Culture

Interview / Emmanuel Goué (Responsable de la structure Lad Vision)


« On investit  des millions sur nos footballeurs qui ne rapportent rien au pays. »

Longtemps dans l’événementiel, Emmanuel Goué a décidé de se lancer désormais, dans le cinéma. Et il faut le dire, son nouveau domaine de prédilection semble lui réussir. En témoigne la qualité de son tout premier ballon d’essai « La Carte mémoire » qui, à peine née, suscite déjà l’intérêt  de nombreux opérateurs.

2014-06-27 16.03.05 (1)Que vise votre structure ?

Une structure qui a pour ambition de donner une nouvelle image au cinéma ivoirien. Nous avons  débuté par  des vidéos, des reportages,  et avec  l’émission « Matin Bonheur » (sur RTI1, ndlr).  Nous nous lançons maintenant dans la production audio-visuelle.   Nous sommes à notre première production cinématographique qui est « La Carte mémoire.»

Depuis combien d’année existez-vous ?

Cela fait environ six ans que la structure a été mise sur pied. Comme je le disais plus haut, c’est une structure qui était  dans l’événementiel. Dans la production audio-visuelle, cinéma et émissions télé. C’est depuis 2011 que nous sommes venus à la télé.

Pourquoi ce brusque bond ?

Il faut dire que nous étions assistant réalisateur sur des cinémas ivoiriens à des séries télévisées mais nous n’avons pas trouvé  ce cinéma à la  hauteur de l ‘international. Nous avons trouvé ce cinéma trop platonique. Alors, nous nous sommes  dit qu’il faut donner un sang neuf à ce cinéma. Nous voulons monter une nouvelle facette du cinéma ivoirien

Présentez-nous votre production

La Carte mémoire est l’histoire d’une jeune fille. La vie est avant tout une sorte de Carte mémoire. Tous les événements qui se produisent  sont enregistrés  quelque part. Et peuvent-nous rattraper. Nous avons essayé de donner « vie » à cette vie. La Carte mémoire est l’histoire d’une jeune fille. Vanessa qui est une jeune  qui intervient dans une émission qui traite  des cas de conscience. Son copain se fait assassiner par un gangster. La scène  est filmée  par une jeune fille reporter. Celle-ci va  remettre  la vidéo à la fiancée de la victime sans savoir leurs liens ; après l’avoir visionné, Vanessa se rend compte que la victime est son copain. Elle va donc remettre cette vidéo à la police. Mais le lieutenant qui a été mandaté pour traiter cette affaire se trouve être le père de l’assassin. Le Lieutenant est du coup confronter à un dilemme. Soit, il applique la loi en mettant son fils en prison  ou son amour paternel prime et  il protège son fils. Nous avons voulu montrer comment l’on peut être confronté à ce genre de situation dans l’exercice de  notre profession.

Pourquoi cette léthargie du cinéma ivoirien malgré toutes ces productions ?

La base du cinéma est le scenario.  Mais,  en Côte d’Ivoire, nous avons toujours les mêmes scénarii. Le monsieur qui trompe sa femme et vis versa. Ou le Monsieur qui a deux femmes. Si nous restons dans  ces mêmes scénarii, le cinéma  ivoirien tombera  dans une léthargie. Nous devons proposer des scénarii accrocheurs.

En quelle  année avez-vous réalisé cette production ?

 La « Carte mémoire », c’est depuis 2011 pendant la crise .Nous étions bloqués dans les maisons sans aucune activité, alors il fallait2014-06-27 16.03.29 s‘occuper. C’est  comme cela que tout est parti. Nous avons fait un casting de bouche à oreille. Parce que quand tu écris un scénario, tu as déjà en tête le  profil de ton acteur en tête. La formation a duré environ 10 mois et le tournage plus d’un an. Parce que nous   n’avions pas  de financement. Nous avons travaillé sur  fonds propres. Mais Dieu merci,  notre chance est que  tout s’est passé en Côte d’Ivoire. Nous n’avions une quelconque  pression ; donc nous avons travaillé à notre rythme, jusqu’à  tout finaliser. Nous avons fonctionné  sur fonds propres. C’est un scénario différent  de ce qu’on a l’habitude de voir. Le projet a duré pratiquement deux (2) ans. J’étais réalisateur et monteur sur ce film. Une chose est de réaliser, mais une autre est de la ressentir.

Comment se comporte la « Carte Mémoire »?

