Technologie : un CES 2021 entièrement virtuel, les startups françaises tentent de se démarquer
À cause de la pandémie de Covid-19, le plus grand salon mondial de l’électronique grand public, le CES de Las Vegas, se déroule cette année entièrement en ligne, sur internet. Habituellement très présentes, les startup françaises sont un peu moins nombreuses. Et celles qui participent doivent se battre pour se faire remarquer dans cet événement virtuel.
Le monde de la « tech » n’a pas d’autre choix cette année que de s’appuyer sur le numérique. L’incontournable CES de Las Vegas, le salon mondial des nouvelles technologiques grand public, est passé en mode virtuel pour son édition 2021, pandémie de Covid-19 oblige. Les constructeurs et fabricants devront présenter à distance leurs nouveaux téléviseurs, smartphones, réfrigérateurs, véhicules autonomes, objets connectés ou autres gadgets insolites.
Le gigantesque centre de convention de Las Vegas et ses nombreuses extensions dans les hôtels sont remplacés par un site internet un peu austère sur lequel les exposants disposent chacun d’un stand numérique, en réalité une simple page internet.
Cette page peut contenir photos, vidéos ou conférences en direct. Mais c’est surtout sur le module de tchat, de discussion en direct, que comptent les startups françaises pour nouer des contacts à l’international.
La délégation française, qui est historiquement l’une des plus importantes, continue de croire en l’opportunité commerciale qu’offre le salon. Elle dénombre 140 entreprises cette année, dont 110 startups. Un cercle beaucoup plus restreint comparé aux 350 exposants hexagonaux l’an dernier.
« Pas à la hauteur de la vitrine technologique qu’est le CES »
Mais trois jours après l’ouverture du salon, l’optimisme retombe. Rodolphe Hasselvander est un fidèle de l’événement. Cette année, il annonce la commercialisation du robot Buddy. En développement depuis 5 ans, l’appareil se présente comme une aide au maintien à domicile de personnes âgées, handicapées ou malades.
Pour l’entrepreneur, ce CES ne tient pas ses promesses : « On est habitué à tellement d’effervescence quand on est à Las Vegas qu’on pensait crouler sous les demandes. Là, on a des contacts bien sûr mais c’est très calme par rapport à la version physique. En plus, les outils mis en place par les organisateurs ne sont pas à la hauteur de la vitrine technologique du monde qu’est le CES. Pas de stand en 3D, ce n’est pas attrayant, c’est très difficile de sortir du lot dans ces conditions. » Un constat semble-t-il partagé par beaucoup d’autres membres de la délégation française, réunie sur un groupe WhatsApp.
Comme chaque année, c’est l’organisme d’Etat Business France qui s’est chargé de fédérer les startups françaises autour de la bannière « French Tech ». Son représentant, Maxime Sabahec, reconnaît « qu’il y aura sans doute moins d’opportunités de prises de contacts pour les exposants. Lors d’un CES normal, certaines startup reviennent en France fortes de 400 contacts internationaux ». Pour autant, il s’attend à ce que cette année, « les contacts qui arriveront jusqu’aux exposants seront sans doute plus qualifiés, plus intéressés ».
Éric Morand, le directeur du département numérique chez Business France, ne cache pas qu’il est difficile d’être aussi attractif qu’avec une présence physique à Las Vegas. « Grâce à sa présence depuis plusieurs années, la French Tech avait un très bon emplacement dans l’Eureka Park (NDLR : l’espace consacré aux startups), proche de l’entrée et très visible. Il y avait un flux naturel de visiteurs qui se faisait vers nous. Cela permettait de « réseauter » dans les allées, de prendre un visiteur par la main pour l’amener d’un stand à un autre. C’est beaucoup plus compliqué en version numérique, d’autant qu’on espérait un format un peu plus innovant que ce qui a été développé par les organisateurs. »
Présence en ligne 24 heures sur 24
Malgré tout, selon lui, « autant je comprends qu’un grand groupe décide de se passer du CES cette année. Autant, pour une startup, cela reste un événement incontournable pendant lequel elle peut se confronter à des publics très larges, du monde entier ».
Les jeunes innovateurs sélectionnés par Business France ont été formés tout spécialement à affronter une expérience en ligne : comment « pitcher » en visioconférence, optimiser sa présence sur le site du CES. Pour Maxime Sabahec, il fallait prendre en compte le fait que les exposants « n’ont pas le ressenti direct de leurs prospects sur le produit. Ils ont dû mettre en place une stratégie équivalente à celle du commerce électronique pour amener le visiteur virtuel jusqu’au clic, jusqu’à une demande de tchat par exemple ».
Pour cela, beaucoup des participants assurent une présence en ligne 24 heures sur 24 pour être joignables sur tous les créneaux horaires. Par exemple, la startup de Moselle, Vivoka, qui développe des assistants vocaux sur mesure, a mobilisé quatre personnes pour répondre à toute heure aux demandes de discussion par tchat.
Un CES sans Google ni Amazon
Le CES réunit chaque année 180 000 participants dans le désert du Nevada. Il n’a attiré que 1800 exposants pour cette édition, contre 4500 les années précédentes. La perspective de ne pas pouvoir rencontrer clients, fournisseurs ou journalistes a dissuadé beaucoup de grands groupes, à l’image de Google, Amazon ou Sonos. Impossible aussi pour les visiteurs de manipuler, tester, conduire les prototypes développés par les fabricants du monde entier.
Au final, 80% des régions françaises qui participent habituellement ont maintenu leur présence en 2021. Et à l’international, Gary Shapiro, président de CTA, l’organisateur du salon, souligne que « des pays qui ne sont jamais venus à Las Vegas, comme la Russie, la Thaïlande ou le Nigeria, sont représentés ».
L’une des raisons : un coût bien inférieur à une participation physique. Pas de trajets en avion ou de dispendieux frais d’hôtel cette année. Et le prix d’un stand classique a été abaissé de 2500 euros à 1500 euros.
Autre atout du virtuel : la plateforme du CES 2021 est ouverte jusqu’au 14 février. Sur la durée, les exposants espèrent attirer autant de monde que sur les quatre jours du salon physique habituel.
Malgré tout, l’avenir de ce grand rassemblement ne passera sans doute pas par le 100% virtuel. Dommage pour le climat, qui pâtit chaque année des émissions de CO2 produites par les déplacements de centaines de milliers de participants venus de 160 pays.
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