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Interview/Adon Adolphe Roland (Président de l’Ong Vape-Africa) : ‘’Un audit interne s’impose à la Poste de Côte d’Ivoire’’


CIV-lepointsur.com (Abidjan, le 25-8-2016) Dans une interview exclusive qu’il nous a accordée, Adon Adolphe Roland revient longuement sur l’affaire qui l’oppose à la Poste de Côte d’Ivoire. Le président de l’Ong Vape-Africa s’explique difficilement le non-paiement de ses commissions depuis maintenant trois années. Il dénonce la mise sous l’éteignoir d’innovants projets par la direction générale de l’institution.

 ‘’Nous demandons le paiement intégral de nos commissions’’

Monsieur Adon Adolphe Roland, vous êtes le président de l’Ong Vape-Africa ou Volontaires pour aider les parents d’élèves en Afrique qui a signé un contrat de partenariat avec la Poste de Côte d’Ivoire à l’issue duquel, vous vous sentez floué. Qu’en est-il exactement ?

Merci de me donner l’occasion de me prononcer sur cette sombre affaire qui n’honore pas la Poste de Côte d’Ivoire. Effectivement, nous avons signé une convention de partenariat avec l’institution postale relative à la relance des activités postales. Cette convention remonte au 21 novembre 2011. Malheureusement, suite à un petit incident dont je n’étais même pas l’auteur, mes commissions sur les différents produits proposés pour la relance sont bloquées depuis 2013 jusqu’à ce jour. De quoi s’agit-il ? En effet, dans le cadre d’un recrutement des secrétaires pour le compte du ministère de l’Education nationale via la direction du Coges qui, par ce procédé, voulait installer des secrétaires dans les établissements scolaires publics primaires du pays. Un projet innovant que nous avons eu à l’époque, lorsque Dosso Moussa, alors ministre de l’Enseignement technique et professionnel, avait lancé l’opération ‘’Cartographie Emplois-jeunes’’. A cette période, nous avons soumis deux projets dont le recrutement des secrétaires et celui des aides-soignantes qui ont tous été validés.

Ces projets s’inscrivaient-ils dans les clauses du contrat avec la Poste de Côte d’Ivoire ?

Non, il s’agissait plutôt d’un projet propre à Vape-Africa dans le cadre de la lutte contre le chômage des jeunes ivoiriens.

Et pourtant, lors d’un échange vous concernant avec M. Allé Guillaume, chef du département juridique et administratif de la Poste, il vous a accusé de recruter des jeunes filles contre la somme de 17 000 Fcfa en utilisant abusivement le nom de l’institution, alors que celle-ci n’était pas concernée par l’opération. Il vous accuse d’escroquerie. Que répondez-vous à toutes ces accusations?

Il ne s’agit pas d’escroquerie, mais plutôt d’un amalgame. Le jeune homme auteur de l’annonce est Youssouf Wellington, président d’une association de jeunesse à Yopougon. Je ne le connaissais pas et lui non plus. C’est mon superviseur Kobenan Niagoran Mathieu qui était chargé du recrutement de ces jeunes filles. Moi, je me trouvais à Bouaké où je réside. Lors d’une rencontre avec les leaders de jeunesse à Yopougon pour vulgariser le projet, le sieur Youssouf Wellington a fait une annonce selon laquelle, Vape-Africa et sa structure recrutaient des secrétaires pour le compte de la Poste de Côte d’Ivoire, sans connaître véritablement les clauses de la convention de partenariat entre cette institution et nous. Voyez qu’on ne peut pas se saisir de ce document pour dire qu’on veut salir l’image de la Poste. D’ailleurs, quelle était l’image de la Poste-Ci à cette période-là ? Elle était plutôt agonisante, selon les propres termes du ministre Koné Bruno. Avec à la clef, 8 mois d’arriérés de salaires.

Qu’est-ce qui a poussé alors la Poste de Côte d’Ivoire à vous impliquer dans cette affaire dont vous ne maîtrisez ni les tenants, encore moins les aboutissants ?

