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[Côte d’Ivoire En exclusivité] L’intégralité de la dernière interview de Vincent Gadou Kragbé


-Voici mon nouveau projet : Initiative de Valorisation des Ressources naturelles et humaines et de déploiement des Technologies (HNRxVI en Anglais)

Cette interview réalisée en 2017, est la dernière accordée à un journaliste par le concepteur et ancien PDG du VITIB (Zone franche de Grand-Bassam dédiée à la biotechnologie et aux technologies de l’information), Vincent Gadou Kragbé. Dans cet entretien dont les deux dernières questions ont été coupées, il revient sur cette importante institution et présente son nouveau projet.

Vous êtes de retour au pays, après 6 ans d’exil ? Quelles sont vos impressions ?

Je n’étais pas exactement en exil, mais plutôt à l’abri auprès de ma belle-famille. Mon épouse est Ghanéenne, ma famille comme beaucoup d’autres a connu des moments terribles. J’ai même perdu un être très cher, celui que j’ai toujours considéré comme mon frère jumeau, le Colonel Major Dosso Adama, un homme brillant, humble et affable. Avec votre permission, j’aimerais vous faire une confidence, nous étions encore en classe de 5e lorsque nous avons lu «Vol de nuit» d’Antoine de St Exupéry. C’est alors qu’Adama a choisi sa carrière de pilote. Et puisque l’Etat de Côte d’Ivoire n’offrait pas de bourse pour les grandes écoles en vue d’études de pilotage, Adama m’a demandé de l’accompagner rencontrer le Gl Thomas D’Aquin. C’est lors de cette rencontre que le Général a accepté de lui faire octroyer une bourse pour réaliser son rêve avec l’armé, dont il ne s’est jamais départi et qu’il a brillamment réussi surtout avec un maître comme le Gl Coulibaly.

‘’J’ai pensé devoir offrir et partager dans la même veine avec mes frères ivoiriens mon ambitieux rêve d’une Zone économique spécialisée dénommée aujourd’hui Vitib’’

C’est même grâce aux conseils du Colonel Major Dosso que ma famille a survécu à la crise où il a malheureusement perdu la vie. Paix à son âme !Pour des raisons de famille, je suis encore entre Accra et Abidjan.

En ce qui concerne mes impressions sur la situation politique et économique du pays,je n’ai pas beaucoup à dire. Mes impressions pourraient se décliner sur deux volets.

En ce qui concerne l’aspect politique, je suis resté de cœur et d’esprit vers ma Côte d’Ivoire natale. Je suis de ceux qui préfèrent faire table rase de ce qui oppose les hommes et qui, ne reconnaissant rien de supérieur à l’intérêt général, emploient leur savoir et leur raison au bien-être commun. La crise a quintuplé ma foi chrétienne. Je ne peux nier ma promiscuité avec le précédent régime (Conseiller spécial du Président en matière des Ntic)qui m’a permis de réaliser un rêve qui me passionnait : créer en Côte d’Ivoire la première Zone économique spécialisée de la biotechnologie et des technologies de l’Information (leVitib ).

Je prie le Seigneur d’apaiser les cœurs, de protéger tous ceux qui sont restés en vie, et de faire en sorte que mon pays retrouve la paix totale car de vengeance en vengeance, notre pays, notre continent restera à la traîne pour les siècles à venir.

Pour le deuxième volet, je suis agréablement surpris par les réalisations surtout en matière d’infrastructure routière. Abidjan aurait été invivable sans ces réalisations et l’économie en aurait beaucoup souffert, la sécurité aussi. Je note aussi que certaines initiatives heureuses ont été amorcées pour faire face au problème crucial de notre pays voire de tous les pays africains à savoir, la lutte contre la pauvreté. Mais vous savez, nous n’irons pas très loin si nous ne recouvrons pas la paix des cœurs. Et en cela, j’encourage le Président de continuer à faire tout ce qui est en ses pouvoirs pour relever ce défi majeur, cependant, tous les ivoiriens doivent l’y aider.

Pour ce qui concerne le plan économique, j’ai eu le privilège de côtoyer le Président de la République lorsqu’il était Premier ministre. Je sais que c’est un gros travailleur, au fait des préalables essentiels du développement économique d’un pays. C’est d’ailleurs dans ce cadre qu’il a lancé la vision d’une Côte d’Ivoire émergente.

