Des soldats maîtres du palais de Kosyam au Burkina depuis mercredi, après-midi
Abidjan, le 17-9-15 (lepointsur.com)-La confusion régnait, mercredi 16 juillet au soir, à Ouagadougou. Des tirs ont été entendus dans plusieurs parties de la capitale burkinabée. Ceux-ci ont tout d’abord retenti aux abords du palais présidentiel avant de s’étendre à d’autres quartiers de la ville.
Tout a commencé aux environs de 14h30, lorsque des soldats du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) ont fait irruption au Palais de Kosyam en plein conseil des ministres. Le président de la transition, Michel Kafando, le premier ministre, Isaac Zida, ainsi que les ministres de la fonction publique et de l’habitat ont été pris en otage. Aucune revendication n’a été formulée, mais à ce stade, cette apparente tentative de coup d’Etat n’a pas encore abouti.
Alors que le Conseil de sécurité des Nations unies, l’Union africaine, la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et la France ont condamné cette « détention » ou « prise d’otages » et exigé la libération de toutes les personnes détenues, des discussions ont été entamées au ministère de la défense entre le chef d’état-major des armées, le général Pingrenoma Zagré, l’ex-président Jean-Baptiste Ouédraogo et le patron du RSP, le général Gilbert Diendéré, pour trouver une issue à cette nouvelle crise. Cette unité d’élite qui faisait figure d’armée dans l’armée du temps de l’ancien président Blaise Compaoré a déjà tenté à plusieurs reprises de faire dérailler le processus de transition qui doit mener le Burkina Faso à des élections le 11 octobre.
Un coup de force politique
Si le timing de cette tentative de coup de force – la Commission de réconciliation nationale et des réformes préconisait dans son rapport rendu le 14 septembre la dissolution du RSP – pourrait laisser penser qu’il s’agit d’un mouvement d’humeur de soldats qui craignent de perdre leurs avantages, plusieurs sources bien informées estiment que la véritable raison de ces troubles est avant tout politique.
« C’est lié au processus électoral. Le Congrès pour la démocratie et le progrès [CDP, l’ex-parti au pouvoir] n’a jamais accepté d’être exclu de la course à la présidentielle et aux législatives », avance une bonne source. « Plus on avance vers les élections, plus ils sortent l’artillerie lourde », poursuit Guy-Hervé Kam, le porte-parole du Balai citoyen, un mouvement de la société civile qui avait été à la tête de la contestation lors du renversement de Blaise Compaoré en octobre 2014.
Le candidat du CDP, Eddie Komboïgo, ainsi que l’ancien ministre des affaires étrangères Djibril Bassolé, de même que plusieurs dizaines de candidats à la députation, ont en effet été exclus de la course électorale par le Conseil constitutionnel au motif qu’ils avaient soutenu le projet de réforme de la Constitution devant permettre à Blaise Compaoré de se succéder à lui-même après vingt-sept années à la tête du pays.
Tirs de sommation
En dépit d’une décision de la cour de justice de la CEDEAO le 13 juillet qui leur était favorable, les Nations unies les avaient encouragés fin août « à exprimer leurs positions par des voies légales et politiques et de manière pacifique ». Une position réaffirmée mardi lors d’une réunion du Groupe international de suivi et d’accompagnement de la transition où le représentant de l’Union africaine a estimé que « la question du code électoral est dépassée ». « Suite à cela, il y a eu des échanges très musclés entre des membres du CDP et des membres de la société civile », indique une bonne source.
Mercredi soir, alors que des manifestations se sont formées pour faire échec à cette tentative de coup de force, des soldats ont effectué des tirs de sommation pour disperser la foule. Au moins un journaliste du site Burkina 24 a été violemment frappé, selon un témoin direct. Le siège de Radio Omega, l’un des médias les plus écoutés sur place, a été saccagé. Celui du CDP également.
Si les négociations de la nuit venaient à échouer, de nouvelles manifestations sont à prévoir. Le Balai citoyen a appelé à un rassemblement sur la place de la Révolution à partir de 7 heures du matin. « Une porte de sortie est encore trouvable », estimait cependant dans la soirée une source diplomatique.
Kpan Charles avec http://www.lemonde.fr
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.