[Interview] M. Ebrin Yao Rémi, président de la PEC-CI : « La CEI est à la fois joueur et arbitre »
Abidjan, le 1er mars 2025 (lepointsur.com) Le mardi 25 février dernier, Maître Yolande Ketty épouse Yapobi, représentante de la CEI, a quitté le plateau de l’émission Le Débat sur la RTI, au grand dam des participants. Cet incident inhabituel a irrité bon nombre de leaders d’opinion, dont M. Ebrin Yao Rémi, président du Conseil d’administration de la Plateforme des organisations de la société civile ivoirienne (PEC-CI). Il nous a reçus le jeudi 27 février 2025 dans son bureau à Adjamé 220 Logements pour réagir à cet événement. Interview
Bonjour, M. Ebrin. Vous êtes le président de la Plateforme des organisations de la société civile ivoirienne (PEC-CI). Vous avez appelé à la démission de M. Ibrahime Coulibaly-Kuibert, président de la CEI, après qu’une de ses représentantes, Me Yolande Ketty épouse Yapobi, a quitté le plateau de l’émission Le Débat du mardi 25 février 2025.
Pouvez-vous nous expliquer les raisons de cette demande ?
Tout d’abord, je vous remercie pour cette occasion de m’exprimer à nouveau sur la CEI. Avant de justifier notre demande, j’aimerais revenir sur cette scène déplorable qui a été imposée à des millions d’Ivoiriens.
Il est inacceptable qu’une représentante d’une haute institution comme la CEI quitte un débat en direct sur un plateau de télévision, méprisant ainsi les autres intervenants. Cet incident est d’autant plus regrettable qu’il s’est produit sur notre chaîne nationale. C’est un manque total de respect envers les Ivoiriens.
Pensez-vous que cet incident affecte la perception de la CEI ?
Bien évidemment.
Ce comportement démontre l’incapacité de la CEI à mener efficacement le processus électoral. Il reflète un échec total de cette institution. C’est pourquoi nous demandons la démission immédiate de son président et de toute son équipe.
Quelle est la position de la société civile sur la nécessité d’une révision de la liste électorale ?
Les 37 organisations de la société civile que je représente sont unanimes : la révision de la liste électorale doit être reprise. C’est un préalable incontournable pour garantir des élections transparentes, crédibles et inclusives.
De plus, cette révision est une obligation légale. L’article 6, alinéa 3 du code électoral stipule qu’elle est obligatoire. Or, de nombreux Ivoiriens n’ont pas pu établir les documents nécessaires à leur enrôlement dans les délais impartis.
Nous sommes à huit mois des élections présidentielles. La CEI a encore largement le temps et les moyens de relancer cette opération.
Parlez-vous au nom des 37 organisations de la société civile dont vous êtes le président ?
Tout à fait. En tant que président du Conseil d’administration de ces 37 organisations, j’exprime une position commune. Ensemble, nous exigeons la reprise de la révision de la liste électorale.
Que comptez-vous faire si votre demande de démission n’est pas entendue ?
Nous interpellerons les autorités à tous les niveaux. S’il le faut, nous saisirons les instances diplomatiques et même l’ONU pour signaler qu’il y a un problème en Côte d’Ivoire.
Rappelez-vous qu’en 2020, lors de la crise pré et post-électorale, une mission conjointe de l’ONU, de l’OUA, de la CEDEAO et de l’Union européenne était venue en Côte d’Ivoire. À cette occasion, nous faisions partie des huit grandes organisations reçues et nous étions les seuls à remettre un mémo affirmant que les conditions n’étaient pas réunies pour une élection.
La PEC-CI s’est engagée sans relâche ces dernières années pour contribuer à des élections crédibles et apaisées. Lors des élections locales couplées régionales et communales du 2 septembre 2023, nous avons déployé plus de 715 observateurs indépendants accrédités par la CEI.
Aujourd’hui, la crédibilité et la légitimité de cette Commission électorale sont mises en doute. La majorité des Ivoiriens n’a pas confiance en elle. Cet incident sur le plateau de la RTI, en direct devant toute la nation, a aggravé cette défiance.
Nous ne comptons pas nous arrêter là. Nous utiliserons tous les moyens légaux pour faire bouger les choses, y compris l’organisation d’une marche blanche pour nous faire entendre.
Quel message aimeriez-vous adresser aux Ivoiriens face à cette situation ?
L’année 2025 est une année décisive. Il est crucial que les Ivoiriens s’unissent pour empêcher que la CEI, qui est à la fois joueur et arbitre, continue de dicter les règles du jeu.
Quand on touche à l’œuvre de Dieu, il se glorifie. J’invite les Ivoiriens à faire confiance à Dieu, qui mènera ce combat pour rétablir la démocratie et la paix en Côte d’Ivoire.
Le combat de la société civile ivoirienne est de lutter de toutes nos forces pour que, pour la première fois dans l’histoire du pays, nous ayons des élections transparentes, équitables, crédibles et inclusives. Nous voulons que les résultats des urnes, le soir du 31 octobre 2025, soient acceptés par tous.
Interview réalisée par IB, en collaboration avec la rédaction