Elle décolle difficilement. Nous avons recruté les acteurs par-ci par-là. Et il nous faut maintenant les payer, mais nous n’avons pas les moyens. Nous sommes en train de chercher les voies et moyens pour le faire. Nous ne voulons pas brader le film. Nous  avons  souffert sur cette production et nous voulons être recomposés à sa juste valeur. Nous avons cependant  fait une grande première à Sococé le 25 novembre 2013, et beaucoup ont apprécié le film. L’actuel directeur général de l’Office nationale du cinéma (l’Onaci) M.Kramo Fadiga  nous a reçus et nous a félicités. J’ai particulièrement reçu beaucoup de mails et textos sur ma page facebook.

Qui est Vanessa ? Comment s’est opéré son choix ?

Vanessa est l’actrice principale, à l’état civil, Marie jeanne Appiah. Elle  correspondait mieux à nos critères de sélection. Nous avons formaté celle qui est là présentement.

Concernant l’actrice Claire Gueï, elle a joué un rôle  très important parce qu’elle est  l’élément clé de tous les dangers de « La Carte Mémoire ».

Le film comprend  combien d’épisodes ?

La carte mémoire est une série de 52 épisodes. Mais, nous nous sommes arrêtés  à 26 épisodes par faute de moyens.

Où avez-vous effectué le tournage ?

La série a été  en grande partie tournée  dans la commune de Yopougon. Sauf seulement trois scènes qui ont été  tournées à la Riviera. Tous les acteurs sont Ivoiriens à l’exception d’une fille  qui est de  nationalité burkinabé. Marie-Jeanne Appiah, l’actrice principale est Agni.

A combien peut-on évaluer le coût de cette production ?

2014-06-27 15.13.05Nous  n’avons pas reçu de financement. Nous avons travaillé sur fonds propres. La production nous a couté des dizaines de millions de F CFA.

Quels sont vos rapports avec le réalisateur Ivoirien Guy Kalou ?

Nous n’avons pas de  rapports particuliers avec Guy  Kalou. Nous l’avons cependant  invité, lui et des gens du milieu à notre  grande première, mais, personne n’a répondu  à  notre invitation.  Ça  a été un choc pour nous.

Comment préparez-vous l’après  « Carte mémoire » ?

D’autres œuvres  sont en cours d’être achevées. Nous avons quatre projets de long métrage. Mais à l’état embryonnaire. Nous nous inscrivons dans les films d’actions et de fictions.

 Combien de prix avez-vous glané avec « La Carte mémoire ? »

Au  Grand prix  africain du cinéma, de la télévision et des Tics (Gpact)  la Carte mémoire a eu le prix de la meilleure fiction africaine face à un grand film gabonais appelé « Mpassi. » La cérémonie a eu lieu  au Ministère des affaires étrangères au plateau. 

Une anecdote ?

Un des acteurs principaux DMT ne voulait pas se faire gifler par son père car il avait peur de recevoir un coup. Un acteur Romeo, a pris un coup violent au visage et a eu l’œil enflé.

Les acteurs sont-ils des pratiquants d’arts martiaux ?

Oui, la majorité mais l’actrice principale Marie Jeanne Appiah qui n’est pas une  pratiquante a été entrainée pour incarner le personnage.

Le cinéma à plein temps ?

Oui, le cinéma à plein temps, Parce que je ne  fais rien d’autre que le cinéma.

Y a-t-il des professionnels dans la sélection ?

Je préfère travailler avec les acteurs inconnus, car, ils ne  posent pas de questions et font ce qu’on leur demande.

A quel acteur africain voulez-vous ressembler ?

Je veux ressembler aux américains

Quels sont vos projets à court et long terme ?

Dans l’immédiat  nous voulons  finaliser les 26 autres épisodes. Et cela, très rapidement, car la saison 2 va se dérouler sur quatre jours. Les 26 premiers ont été résumés en un long métrage qui a été projeté et apprécié. Sans trop vouloir dévoiler nos cartes, on peut dire qu’on est dans le bois sacré pour que le film soit vu sur les antennes. Avec les 26 autres, il fera un long métrage.

Un appel à lancer ?

Jai été choqué de ne pas voir le ministre de la Culture au Gpact

Je demande à l’Etat de jeter un regard favorable sur le cinéma ivoirien. Qu’il nous aide, car un an de tournage, c’est trop. Mais c’est dû au manque de moyens. On investit des millions sur nos footballeurs qui ne rapportent rien et c’est le cinéma qui est abandonné. Que le ministère de la Culture puisse nous aider.

Il faut payer actuellement  100.000 FCFA pour avoir une autorisation de tournage. Ce qui n’est pas normal. Encore que nous avons des difficultés à produire un film. Il faut qu’on soit encouragé par des subventions qui nous permettrons d’aller représenter le pays aux grands festivals comme ceux de Cannes et de Césars.

Réalisée par Opportune Bath & Léon Armand

Ph : Lepointsur.com

Commentaires

commentaires


Les commentaires sont fermés