Vous étiez à Daoukro, récemment pour rencontrer le président Bedié. De quoi s’est-il agi ?

J’étais à Daoukro à deux titres. Au-delà de tout aspect politique, le Président Bédié est pour moi comme un parrain, un mentor en quelque sorte. J’ai eu le privilège de le rencontrer en 1971. Il a beaucoup contribué à ce que je suis dans la vie. Je pense que nous sommes nombreux à avoir bénéficié de son encadrement tant dans notre vie estudiantine que professionnelle. C’est grâce à lui que j’ai pu me rendre aux Etats Unis pour poursuivre mes études universitaires. Nous étions 3 étudiants à obtenir une bourse de l’African-American-Institute, mais le billet était à la charge de chacun. Je n’en avais pas les moyens. Une connaissance m’a amené chez le Président Bédié, alors Ministre de l’Economie et des Finances qui sans hésiter à assurer mon voyage. Depuis lors, il m’a adopté et nous sommes restés en contact quasi permanente. J’ai recouru à lui chaque fois que cela s’est avéré nécessaire, pour solliciter des conseils professionnels et au plan familial.

Outre cet aspect, je suis militant du PDCI, je sais que certains ont pensé que j’avais changé de parti politique, il n’en n’a jamais été, je suis demeuré PDCI au vu et au su du Président Gbagbo qui ne m’a jamais suggéré de rejoindre le parti qui le portait. J’étais membre du Bureau Politique du PDCI après avoir été membre du Grand Conseil et député au compte du PDCI à l’Assemblée Nationale, rapporteur Général et Vice-Président de la Commission des Affaires Financières et Economiques. J’ai assisté le Professeur Guikahué à faire la campagne du PDCI dans le Guébié pour l’élection du Président Bédié en 1995. Le Président Gbagbo a reconnu ma compétence, il m’a ouvert les bras et a sollicité ma collaboration de technocrate. Cependant, je reconnais avoir posé des actes qui m’ont été reprochés par mon parti. Beaucoup d’eau a coulé sous le pont, mais je n’ai jamais démissionné de ma famille politique.

Pour les deux aspects évoqués ci-avant, il était nécessaire que j’aille me réconcilier avec mon mentor, mon Parrain, le Président, Bédié, lui présenter mes excuses de petit frère pour toutes maladresses avérées et lui demander de m’autoriser à revenir dans ma famille d’accueil, la sienne et dans ma famille politique qu’il dirige. C’est ce que j’ai fait. Il m’a accueilli avec toute la sagesse qu’on lui reconnait et m’a prodigué des conseils.

Vous êtes le concepteur, le père de Vitib. Quelle est votre appréciation sur l’avancement du projet ?

‘’Ce rêve, enrichi par mes nombreux voyages d’apprentissage en Chine et en Inde, je l’ai vécu d’abord seul’’

Je ne me suis pas encore rendu sur les lieux pour constater l’avancement réel de Vitib. Vous avez raison, j’en suis le géniteur en collaboration avec un groupe de travail bien sûr et j’en suis fier.

Je voudrais profiter de notre échange pour renouveler mon remerciement à la direction de Vitib de m’avoir invité au lancement des travaux,le…. . Et surtout, remercier sincèrement le Premier ministre, Kablan Duncan pour l’accueil chaleureux et fraternel dont j’ai été l’objet de sa part lors de cette cérémonie.

Appelé à servir officiellement mon pays auprès du Président de la République d’alors dans mon domaine de compétence, j’ai pensé devoir offrir et partager dans la même veine avec mes frères ivoiriens mon ambitieux rêve d’une Zone économique spécialisée dénommée aujourd’hui Vitib et qui m’a valu d’être désigné «Africain de l’année 2007 » par FDI Intelligence, du célèbre journal économique Financial Time Group, de Londres. Vous étiez à cette occasion avec la délégation ivoirienne à New Delhi et vous avez constaté les sommités qui ont été désignées pour les autres continents. J’étais fier pour mon pays et pour moi-même, je ne puis vous le cacher.

