans l’histoire par la grande porte. Comme son mentor, le père fondateur.

“ « Les preuves ne sont pas faibles. Elles sont exceptionnellement faibles ». ’’

Mes souvenirs d’étudiant tombent sur le cas Emmanuel Dioulo, ancien député et maire d’Abidjan… Accusé de tous les maux à l’époque, vilipendé dans la presse, ennemi juré de la nation, il était traqué par la Justice. Surprise de nos consciences d’adolescents, l’homme est rentré en Côte d’Ivoire en avion Concorde. Retour organisé et encadré. Houphouët-Boigny, certains l’appelaient « Garrincha, savait frapper de la main droite et consoler de la main gauche. Pardonner pour la cohésion nationale. Il savait dès lors, mixer défaite et victoire ou l’inverse dans l’intérêt national. Pour l’apaisement. Pour la paix, préalable à tout développement ».

Dans la bataille devant la CPI, Laurent Gbagbo et Blé Goudé ont gagné. « De l’enfer, je reviendrai », écrivait l’ancien président des jeunes Patriotes dans un livre publié en 2016. De l’enfer de la prison de Schevingen, les deux accusés sont sortis. Totalement acquittés. La démolition méthodique et patiente des arguments du Bureau du procureur par le Président de la chambre d’appel a montré les limites du dossier monté devant la Cour pénale internationale. « Les preuves ne sont pas faibles. Elles sont exceptionnellement faibles ».

Victoire devant la CPI. Victoire devant l’histoire. La victoire à plusieurs pères. Tout le monde la revendique. Tout le monde la célèbre. Tous ceux qui ont cru et y ont consacré toutes leurs énergies ces dix dernières années. Comme tous ceux qui ont été pris de doutes et qui pour certains, n’y croyaient plus.

“ Justement, l’heure de la politique a sonné. Laurent Gbagbo et Blé Goudé n’ont qu’un désir : retourner en Côte d’Ivoire. La Justice leur a ouvert la porte. ’’

Le 29 octobre 2020, Laurent Gbagbo avait donné le ton : « Négocier, discuter, se parler… il est toujours temps de le faire… ». Laurent Gbagbo a le triomphe plutôt modeste. Il est arrivé en taxi à la Haye, en provenance de Bruxelles. À la fin de l’audience, alors que ses partisans et la presse l’attendaient, il est reparti sans mots dire. Il le sait et c’est lui qui le dit « la politique est un métier ». En avril 2011, il appelait déjà les différentes parties à mettre fin à la belligérance et « à passer au règlement politique de la crise ».

Justement, l’heure de la politique a sonné. Laurent Gbagbo et Blé Goudé n’ont qu’un désir : retourner en Côte d’Ivoire. La Justice leur a ouvert la porte. Les discussions entre le pouvoir et l’opposition doivent consolider les sentiers. L’avenir de la Côte d’Ivoire commande que les différents acteurs fassent preuve d’humilité devant l’épreuve. Les Sportifs parlent de fair-play. Pouvoir et Opposition devront désormais aller à l’essentiel. Dans la discussion et par le dialogue.

Fernand Dédeh

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