Grand-Ouest/ Le député Blon Blaise accusé de semer la zizanie #chefferietraditionnelle
-Le député en mission politique?
–Siki Blon Blaise: ‘’Trouvez-moi à Man’’
Abidjan, 07-07-16 (lepointsur.com)Depuis quelque temps, un vent de division et de mécontentement souffle sur la chefferie traditionnelle dans le Grand-Ouest. En cause, l’immixtion intempestive du député de Man Sous/préfecture, Siki Blon Blaise, qui a décidé de « démettre » certains chefs de villages.
Dire que la chefferie traditionnelle du Grand-Ouest traverse une zone de turbulence serait un doux euphémisme. Et pour cause. Depuis quelque temps, le député Siki Blon Blaise est à la manœuvre : il tente, plutôt mal, de placer ses hommes dans ce cénacle où la règle du consensus est d’or. Au grand désappointement des garants de la tradition qui ne comprennent pas l’intrusion de l’homme politique dans un secteur où la politique est bannie puisque, par définition, les autorités coutumières sont « apolitiques ». Résultat des courses, de nombreux chefs de village ont été démis de leur fonction en violation de la règle en la matière. Pour arriver à ses fins, l’honorable Siki Blon Blaise a invalidé les arrêtés de nomination des chefs de village au motif que les villages incriminés faisant partie du domaine périurbain, il revenait au maire et non au préfet de délivrer des arrêtés de nomination aux intéressés. En conséquence, il a imposé que ceux-ci soient désormais désignés par voie d’élection. Contrairement à la tradition qui commande que le chef soit désigné par consensus. Et les choses n’ont pas traîné puisque, aussitôt, ont été organisées des élections dans maintes localités où des chefs ont été « éjectés » quand d’autres ont été confirmés et d’autres encore mis en « ballotage ». Toute chose que condamne et dénonce la grande majorité des chefs de village. Depuis, la chefferie traditionnelle n’affiche plus la grande sérénité et le calme qui en font partout ailleurs une « force tranquille ». Et ce n’est rien de le dire. D’autant que de nombreux chefs ne cachent pas leur amertume et accusent en des termes dont la violence le dispute à la gravité l’intervention du député Siki Blon Blaise, l’instigateur de ce charivari. La liste des chefs de village démis a la longueur d’un long cours d’eau.
Ce sont, le chef du village de Blepleu, le chef central de Sangouiné, le chef du village de Blolé, le chef du village de Zoba, le chef du village de Oulaiglepleu, le chef du village de Saguipleu, le chef du village de Gbeba, le chef du village de Glolé, le chef du village de Gotongouiné, le chef du village de Lagoulalé et le chef du village de Melagouiné et Kassiapleu. « On n’élit pas un chef chez nous. Le chef traditionnel, c’est la tradition. Il est donc désigné sur la base d’un consensus. Cela garantit la cohésion de la communauté. Alors que les élections amènent souvent des divisions qui entament l’unité du groupe. C’est pourquoi, nous élevons les plus vives protestations contre les pratiques du député Siki Blon Blaise qui veut changer les règles en nous imposant des élections. » A dénoncé Kin Paulin, chef du village de Lagoulalé et vice-président du Collectif des chefs de village de Sangouiné. Guéhi Emmanuel, chef du village de Zoba, pour sa part, renchérit pour fustiger le fait que l’honorable Blon Blaise ait politisé la chefferie traditionnelle dans le Grand-Ouest. « Il est en train de politiser les problèmes du village. Il nous a destitués à sa façon », se plaint. Avant d’enfoncer le clou : « Il m’a destitué le 3 juin 2016. Il s’en est aussi pris au chef de terre Tia Zingbé. Il a divisé le village pour faire « sa politique ». Ce n’est pas le rôle d’un député ça ! », poursuivi-t-il.
Mais, ce n’est pas tout. « Le 20 juin 2016, le député Blon Blaise a désigné le président du comité de gestion des litiges fonciers. Cela n’est pas de ses compétences. C’est inacceptable. D’ailleurs, lors de l’intronisation de sa Majesté Gueu Pascal, Roi de Man, le ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur et de la sécurité, Hamed Bakayoko, a été très clair : il a demandé aux politiciens de ne pas s’immiscer dans la chefferie traditionnelle. Alors, que recherche le député Blon ? » S’interroge le chef du village de Zoba très amer. « Je condamne l’attitude de notre député qui s’est érigé, pour le coup, en agent de division ; or, il devait être un ferment d’unité», a-t-il conclu. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la chefferie traditionnelle est troublée par cette affaire.