Vous avez suivi avec d’autres journalistes, le projet ZBTIC qui a donné naissance à Vitib. Ce rêve, enrichi par mes nombreux voyages d’apprentissage en Chine et en Inde, je l’ai vécu d’abord seul. Il ne m’a pas toujours été facile de convaincre mon entourage de sa pertinence, mais par la grâce de Dieu, il était presque devenu une réalité avant la crise. Mon équipe et moi avons conduit toutes les études techniques et de faisabilité, Nous avons assister l’Assemblée Nationale à finaliser la loi qui a été votée à 100%, J’avais pu obtenir l’adhésion de partenaires de référence internationale et avec l’aide du Ministre de l’Economie et des Finances d’alors, nous avions pu lever auprès de Eximbank du gouvernement de l’Inde, de la BOAD et de la BIDC, les fonds nécessaires au développement de sa première phase (environ 30 milliards de francs CFA).

Comme vous le savez, le maître d’œuvre est seul à connaître les difficultés qu’il a dû surmonter, et à mesurer la distance qu’il lui a fallu franchir entre l’esquisse d’une œuvre et son achèvement. Il peut l’aimer mieux et pour d’autres raisons que les « profanes »: comme une mère préfère l’enfant qui lui a causé le plus d’inquiétudes et de soucis.

Il s’est passé par la suite beaucoup de choses. Trois (3) équipes dirigeantes se sont succédé après moi et je n’ai plus eu la chance de suivre de près le développement du projet. Mais j’ai foi en l’équipe dirigeante actuelle de Vitib qui fait avancer ce projet sous la bienveillance du Ministre Bruno Koné qui n’est d’ailleurs pas étranger à l’avènement de VITIB. C’est une importante initiative pour notre pays et pour la sous-région je sais qu’il bénéficie et continuera de bénéficier du soutien de SEM le Président de la République. Il n’y a donc pas de raison que les objectifs initialement prévus ne soient pas réalisés.

Vous êtes de retour.  Où peut-on s’attendre à voir surgir encore la férule de l’innovation ?

Vous savez, chaque homme garde en lui un idéal de vie. Il le porte d’abord obscurément en son âme, puis plus ouvertement dans les actes qu’il pose, avec les moyens mis à sa disposition par la société qui l’a formé et les opportunités à lui offertes par l’histoire et par les événements de son époque qui le révèlent. C’est le cas de VITIB.

‘’HNRxVI est un instrument novateur pour le développement économique et l’inclusion sociale’’

Depuis mon départ volontaire loin du pays, certes par réflexe face à l’inconnu de la situation qui prévalait, mais surtout du fait du traumatisme que j’ai vécu, j’ai pris l’initiative de concevoir (de développer) un projet en collaboration avec un groupe multidisciplinaire d’une quinzaine d’Experts internationaux de haut niveau originaires de plusieurs pays d’Afrique, d’Asie et d’Europe, (Universitaires Chercheurs, économistes, polytechniciens, Consultants, Agronomes, Environnementalistes, Ingénieurs, Dirigeants d’Entreprises, Experts financiers, Juristes, etc) au fait des réalités socio-économiques de l’Afrique.

Vous savez, Le 06 Octobre, 2015, lors de la Conférence annuelle de l’Association internationale du Barreau à Vienne, en Autriche, M. Kofi Annan, Président du « Africa Progress Panel», a lancé dans sa présentation, un défi aux dirigeants africains quant à l’utilisation des ressources naturelles de leurs pays. Il a exhorté tous les pays africains à élaborer une stratégie nationale concernant l’exploitation de leurs ressources naturelles et à la faire comprendre aux investisseurs et au public.Ces stratégies nationales disait-il, doivent définir comment le secteur de l’extraction correspond à des plans de réduction de la pauvreté, à une croissance inclusive et à une transformation sociale.

Nous avons passé en revue les préalables essentiels de l’émergence relevant de :

  • L’environnement Social & Politico-Economique,
  • Les infrastructures de base,
  • La valorisation des ressources naturelle et humaines,
  • Le déploiement des nouvelles technologies.

Nous avons suivi les dispositions préconisées par les Présidents des Etats Africains dont celles énoncées pendant la Conférence internationale tenue sur l’émergence en mars 2015 à Abidjan sous la présidence de SEM le Président de la République de Côte d’Ivoire.

Nous avons passé en revue la riche base de données de «Africa Progress Panel».

Savez-vous que les revenus tirés des ressources naturelles tirent la croissance sur tout le continent cependant, les pays subsahariens riches en ressources naturelles occupent toujours 9 des 15 derniers rangs de l’indice de développement humain 2013 de l’ONU.

