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La Côte-d’Ivoire-« 4 Chu et 2000 établissements de premiers soins »/ Voici toute la vérité qu’on cache aux populations


HOPITAL

Une vue de l’hôpital Saint Jean-Baptiste (Ph:Dr)

Abidjan, le 17-4-15 (lepointsur.com)-Le chef de l’Etat, Alassane Ouattara a déclaré, à Tiassalé au cours d’un meeting qu’il animait juste après la cérémonie d’inauguration de l’hôpital Saint Jean-Baptiste de Bodo, que la Côte d’Ivoire dispose de « quatre Chu et 2000 établissements sanitaires de premier soin ». « L’hôpital Saint Jean Bosco vient renforcer le potentiel dont dispose le pays à savoir quatre Chu, 17 Chr, 84 hôpitaux généraux et 2.000 établissements sanitaires de premier soin », a soutenu M. Ouattara. Le discours est beau, mais la réalité est toute autre.

Les infrastructures existent certes, mais combien d’entre elles offrent toutes les commodités requises, avec un plateau technique à la pointe de nouvelle technologie, comme l’hôpital Saint Jean-Baptiste qui vient renforcer le potentiel dont doit disposer la Côte d’Ivoire ?

C’est ici que le Chef de l’Etat ivoirien Alassane Ouattara doit renforcer le partenariat privé-public. Et pour cause. L’hôpital ultra-moderne Saint Jean-Baptiste de Bodo-Tiassalé est co-financé à hauteur de plus de 6 milliards Fcfa par le gouvernement ivoirien et la Société d’étude et de développement de la culture bannière (SCB), filiale de la Compagnie fruitière de France et l’Ordre de Malte. Le résultat fait à la fierté des populations

Dans les autres centres de soin, c’est la croix et la bannière

En effet, le décès du jeune mannequin Awa Fadiga le 25 mars 2014, dans des ‘’conditions troubles’’ au Centre hospitalier et universitaire (Chu) de Cocody, a créé une vive émotion et l’indignation des populations. Face à cette disparition tragique dès suites d’une agression qui nécessitait des soins urgents, la société civile, les organisations non gouvernementales etc, comme un seul homme, s’étaient dressés contre la politique sanitaire en Côte d’Ivoire.

Ce que les journalistes ont qualifié de « cas Awa Fadiga » venait ainsi de lever un coin du voile sur la défaillance du système de santé, dans lequel, souvent les hôpitaux ne sont pas fournis en matériels de première nécessité. Une triste situation longtemps décriée par les patients et parents des malades.

Pour faire face aux préoccupations du peuple, au conseil des ministres de mercredi 9 avril 2014, l’Etat ivoirien a pris des décisions pour réhabiliter les services des urgences dans les Chu d’Abidjan, ainsi que les formations sanitaires périphériques de la ville d’Abidjan érigés en Hôpitaux Généraux (HG) à hauteur de plus de 3 milliards FCFA.

Le couple présidentielle à l'inauguration (Ph:Dr)

Le couple présidentielle à l’inauguration (Ph:Dr)

« Le Conseil a adopté une communication relative aux mesures urgentes de restauration de la fonctionnalité des services des urgences de la ville d’Abidjan. Compte tenu des difficultés liées à la prise en charge des patients reçus en urgence, aussi bien dans les Chu de la capitale que dans les formations sanitaires périphériques de la ville d’Abidjan érigés en Hôpitaux Généraux (HG), le Conseil a décidé de restaurer la fonctionnalité des urgences de la ville d’Abidjan et de ses environs, » indique le communiqué lu par le Porte-parole du gouvernement, Bruno N. Koné.

Mieux, pour soulager les populations et faire baisser la tension devenue très vive, le communiqué du Conseil des ministres sera explicite concernant le projet du plan d’action, d’un coût de plus de 3 milliards Fcfa initié par l’Etat ivoirien. Il sera divisé en trois phases.

La première, « la phase n°1, à exécution immédiate, comprend, entre autres, la réparation du scanner du CHU de Cocody, l’acquisition en urgence d’équipements médicaux divers et l’ouverture de 4 blocs opératoires sur 8 au CHU de Cocody, ainsi que l’ouverture de 5 blocs opératoires sur 8 au CHU de Treichville, » la seconde, « la phase n°2, d’avril à fin mai 2014, comprend notamment la réhabilitation des services des urgences de Cocody, la réhabilitation du scanner du CHU de Yopougon et l’acquisition d’équipements médicaux et d’appareillages divers, » la troisième et dernière, « la phase n°3, de juin à fin août 2014, comprendra principalement l’extension du complexe du service des urgences du CHU de Cocody, l’accroissement de la capacité de prise en charge des césariennes dans la ville d’Abidjan par la construction de deux blocs opératoires dans des formations sanitaires urbaines à grande fréquentation. »

Par ailleurs, le Conseil a adopté une communication relative aux mesures administratives conservatoires au Chu de Cocody, où Awa Fadiga est décédée. Avant les conclusions de l’enquête judiciaire et suite à l’enquête administrative effectuée par l’Inspection Générale de la Santé et de la Lutte contre le Sida, « le Conseil a arrêté des mesures administratives conservatoires« .