Joint au téléphone afin de connaitre sa position face aux graves accusations portées contre lui par les garants de la tradition dans le Grand-Ouest, le député Siki Blon Blaise a eu une réaction pour le moins curieuse. « Monsieur, je ne peux pas vous répondre au téléphone. Trouvez-moi à Man. J’y suis pour quelques jours. Je compte d’ailleurs rentrer à la fin du mois», déclare le mis en cause, minimisant les accusations portées contre lui. C’était le mercredi 22 juin dernier. Egalement contacté pour qu’il nous éclaire sur la question, le sous-préfet de Sangouiné a, quant à lui, reconnu que des chefs de village avaient été effectivement démis mais il a souhaité ne pas en dire plus puisqu’il n’avait pas l’autorisation de sa hiérarchie pour en parler. « Ma déontologie m’interdit de m’étendre davantage sur le sujet. Comprenez-moi. Je souhaiterais, cependant, que vous entriez en contact avec les chefs de village qui sont les premiers concernés », indique notre interlocuteur au bout du fil. Hier mercredi 29juin, soucieux d’équilibrer l’information, nous avons encore joint le député Blon Blaise pour qu’il donne sa part de vérité sur la question. Il n’a pas été plus disert que lors de notre premier contact, nous demandant de « faire notre travail » puisqu’il se réservait le droit d’y répondre. « Publiez votre article, je vais user de mon droit de réponse », soutient-il. Puis, il nous a demandé de le rappeler une heure plus tard. Nous avons alors compris que pour lui, le sujet était d’une importance secondaire. L’on ne peut, dès lors, faire l’économie de quelques questionnements face à l’immixtion supposée ou réelle du député de Man Sous/préfecture dans le fonctionnement de la chefferie traditionnelle.
Depuis quand un représentant de la Nation, a-t-il mandat pour démettre des chefs de village ? Le Roi de Man est-il informé de la situation ?Les autres cadres, puisque le député Blon Blaise n’est pas le seul cadre de la région, surtout, les ministres Mabri Toikeusse, Sidiki Konaté sont-ils informés de ce qui se passe au niveau de la chefferie traditionnelle? Et, pour finir, quid de la jeunesse du Grand-Ouest ? Est-elle au fait de ce qui se trame contre les autorités coutumières? Autant de questions qui démontrent à l’envie l’importance de la question.
A l’évidence, le gouvernement ne peut rester insensible à ce qui se passe dans le Grand-Ouest où des chefs de village sont humiliés et réduits à néant sans aucune voie de recours. C’est intolérable dans un Etat de droit. Le ministère de l’intérieur se doit, sans délai, de réagir à ce qui ressemble à un abus de pouvoir. C’est une exigence de la cohésion et de l’unité nationales qui s’accommodent difficilement avec l’injustice. Car, qu’on ne s’y trompe pas, ce qui se passe au niveau de la chefferie traditionnelle dans le Grand-Ouest n’est rien d’autre que de l’injustice. Puisque les chefs démis le sont sur une base subjective, l’opération ressemblant, au surplus, à un vaste règlement de comptes. C’est en cela que la responsabilité du député Blon Blaise, si elle est avérée, prend une tournure particulière. D’autant que son exemple pourrait faire école et inspirer d’autres députés qui s’arrogeraient alors des prérogatives indues en démettant des chefs de village dans leurs circonscriptions électorales. L’Etat de Côte d’Ivoirie tomberait alors dans l’anarchie et le désordre qui constituent, faut-il le rappeler, un frein au développement et au progrès. Il ressort clairement de ce qui précède que les chefs démis en violation de la règle en la matière, devront être réinstallés. Purement et simplement. Pour que force reste à la loi et à la loi seule. Cela aurait le mérite de mettre les autorités coutumières à l’abri des humeurs ou états d’âme de toute personne qui, parce qu’elle détiendrait une parcelle de pouvoir ou aurait de l’argent, se croirait tout permis et en ferait à sa tête. Avec le président Alassane Ouattara, ce temps est révolu. A jamais !
Une correspondance particulière de Xavier D. Gobehi
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.