Adon Adolphe Roland, le président de l'Ong Vape-Africa réclame 2 milliards de commissions à la Poste de Côte d'Ivoire. (Ph: Le Point Sur)

Adon Adolphe Roland, le président de l’Ong Vape-Africa réclame 2 milliards de commissions à la Poste de Côte d’Ivoire. (Ph: Le Point Sur)

C’est le deuxième produit qui est d’ailleurs le produit phare que voulait s’approprier M. Isaac Gnamba Yao, ancien Directeur général adjoint devenu récemment Directeur général, qui était au centre des intérêts. Il voulait récupérer le projet qui consistait non seulement à évacuer les boîtes postales restantes ou Bpr qui devait être accompagnée d’une carte postale privilège qui a été validée par la direction de l’institution. Tenez-vous bien ! Ces cartes ont été expérimentées avec les étudiants des cours Loko. La deuxième devait être avec les étudiants de l’Université Charles de Montesquieu qui coïncidait avec le lancement officiel du produit. Le professeur Amoa Urbain, le recteur de cette université est bien là et prêt à témoigner. A deux reprises, ledit lancement a été boycotté par le Dga Isaac Gnamba Yao, alors qu’environ 500 étudiants avaient payé ladite carte.

Pourriez-vous nous expliquer ce projet ?

Je vous donne un exemple simple pour mieux le cerner. Je prends le cas de M. Idrissa Konaté qui est dans le besoin de recevoir tous ses courriers sur la boîte Abidjan 08 qui est à la cité rouge. Sa boîte postale qui est désormais numérique est libellée de la façon suivante : Idrissa Konaté 08 BPR : suivi de son numéro de téléphone Abidjan 08. Ce qui peut lui permettre de recevoir en temps réel, tous ses courriers. Le tout est assorti d’une carte avec la photo du bénéficiaire et le logo de la Poste de Côte d’Ivoire. Avec cette carte qui coûte 3.000 Fcfa l’année contre 20 000 Fcfa et qui fait office de boîte postale, la possibilité est donnée au détenteur de retirer son courrier sans difficulté. Cela devait être à l’avantage des élèves pour recevoir leur bulletin de fin d’année, mais aussi des étudiants et des populations encore sous couvert en termes de boîte postale. Evidemment, ce produit aurait permis à la Poste de Côte d’Ivoire de mobiliser la somme de 3 milliards Fcfa dont elle a besoin pour l’équilibre de ses activités et se passer ainsi des subventions de l’Etat qui pourraient servir ailleurs. A l’issue de l’étude de prospection, tous étaient unanimes quant à la rentabilité de ce projet innovant d’autant qu’en allant sur la base d’une population intéressée évaluée à 5 millions, cela reviendrait à 15 milliards Fcfa mobilisés chaque année, alors que la Poste-Ci ne recherche que 3 milliards Fcfa. Vous voyez donc la marge bénéficiaire de l’institution  chaque année ! Cela lui aurait permis de maintenir ses 842 employés dont le départ volontaire à la retraite était proposé à plus de la moitié dans le cadre du plan de redressement recommandé par l’Etat de Côte d’Ivoire.

Après avoir boycotté à deux reprises, la cérémonie de lancement officiel de ce produit innovant, êtes-vous à mesure de nous dire si la Poste a pu finalement pensé  à ce produit pour la sortir de l’ornière ?

Elle n’a mis à exécution qu’une seule partie. C’est-à-dire, les alertes SMS qui ne sont que la deuxième phase du projet. Malheureusement, l’étape qui devait permettre à la Poste-Ci d’engranger beaucoup d’argent a été occultée.

Expliquez-nous, pourquoi la convention de partenariat n’est pas allée jusqu’à son terme ?

Pour nous, jusqu’à preuve du contraire, la convention va jusqu’au bout, d’autant qu’il n’y a jamais eu de rupture de contrat. C’est parce que certaines personnes au niveau de la direction générale de la Poste se partagent mes commissions que M. Allé Guillaume veut faire croire le contraire. C’est un non-lieu, selon Me Diarrassouba, mon conseil. D’autant qu’ils n’ont pas pu présenter ce document au tribunal.

Confirmez-vous donc qu’il s’agit d’une rupture unilatérale de contrat ?