Aujourd’hui, environ 65% de la population totale de l’Afrique est en dessous de l’âge de 35 ans, et plus de 35% se situe entre 15 et 35 ans – faisant ainsi de l’Afrique le continent le plus peuplé de jeunes. En 2020, il est prévu que trois personnes sur quatre auront en moyenne 20 ans. Environ 10 millions de jeunes africains arrivent chaque année sur le marché du travail.

Les experts évaluent le poids de l’Afrique dans le commerce international à 3% en 2014, et les statistiques souvent exposés dans tous les rapports des institutions internationales résument à elles seules le chemin que doit parcourir l’Afrique pour prendre une place de choix dans la chaîne des valeurs. En effet, les dirigeants africains ne doivent jamais perdre de vue les fondamentaux de l’avantage concurrentiel des nations dans l’élaboration des programmes de développement.

J’ai suivi avec intérêt les propositions de mon ex-collègue et ami à l’Assemblée Nationale, le Ministre Adjoumani, Ministre des Ressources animales et Halieutiques lors des travaux de la 29ème conférence régionale de l’Organisation des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Le Ministre et son collègue de l’Agriculture et du Développement rural ont fait des propositions intéressantes sur la chaîne des valeurs, auxquelles les dirigeants africains devraient accorder une grande attention.

Fort de nos observations notamment des Pays Nouvellement Industrialisés et émergents, de notre analyse des faits et de nos expériences respectives de plus de 25 années de pratique professionnelle en Afrique, mes collègues et moi-même croyons fermement (avons la ferme conviction) qu’il y a un réel espoir pour l’Afrique d’atteindre le stade de l’émergence, à condition que les dirigeants africains adoptent la bonne attitude, maîtrisent les préalables essentiels de l’émergence et soient déterminés à mettre en œuvre les outils appropriés.

Nous avons donc mis au point un programme dénommé « Initiative de Valorisation des Ressources Naturelles et Humaines et de déploiement des nouvelles Technologies (HNRxVI en Anglais)»qui couvre l’ensemble du territoire du pays hôte. Il s’agit d’un programme intégré reposant sur trois piliers dont l’un est constitué de deux puissants instruments stratégiques et dont la mise en œuvre contribuerait efficacement au développement durable et à la lutte contre la pauvreté.

HNRxVI est un instrument novateur pour le développement économique et l’inclusion sociale qui s’intègre aisément à tout programme de Gouvernement en tenant compte des initiatives en cours. Il s’agit avant tout d’un puissant levier du parcours conduisant à l’émergence des Etats d’Afrique.

En avez-vous parlé aux Autorités ivoiriennes ou à d’autres responsables de pays africains ?

Nous avons achevé la mise au point du Programme. Il est entièrement documenté. Nous allons démarrer la promotion. A ce jour, très peu de Chefs d’Etats africains sont informés de son existence, J’en ai soufflé mot à mon Parrain à qui je compte le présenter en détails, au Premier Ministre et à quelques contacts des initiateurs. J’espère bien sûr que la Cote d’Ivoire, mon pays sera le premier à l’adopter.

Outre l’important déploiement des infrastructures, la Cote d’Ivoire a pris des initiatives heureuses pour la relance de l’économie après la crise et la création d’emplois pour les jeunes. On peut rappeler çà et là:

  • Le SNGRC (Secrétariat Nl à la Gouvernance et au Renforcement des Capacités),
  • Le FREMIN (Fond Nl de restructuration et de Mise à Niveau des Entreprises Industrielles),
  • Le PNRMN (Programme Nl de restructuration et de Mise à Niveau),
  • L’AEJ (Agence Emploi Jeune),
  • Le BCP-Emploi (Bureau de Coordination des programmes Emploi),
  • Le SCAED (Le Service Civique d’Actions pour l’Emploiet le Développement).

Mon souhait est que SEM le Président de la République accepte de recevoir une délégation des initiateurs afin qu’il puisse apprécier dans quelle mesure il pourrait s’intégrer au programme d’Emergence 2020 ………

Nous comptons incessamment lui adresser une demande d’audience officielle.

Interview réalisée par ALAKAGNI HALA, en 2017, alors journaliste à Fraternité Matin.

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