Affrontement sanglant à la Maca/ Des armes de guerre saisies dans la plus grande prison ivoirienne #yacoulechinois
-2 morts (officiel) et plusieurs blessés
-Plus d’une dizaine de morts selon des témoignages
-Le baptême du feu du nouveau régisseur
Abidjan, 21-02-16 (lepointsur.com)-L’enceinte de la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca), la principale prison de Côte d’Ivoire s’est transformée en un véritable champ de bataille entre les détenus armés de kalachnikovs et les gardes pénitentiaires, samedi 20 février 2016. Les gardes pénitentiaires ont reçu les renforts de la police, gendarmerie et de l’Onuci pour venir à bout d’une mutinerie qui aura duré pendant trois heures de temps.
Le bilan officiel fait état de deux personnes tuées. Il s’agit du tristement célèbre détenu Yacouba Coulibaly dit « Yacou le Chinois » et d’un garde pénitentiaire dont l’identité n’a pas été révélée, selon le communiqué des forces sécuritaires.
Des témoignages recueillis auprès de certains agents de la police venus en renfort aux gardes pénitentiaires font état d’une dizaine de personnes tuées. « Cinq kalachnikovs ont été saisies auprès de la garde rapprochée de Yacou le Chinois, un caïd de la Maca, à l’origine, il y a quelques années, de plusieurs tentatives d’évasions et de mutineries « , a affirmé de son côté, un autre responsable de la police ayant requis l’anonymat, au confrère de l’AFP.
En effet, selon les témoignages les détenus avaient attaqué entre 08h00 et 09h00 (GMT et locales) les postes des gardes pénitentiaires, selon un gardien, le sergent Noël Yao. Selon lui, la décision des mutins, dont de nombreux condamnés à des lourdes peines, d’effectuer une sortie à la journée sans en avoir obtenu l’autorisation, a été le déclencheur de la révolte.
Des témoins ont raconté avoir entendu des échanges de tirs entre détenus et gardiens, appuyés par la police et la gendarmerie. Les prisonniers avaient pris un moment le contrôle de l’établissement, avait assuré un voisin joint au téléphone.
D’autres sources affirment que « Yacou le Chinois » aurait remis la somme de 500 milles FCFA à un garde pénitentiaire pour soudoyer le nouveau régisseur Monsan Amonkou afin qu’il ne soit pas transféré dans une prison de l’intérieur de la Côte d’Ivoire vu qu’il régnait en maître absolu dans la Maca.
Fin décembre 2015, le régisseur d’alors, Hincléban Koné a été remplacé par l’ancien administrateur du camp pénal de Bouaké (centre ivoirien), Monsan Amonkou. Dans un élément vidéo diffusé mi-décembre sur les réseaux sociaux on peut voir Yacou le Chinois distribuer des billets de banque pour marquer la célébration de son anniversaire, encadré et acclamé par d’autres détenus dont certains vêtus de T-shirts à son effigie, lors d’une cérémonie au sein de la Maca, en présence du régisseur d’alors, Hincléban Koné. Le détenu de tout blanc vêtu avait distribué des billets de banque allant de 500 à 10.000 FCFA.
Quant aux blessés ils ont été transférés au Centre hospitalier universitaire (CHU) de la commune de Yopougon, à l’ouest d’Abidjan.
Condamné deux fois à 20 ans de prison, Yacouba Coulibaly dit Yacou le Chinois en raison de ses yeux bridés, était devenu une sorte de star locale dont les frasques, réelles ou fantasmées, faisaient régulièrement les gros titres de la presse ivoirienne.
Le gouvernement n’a pas fait de commentaire sur ces troubles survenus dans cette prison particulièrement sensible, où sont notamment détenues des personnalités proches de l’ancien président Laurent Gbagbo.
La prison de la capitale économique ivoirienne qui accueille quelque 5.200 prisonniers pour 1.500 places, selon les derniers chiffres disponibles, avait subi d’importantes évasions en 2012.
Elle avait été entièrement vidée de ses détenus et très endommagée au plus fort de la crise postélectorale (2010-2011) qui a fait plus de 3.000 morts. Elle avait ensuite subi d’importants travaux de rénovation, mais reste surpeuplée.
Seriba Koné avec l’AFP
Encadré
-Le plus dur commence pour le régisseur Monsan Amonkou
La mort de Yacou le Chinois vient confirmer le laxisme, la corruption, le gain à l’argent facile dont sont taxées les administrations judiciaires, sécuritaires et même de certaines Organisation non gouvernementales intervenant dans les prisons ivoiriennes.
Condamné une première fois à vingt ans de prison en 2010 pour vol aggravé, Yacou s’évade de la Maca à la faveur de la crise post-électorale de 2010-2011. Il intègre les Forces Républicaines de Côte d’ivoire (FRCI), au sein desquelles il obtient le grade de caporal.
Cependant, Yacou récidive dans le vol et est arrêté à la suite d’un braquage occasionnant des pertes en vies humaines. Depuis lors, il purgeait une peine de 20 ans d’emprisonnement ferme au sein du Bâtiment C de la Maca. Une détention qui s’apparente plutôt à un oasis paisible dans lequel tout le monde est à sa merci.
La presse et les médias ont investigué sur les actes posés par le célébrissime Yacou le Chinois pointant d’un doigt accusateur le pouvoir Ouattara de laisser un détenu jouer les plus royalistes que le roi, sans que personne ne lève le petit doigt.
C’est donc, un ouf de soulagement pour ce pouvoir pour qui, le détenu était devenu un os dans la gorge. Mais pour combien de temps ? La question mérite d’être posée dans la mesure où, en Côte d’Ivoire, l’habitude étant une seconde nature, Yacou le Chinois a laissé derrière lui, en prison et hors de la son univers carcéral des relais.
C’est ce réseau qu’il faut démanteler et non se réjouir de sa mort. Quel travail faisait-il, et pour qui au point de recevoir des appels téléphoniques en pleines prison ? D’où proviennent les billets de banque qu’il distribuait au sein de la prison ? Comment ces armes de guerre sont-elles arrivées en pleine prison, et pourquoi ?
Autant de questions qui confirment de loin les accusations de la presse d’opposition, jamais démenties contre l’administration judiciaire, sécuritaire etc.
Yacou est certes mort, mais le nouveau régisseur Monsan Amonkou vient de se faire des ennemis. Reste à savoir s’il sera compris par sa hiérarchie et les autres administrations agissant au compte de la Maca pour sa politique d’assainissement du milieu carcéral de la plus grande prison ivoirienne qui accueille plus de 5 mille prisonniers où la capacité est de 1.500 places.
Seriba K.
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