Point Sur

Près de deux ans après leur installation : Les Clac peinent encore à décoller


lepointsur.com (Abidjan, le 20-3-2015) En 2013, l’initiation des Clac (Centres de lecture et d’animation culturelle) dans le Nord de la Côte d’Ivoire, grâce à l’appui financier de l’Oif (Organisation internationale de la Francophonie) avait suscité beaucoup d’espoir au sein des populations de cette zone. Malheureusement, l’espoir est en train de laisser la place au désenchantement dans cette partie de la Côte d’Ivoire qui a souffert, dix années durant, les affres de la crise politico-militaire.

Maurice Bandama, le ministre de la Culture et de la Francophonie est invité à pérenniser le projet des Clac. (Ph: Dr)

Maurice Bandama, le ministre de la Culture et de la Francophonie est invité à pérenniser le projet des Clac. (Ph: Dr)

C’est par le communiqué N°608/MCF/DRH du 8 octobre 2013 qu’un appel à candidature interne a été lancé à l’endroit des animateurs culturels par le ministère de la Culture et de la Francophonie. Cet appel jetait ainsi les bases de l’ouverture de 10 Centres de lecture et d’animation culturelle dans le septentrion de la Côte d’Ivoire. Environ un mois plus tard, le communiqué N°759/ MCF/DRH du 11novembre 2013 rendait public le résultat de l’appel à candidature interne. Suivi de la note de service collectif N°786/MCF/DRH du 18 novembre 2013 mettant les animateurs retenus, en service dans les différentes localités.

Cependant, après qu’ils aient investi le terrain, le programme des Clac connait un réel dysfonctionnement dans son exécution, du fait de la mauvaise politique de gestion de son ministère de tutelle. Selon certains animateurs que nous avons pu joindre, cette situation risque d’entraîner la mort programmée de cet ambitieux projet. La raison, les principaux animateurs des Centres de lecture et d’animation culturelle sont abusivement exploités dans les zones rurales. Pour preuve, les primes prévues dans le cahier de charges ne sont pas reversées à ces animateurs qui ne se contentent que de leur salaire d’agents du ministère de la Culture et de la Francophonie.

Et pourtant, selon l’article 6 du protocole d’accord, le ministère de la Culture et de la Francophonie a pour obligation d’inscrire les Clac dans le programme culturel du ministère, prévoir un budget annuel de suivi, affecter un animateur permanent responsable à temps plein du Clac et rémunéré par ledit ministère, garantir le soutien de l’Oif au Clac. Puis, nommer en accord avec l’Organisation internationale de la Francophonie, un coordonnateur du réseau et collaborer avec celui-ci à l’organisation des stages de formation destinés aux animateurs. Ensuite, faciliter la tâche du coordonnateur face aux diverses structures administratives du pays ; et enfin, favoriser l’exonération et l’entrepôt temporaire du matériel envoyé par l’Oif et ses partenaires au profit des Clac.

Objectifs visés par les Clac : Favoriser le désenclavement des communautés bénéficiaires en y créant des structures d’accès aux livres, médias d’information et aux loisirs par l’audiovisuel ; développer des foyers d’échanges et de formation dans le domaine de l’éducation, la santé, l’agriculture, la technologie, la littérature, les Droits de l’Homme ; favoriser l’épanouissement des expressions culturelles par la mise sur pied ou l’accueil de troupes artistiques (musique, théâtre, danse, conte)

Kady Diallo, Secrétaire générale de la Commission nationale de la Francophonie.

Kady Diallo, Secrétaire générale de la Commission nationale de la Francophonie.

Après l’implantation d’un réseau de 10 Centres de lecture et d’animation culturelle, il est prévu dans la charte de création, que l’Oif apporte une subvention annuelle d’au moins 26 millions Fcfa pour le fonctionnement dudit réseau. Toutefois, il faut noter que le coût d’implantation d’un réseau Clac est estimé à environ 450 000 Euros, soit 292, 5millions Fcfa dans tous les pays. En Côte d’Ivoire, l’implantation aurait coûté entre 40 et 65 millions Fcfa y compris la formation des animateurs. Ce qui revient à 65 millions Fcfa x 10 pour trouver le coût global des Clac dans les ex-zones Cno qui se chiffre à environ 650 millions Fcfa.

Seulement, voilà qu’informés de ce qu’il est prévu pour eux des indemnités périodiques en provenance de l’Oif, les animateurs des Clac n’ont jusque-là bénéficié du moindre versement à cet effet. Pis, les stages prévus dans le cadre de leur mission n’existent que de nom. Cela pour dire que tout ce qui avait été miroité pour motiver certains animateurs culturels à se lancer dans l’aventure des Clac n’est en réalité que de la poudre aux yeux.

Le fonctionnement particulier des Clac

Les Centres de lecture et d’action culturelle ont une particularité en ce sens qu’ils se distinguent des bibliothèques classiques. Ils prônent la gratuité d’accès aux biens culturels, y compris l’emprunt des livres. En un mot, l’abonnement au Clac est gratuit à toutes les populations, pourvu qu’elles soient résidentes. Cette gratuité découle de la volonté de l’Oif qui entend ainsi rapprocher le livre des communautés rurales qui, par manque d’infrastructures de ce type, n’ont souvent pas accès à l’information.

Dès lors, la gestion administrative des animateurs culturels en service dans les Clac remet sous les projecteurs le débat sur l’épineuse question du statut des professionnels de l’action culturelle qui luttent depuis plusieurs années pour le changement de leur statut, voire pour l’octroi des primes ou indemnités de salissures liées à l’accomplissement de leur tâche.

Dans la mesure où les animateurs des Clac sont exposés à beaucoup de dangers et de risques, du fait de leur contact permanent avec la poussière, à cause du traitement des livres. Mieux, par le biais du Synapac-Ci (Syndicat national des professionnels de l’action culturelle), ces professionnels revendiquent le statut d’enseignant. Ce qui, selon eux, apparaît comme une nécessité pour atteindre les objectifs du programme Clac.

Faut-il le rappeler, les animateurs des Clac sont à la fois bibliothécaires parce qu’ayant la gestion d’une salle de lecture. Ils sont aussi concepteurs et animateurs de projets d’activités culturelles qui se tiennent dans un foyer polyvalent. La plupart de leurs activités tournent autour du livre et ont pour cibles les élèves. Ce qui leur donne l’occasion d’exercer un métier d’animateur-pédagogue.

Idrissa Konaté

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