Après les inculpations des ex-rebelles : La classe politique, des ONG et associations des droits de l’homme réagissent
En Côte d’Ivoire, d’importants ex-chefs rebelles ont été inculpés pour des crimes commis pendant la crise postélectorale. Selon une source proche du dossier, Chérif Ousmane et Losséni Fofana deux anciens com’zones (chefs militaires des ex-Forces nouvelles), comptent parmi les personnalités mises en examen. Ils ont joué un rôle important pendant la crise face aux forces de Laurent Gbagbo. Les réactions sont nombreuses, et vont pour une fois dans le même sens.
Un signal fort pour la réconciliation
C’est la première fois depuis 2011 que des hommes ayant soutenu Alassane Ouattara sont poursuivis. Au total, une vingtaine de personnes font l’objet de ces nouvelles inculpations. Le camp de l’ex-chef d’Etat n’est pas épargné, ce qui satisfait la Fédération internationale des droits de l’homme.
« Pour la FIDH, ces inculpations sont une véritable satisfaction, se réjouit ainsi Florent Geel, responsable Afrique de l’organisation. Cela représente le rééquilibrage des poursuites, souhaitées, attendues, démontrant aussi que la justice ivoirienne, quand elle en a les moyens, la volonté et la capacité, peut avancer sur les auteurs des crimes les plus graves, quels que soient leurs camps. »
Le responsable du bureau estime que même si ces inculpations sont « un peu tardives », il est néanmoins important qu’elles interviennent « à la suite d’enquêtes sérieuses, avec des faits précis ». Mais attention, prévient Florent Geel, il faut maintenant que le processus aille jusqu’au bout. « Inculpation ne veut pas dire culpabilité. Les personnes qui sont inculpées devront pouvoir se défendre, mais les victimes aussi auront cette fois-ci la possibilité d’être présentes, ce qui n’était pas le cas dans les procès précédents. » Mais d’une façon générale, conclut-il, « c’est un enjeu pour la Côte d’Ivoire de montrer que justice puisse être rendue, quel que soit le camp. »
« Eventuellement, le gouvernement commentera »
Une analyse partagée par le porte-parole du gouvernement, Bruno Koné, pour qui cela ne doit pas être une surprise, puisque « le chef de l’Etat a toujours clamé haut et fort qu’il n’interviendra pas dans les affaires de la justice ». Et que si celle-ci était un jour « amenée à appeler devant elle des « jeunes gens », qui se sont battus pour le rétablissement de la démocratie en Côte d’Ivoire, libre à elle de le faire. » Selon lui, cet « état d’esprit doit rester », rappelant lui aussi qu’il ne s’agit là que d’inculpations et de mises en examen. « C’est le début d’une procédure. Laissons la justice faire son travail, et éventuellement, le gouvernement commentera, une fois que la justice aura décidé. »
Une fois n’est pas coutume, Bertin Konan Kouadio, député du PDCI-RDA, et membre de la Coalition nationale pour le changement (opposition) semble être également sur la même ligne. Même si l’on peut déceler une pointe de méfiance dans ses propos. Il se félicite ainsi de ces mises en examen dans le sens où « inculper quelques com’zones, fussent-ils des seconds couteaux, comme c’est le cas du RDR, proche d’Alassane Ouattara, c’est la preuve que des crimes ont aussi été commis de part et d’autre. »
Mais lui aussi regrette la lenteur de la justice. « Pendant à peu près cinq ans, j’ai personnellement dénoncé la justice des vainqueurs. Mieux vaut tard que jamais. » Il rappelle également que l’actuel président avait dit, dès le début de son quinquennat vouloir faire la lumière sur tous les des crimes commis dans ce pays, « et que tous ceux qui ont tué paieront devant la justice. »
Le président du PDCI-RDA reste prudent et estime que ceci doit être le signe de la naissance d’une « justice pour tous, une justice équitable, dont a besoin la Côte d’Ivoire pour se réconcilier véritablement [et non] de la poudre aux yeux pour distraire l’opinion internationale et les Ivoiriens, afin de faire croire que les conditions soient réunies pour accompagner et adouber un seul candidat, ou bien Alassane Ouattara. »
Des enquêtes qui avancent du côté de la CPI
Les progrès de la justice ivoirienne ne doivent pas faire oublier que la Cour pénale internationale enquête également sur tous les crimes commis en Côte d’Ivoire, rappelle le porte-parole du bureau du procureur Patrick Turlan. « Mme la procureure l’a rappelé avec force dans les derniers mois. Nous avons en ce moment une intensification de ces enquêtes […] et nous avons pu avoir des résultats relativement rapides, concernant Laurent Gbagbo lui-même, Charles Blé Goudé, et Simone Gbagbo. »
Le procès des deux hommes est en effet prévu en novembre 2015, et la CPI réclame toujours le renvoi du dossier de l’ex-première dame. Et c’est justement, « parce que nous avons franchi une étape dans la procédure concernant M. Gbagbo et M. Blé Goudé, que nous sommes maintenant en mesure d’allouer des ressources supplémentaires qui nous permettent d’intensifier ces axes d’enquête sur l’autre partie pour avancer plus rapidement en espérant avoir des résultats dans les meilleurs délais. »
Source : RFI
Le titre est de la rédaction
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