Evidemment, ils se  sont levés et ont manigancé cela à l’insu de l’ex-Dg Mamadou Konaté. Lorsque celui-ci s’est rendu à l’évidence à ma sortie de prison, il a fini par comprendre qu’on lui avait fait signer n’importe quoi. Pour lui, en effet, cette affaire est tellement allée vite qu’il m’a demandé pardon et a reconnu que malgré sa qualité de pur produit de la Poste, il n’avait pas pu faire des propositions pour la relance, lorsque Vape-Africa lui a fait des propositions judicieuses. Evidemment, il s’agit d’une manigance du Dga d’alors qui veut déchirer le contrat qui me lie à la poste pour avoir une large marge de manœuvre. Je tiens à vous informer que la plainte contre ma personne a été portée par M. Allé, responsable du département juridique de l’institution, pour m’anéantir définitivement. Il prétend aujourd’hui que j’ai été trempé dans une affaire d’escroquerie. Il aurait dû attendre que la procédure judiciaire aille jusqu’à son terme, car le jugement appartient au juge. Et pourtant, l’article 5 de la convention de partenariat prévoit un temps d’observation d’un mois pour une solution négociée. Mais pour cette prétendue affaire d’escroquerie, à peine 10 jours ont suffi pour qu’on me jette en prison suite à la plainte contre X de la Poste-Ci.

Depuis cette affaire, comment ont évolué vos rapports avec le Dg Konaté Mamadou ?

Ci-contre un extrait des cartes postales privilèges...

Ci-contre un extrait des cartes postales privilèges…

Jusqu’à preuve du contraire, et vous  pourrez vérifier cela avec lui, M. Konaté Mamadou m’a toujours considéré comme son frère et me le témoignait bien. Ayant tout fait pour relever le niveau de la Poste de Côte d’Ivoire par mes propositions, nos rapports sont demeurés en l’état jusqu’à son départ de l’institution. Son souhait était de me payer mes commissions à temps réel et continuer la collaboration avec Vape-Africa. Mieux, le Dg d’alors m’avouant qu’il avait été induit en erreur dans la signature de la résiliation du contrat entre la Poste de Côte d’Ivoire et Vape-Africa a souhaité que l’affaire se règle à l’amiable, en vue de continuer la collaboration. Toutefois, dans leur volonté de me nuire, ceux qui sont à la base de la signature de la fameuse résiliation de contrat ont ourdi un complot contre Kouman Yao, le receveur principal, l’accusant d’avoir détourné des enveloppes d’une valeur de 3 millions Fcfa avec ma complicité. Fort heureusement, l’hameçon n’a pas pris car dès ma sortie de prison, j’ai remis les enveloppes qui étaient gardées en lieu sûr. Alors que l’autorisation de remise de ces enveloppes était émise par le responsable

...éditée à l'endroit des étudiants ivoiriens dont l'exécution a été malheureusement boycottée.

…éditée à l’endroit des étudiants ivoiriens dont l’exécution a été malheureusement boycottée.

marketing et commercial M. Kacou Adjéni, il a été curieusement blanchi de tout soupçon. Le receveur principal, M. Kouman Yao, après cette affaire a anticipé sa retraite. Il est encore là, vous pourrez vérifier tout ce  que je vous confie avec lui. Entre temps, alors que j’étais en prison, M. Isaac Gnamba Yao a fait croire à tous au niveau de la direction générale de la Poste que j’ai été arrêté à Dabou où je me la coulais douce avec l’argent détourné desdites enveloppes. Ce qui n’est pas exact, d’autant que j’ai été blanchi par la justice par le reclassement du délit pour lequel j’ai été arrêté.

Qu’en est-il des enveloppes ?

Les enveloppes ont été restituées à la Poste par voie d’huissier en présence de mon conseil Me Diarrassouba. Lorsque M. Kouman dont le salaire avait commencé a été prélevé pour le remboursement du détournement a remis les enveloppes, c’était le comble. Et lorsque mon conseil a réclamé la fameuse lettre de résiliation de contrat, le Dg Konaté a refusé et l’a prié de considérer que c’est un non-lieu. 