Ainsi, les responsables du Chu de Cocody, notamment Pr Kouassi Jean Claude, Directeur Général du Chu de Cocody, Pr Tetchi Yavo, Chef du service des urgences du Chu de Cocody et Mme Abo Marie-Yolande, surveillante d’unité de soins des urgences du Chu de Cocody ont été relevés de leurs fonctions.

Plus d’un an après, nous nous sommes rendus à l’hôpital général d’Adjamé, et avons visité les formations sanitaires urbaines à grande fréquentation comme celle de Yopugon-Wassakara et de Cocody-Blauckoss, toutes deux retenues dans le projet pour « la construction de deux blocs opératoires« . Rien n’a été construit.

Situation toujours alarmante et préoccupante

A l’hôpital général d’Adjamé sur 700 millions FCFA sollicités par le Directeur général, Yéo Daniel, comme budget, au titre de l’année 2015, pour les 24 services que regroupe cette infrastructure sanitaire, seulement 66 millions FCFA ont été octroyés par le ministère de la Santé et de la Lutte conte le Sida.

Conséquence directe, « l’hôpital travaille à 30% de ses possibilités, » nous a révélé notre source proche de la comptabilité de l’hôpital général d’Adjamé sous le sceau de l’anonymat. « Ce centre sanitaire que le Président de la République souhaite qu’il soit un hôpital numérique est loin de l’être, même si cela fait partie de ses priorités, » coupe court notre interlocuteur.

Il n’a pas tort dans la mesure où, au cours de l’enquête le constat que l’hôpital ne dispose d’aucune ambulance, encore moins de salle d’accouchements, de bloc chirurgical et de salle d’hospitalisation. Pis, il n’y a pas de bouche d’incendie, d’incinérateur et de station d’épuration.

Au niveau de l’électricité, l’on note une instabilité criante du courant, des problèmes liés à des fuites et de mauvaise couverture en électricité. Le groupe électrogène qui doit prendre la relève en cas de coupure « a du mal à démarrer automatiquement, » soutient l’un des médecins qui n’a pas voulu décliner son identité.

Les menaces voilées du ministre

POPULATION

Les populations victimes de mensonge de certaines autorités concernant leur soin (Ph:Dr)

Le confrère « La Matinale’’ dans sa parution N°809 du 2 avril 2015 qui a fait pratiquement le même constat dans sa parution du 2 avril 2015, à la page 11 de sa publication, a eu en retour un droit de réponse le 3 avril 2015 du service de communication de Mme le ministre de la Santé et de la Lutte contre le Sida.

« Inauguré le 14 juillet 2014, l’hôpital général d’Adjamé fonctionne normalement jusqu’à ce jour. Il convient de préciser que cet hôpital n’est pas nouveau (…). Il a été construit depuis une dizaine d’année et est resté sans équipements jusqu’à ce que les nouvelles autorités décident de le rendre fonctionnel.  D’ailleurs, celles-ci (Les autorités) avaient le choix entre le raser et le reconstruire, ou alors l’équiper comme tel.

Vu l’urgence, elles ont décidé de l’équiper et de le rendre fonctionnel afin de soulager les populations d’Adjamé. Dès lors, des problèmes d’instabilité de courant, de climatisation, de bouche d’incendie etc… ne peuvent qu’être récurrents.

Conscient de cette situation, le ministre de la Santé et de la Lutte contre le Sida, a pris le taureau par les cornes. Un système alternatif d’épuration d’eau est en cours. De même que d’autres reformes visant à rendre fonctionnel tous ses services.

Il faut noter que cet hôpital demeure avant tout et surtout un hôpital général. Et que son budget ne peut qu’être conforme qu’à celui-ci. C’est d’ailleurs le coefficient qu’on applique à tous les hôpitaux généraux pour fonctionner. Et Adjamé ne peut pas faire exception (…). » Telle est en substance la réponse de la tutelle, Dr. Raymonde Goudou Coffie.

En réponse, le directeur général de cet hôpital, Daniel Yéo n’entend pas baisser les bras. « Nous allons procéder à l’ouverture très prochaine du bloc chirurgical, des urgences, de la salle d’accouchements et celle des hospitalisations, » a-t-il soutenu.

Poue joindre l’acte à la parole, il entend signer des contrats avec l’institut de cardiologie du Chu de Treichville ou de transfusion sanguine qui est dans  cette même commune, les seules structures sanitaires à être équipées d’incinérateur.

Le Président de la République peut féliciter  son Premier-ministre Daniel Kablan Ducan et le ministre de la Santé et de la Lutte contre le Sida pour la beauté des infrastructures, mais pas pour le matériel. Que dire des 2.000 établissements sanitaires de premier soin dont les centres et formations communautaires ?

Les redevances qui s’élèvent à des centaines de milliards FCFA ne sont pas payées. En revanche, les agents et personnels soignants accusent plus de trois mois d’arriérés de salaire, de façon récurrente de la gratuité totale à celle ciblée.  Une visite inopinée du Président, Alassane Ouattara lui-même dans l’un des centres sanitaires lui permettra de toucher du doigt la réalité du terrain. Surtout qu’il tient à la santé de ses populations.

Sériba Koné

 

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