Politique

[Cameroun : Présidentielle 2025] Issa Tchiroma Bakary se lance dans la course et défie Paul Biya


Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre de Paul Biya, annonce sa candidature à l’élection présidentielle du Cameroun. Dans une lettre poignante, il dénonce un régime à bout de souffle et propose des réformes majeures, notamment le retour à un fédéralisme choisi.

Abidjan, le 27 juin 2025 (lepointsur.com) L’annonce a été un choc pour la scène politique camerounaise : Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre démissionnaire de l’Emploi et de la Formation professionnelle, a officiellement déclaré sa candidature à l’élection présidentielle. C’est par une « Lettre aux Camerounais » de 24 pages qu’il a levé le voile sur ses ambitions politiques, 24 heures seulement après sa démission du gouvernement et sa rupture nette avec le président Paul Biya, dont il était l’un des plus proches alliés.

Une rupture symbolique et une prise de distance

Dans sa lettre, l’ex-ministre rend hommage aux « pères fondateurs de la nation » tout en dénonçant un régime « à bout de souffle ». Il s’interroge sur l’avenir du pays en affirmant : « Un pays ne peut exister au service d’un homme. Il doit vivre au service de son peuple ». Issa Tchiroma met en lumière les dysfonctionnements du système qu’il a pourtant servi durant plusieurs décennies, avec une lucidité qui n’épargne ni ses anciens collègues, ni le président Paul Biya lui-même.

Son texte, à la fois introspectif et critique, témoigne d’un ras-le-bol du fonctionnement centralisé du pouvoir et d’un appel à un changement radical. Un changement qu’il entend incarner à travers sa propre candidature. L’ancien porte-parole du gouvernement propose, entre autres, de réintroduire un modèle de « fédéralisme choisi », un sujet qu’il considère comme crucial pour rétablir l’équilibre et la paix sociale au Cameroun.

Une candidature à la croisée des chemins

L’officialisation de sa candidature, aussi fracassante soit-elle, survient dans un contexte politique particulièrement tendu. Moins de 24 heures après la publication de sa lettre, une décision administrative rendue publique sur les réseaux sociaux a interdit toute activité politique du Front Social National pour le Changement (FSNC), le parti d’Issa Tchiroma, dans certaines parties de la région de l’Extrême-Nord. Un geste qui reflète la réticence du pouvoir à céder face à une défection aussi significative.

Ce coup de semonce n’a pas tardé à susciter des réactions au sein du gouvernement. Selon Christophe Mien Zok, directeur de l’information et de la propagande au secrétariat général du comité central du RDPC, le parti présidentiel ne s’inquiète guère des conséquences immédiates de cette annonce : « Quelle était sa contribution sur le plan arithmétique ? Nul ne peut le dire. Nous devons redoubler d’efforts, notamment dans cette région, mais au-delà, nous ne croyons pas que M. Tchiroma puisse exercer la même capacité de mobilisation ailleurs », a-t-il déclaré.

Un terrain politique à défricher

La candidature d’Issa Tchiroma, bien que perçue comme une nouvelle donne dans l’arène politique camerounaise, semble offrir une occasion de renouvellement du débat démocratique, mais aussi une opportunité de montrer au peuple un modèle de gouvernance alternative. Son programme ambitieux, axé sur la décentralisation et une plus grande autonomie des régions, pourrait résonner avec une population en quête de changements profonds après plusieurs décennies de pouvoir centralisé.

Cependant, cette rupture avec Paul Biya ne sera pas sans obstacles. Le poids historique de sa carrière politique, marquée par des années de loyauté au président sortant, laisse des questions sur sa crédibilité en tant qu’agent du changement. D’autant que la capacité de mobilisation de l’ancien ministre, limité à sa base dans l’Extrême-Nord, pourrait s’avérer insuffisante pour faire face aux grandes dynamiques nationales.

Issa Tchiroma Bakary a ouvert une porte, mais il lui reste à convaincre les Camerounais de sa vision et de son projet pour un avenir meilleur. Si sa candidature trouve un écho dans les urnes, elle pourrait marquer le début d’un tournant politique dans le pays.

Médard KOFFI 

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