A ce jour, quel est le montant que vous doit la Poste de Côte d’Ivoire ?

Selon nos estimations, c’est plus de 2 milliards Fcfa que la Poste de Côte d’Ivoire nous doit par rapport à la convention que nous avons signée. Cependant, je tiens à préciser que les chiffres des bénéfices annuels ne nous ont jamais été communiqués, suite à la vente des différents produits proposés.

Au regard de tout ce que vous dites, est-ce à dire que  la Poste de Côte d’Ivoire veut vous écarter après avoir expérimenté vos produits ?

Exactement, c’est ce qui a cours actuellement. Malheureusement, il s’agit d’un trio qui se résume à M. Isaac Gnamba Yao, ex-Dga devenu Dg plein, M. Allé Guillaume, chef du département administratif et juridique et Kacou Adjéni, le responsable du département marketing et commercial. Tenez-vous bien, lorsqu’il s’est agi de payer intégralement mes commissions, le Dg Konaté Mamadou a donné des instructions fermes qui, contre toute attente ont été foulées au pied par M. Allé lorsqu’il m’a reçu à son bureau, me disant qu’il défendait les intérêts. Défense d’autant curieuse que la Poste-Ci et ma structure sont en partenariat. Dès lors, les intérêts de cette institution devaient être aussi les miens.

Comment avez-vous réussi à relever les chiffres d’affaires ?

Au départ, il faut dire que ce n’était pas facile. La Poste n’avait  pas de moyens, même pour communiquer sur les produits proposés. C’est alors qu’à l’aide de chasuble, des jeunes que j’ai recrutés et moi-même, avons investi les artères du Plateau pour vendre les enveloppes Spécial-concours et Spécial-rentrée scolaire. Au départ, les gens nous pourchassaient parce que ne comprenant pas pourquoi la Poste qui a émis ces produits ne les présentaient pas officiellement, mais qui plutôt, se retrouvaient entre les mains de particuliers. L’opération est devenue plus efficace avec le dépôt des enveloppes dans les différentes structures organisatrices desdits concours.

Avez-vous perçu des commissions dans le cadre du partenariat avec l’institution postale ?

Oui, en effet, mais comme je vous le signifiais tantôt, c’était au moment où l’opération était encore timide en 2011 et 2012. Mais depuis qu’elle a atteint sa vitesse de croisière, plus rien.

Quel était le contenu de ces commissions ?

Je vous avoue que cela se fait au cas par cas. Soit pour le concours de l’Infas, la Poste fait seule les points et nous reverse ce qu’elle a envie de donner à Vape-Africa, d’autant que cette organisation n’était pas associée au compte. Nous ne suivions pas en effet, la traçabilité des recettes. La poste nous dit simplement que nous avons tel volume d’enveloppes. Sur cette base, elle calcule nos commissions en fonction des quantités écoulées qu’elle nous reverse. C’étaient juste des petits montants. Mais depuis que nous avons adressé un courrier à la Deco (Ndlr : Direction des examens et concours) qui a accepté les enveloppes pour le concours du Cafop qui réunit à lui seul, plus de candidats, nous n’avons plus rien reçu. Vous comprenez alors quand M. Allé dit que la Poste ne doit rien à Vape-Africa, c’est archi-faux. Il se fonde sur la fameuse lettre de résiliation pour dire que l’institution ne nous doit rien.

Compte tenu du blocage avéré entre vous et les dirigeants actuels de la Poste de Côte d’Ivoire, qu’attendez-vous réellement ?

Ceux qui ont contribué à créer le blocage sont ceux qui dirigent aujourd’hui malheureusement. Je souhaiterais que le Président de la République jette un œil plus précis sur la gestion de la Poste de Côte d’Ivoire. Mieux, il serait intéressant que l’inspection générale d’Etat commandite un audit de l’institution. Cela permettrait de mieux comprendre la gestion de cette institution devenue budgétivore à l’Etat. Nous demandons le paiement intégral de nos commissions. Si ce n’est pas le cas, nous prendrons nos responsabilités pour réclamer de vive voix ce que la Poste de Côte d’Ivoire nous doit depuis maintenant 3 années.

Réalisée par Idrissa Konaté

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