[1er Mai à Yopougon] L’UNATR-CI interpelle le gouvernement sur les urgences sociales et les droits syndicaux
À l’occasion de la fête du Travail 2025, l’UNATR-CI a organisé un grand rassemblement à Yopougon, dressant un tableau des acquis sociaux et exposant les doléances des travailleurs ivoiriens, dans un contexte économique et social difficile.
Abidjan, le 1er Mai 2025 (lepointsur.com) À l’occasion de la Fête du Travail, la centrale syndicale UNATR-CI (Union Nationale des Travailleurs de Côte d’Ivoire) a célébré, le jeudi 1er mai 2025, sa traditionnelle journée de mobilisation sur le boulevard Alassane Ouattara à Yopougon. Sous la houlette de son secrétaire général, Yves Kodibo, plusieurs syndicats affiliés ont pris part à un défilé haut en couleur, ponctué de messages forts en faveur de la justice sociale, d’un plaidoyer appuyé auprès du gouvernement sur les nombreuses préoccupations des travailleurs ivoiriens, ainsi que de la transformation économique et de la revalorisation du travail.
L’événement a enregistré une participation remarquable, avec la présence du ministère de l’Emploi et de la Protection sociale, représenté par Mme Bony Isabelle, sa conseillère technique ; du premier magistrat de la commune de Yopougon, Adama Bictogo ; du diplomate Ahoua Don Mello, représentant des BRICS pour l’Afrique centrale et occidentale ; du parrain emblématique de l’UNATR-CI, l’honorable Dr Sako Mamadou, figure militante de premier plan, ainsi que de nombreuses autres personnalités.
A l’occasion de ce 1er mai, un moment solennel pour célébrer le travail, ne Secrétaire général Yves Kodibo a pris la parole pour alerter les pouvoirs publics sur les attentes pressantes des travailleurs. Cette célébration se tient, selon lui, dans un climat social marqué par une cherté de la vie croissante et les conséquences dévastatrices des changements climatiques.
L’UNATR-CI a d’abord reconnu certaines avancées importantes obtenues dans le dialogue avec l’État. Dans le secteur public, la mise en place du Comité Consultatif de la Fonction Publique et la prise de décrets d’application du nouveau statut général de la fonction publique sont perçus comme des pas encourageants.
Côté secteur privé, l’Union salue les discussions avancées sur la revalorisation du SMAG, la convention sur les travailleurs de la sécurité privée, ainsi que l’actualisation du barème salarial des enseignants du privé laïc.
Malgré ces acquis, l’UNATR-CI rappelle que de nombreuses doléances restent sans réponse, notamment l’octroi de la prime d’incitation, la revalorisation des indemnités liées aux examens scolaires, ou encore l’augmentation du nombre de postes aux concours professionnels pour les instituteurs adjoints.
Dans le privé, l’application effective du SMIG, la ratification de la Convention 190 de l’OIT sur la lutte contre le harcèlement au travail, et le respect du statut des dockers figurent en tête des revendications.
L’UNATR-CI a également plaidé pour une meilleure inclusion des personnes en situation de handicap, réclamant une augmentation du quota de recrutement annuel à la fonction publique, l’instauration d’une carte d’invalidité, et une formation adaptée avant toute affectation.
L’un des points les plus sensibles du discours a concerné la liberté syndicale, que l’UNATR-CI juge aujourd’hui menacée. L’organisation dénonce les entraves à l’exercice du droit de grève, les sanctions infligées à des leaders syndicaux, les ponctions sur salaires et même l’arrestation de certains syndicalistes, comme le camarade Assy Duggary Ghislain, toujours détenu.
L’Union demande l’abrogation de la loi n°92-571 du 11 septembre 1992 sur les modalités de grève dans le service public, et le respect strict des conventions internationales ratifiées par la Côte d’Ivoire.
Une plateforme revendicative sociétale étendue
En marge des préoccupations professionnelles, l’UNATR-CI a étendu son plaidoyer à plusieurs défis sociétaux majeurs :
● Coût de la vie : avec des prix élevés des denrées, transports et logements, l’Union appelle à des mesures d’urgence pour alléger la pression sur les ménages.
● Changements climatiques : elle exhorte le gouvernement à renforcer la protection de l’environnement et à améliorer le cadre de vie.
● Litiges fonciers : l’Union plaide pour une réforme du système
Parmi les personnalités présentes, la représentante de Maître Adama Kamara, Ministre de l’Emploi & de la Protection sociale, Mme Bony Isabelle, la conseillère technique a livré un message fort en hommage aux travailleurs ivoiriens, au nom de Maître Adama Kamara, empêché.
S’exprimant devant les syndicats réunis sur le boulevard Alassane Ouattara, Mme Bony a salué avec solennité l’engagement des hommes et des femmes qui bâtissent quotidiennement l’économie nationale. « Le ministre aurait souhaité être présent pour communier avec vous », a-t-elle souligné, avant de transmettre sa reconnaissance aux travailleurs pour leur ardeur, leur courage et leur compétence.
Dans un discours empreint de dignité, la représentante a rappelé que le 1er Mai n’est pas qu’une simple célébration, mais un moment de mémoire et d’espoir, marquant les luttes historiques et actuelles pour l’amélioration des conditions de travail. Elle a également salué le rôle stratégique des syndicats dans le dialogue social et la mise en œuvre des réformes publiques.
Mme Bony a réaffirmé l’engagement du gouvernement, sous la houlette du Président de la République, à construire une économie inclusive garantissant des conditions de travail dignes. À ce titre, plusieurs chantiers prioritaires ont été annoncés : la poursuite de la Couverture Maladie Universelle (CMU), l’extension de la protection sociale aux travailleurs du secteur informel, et l’adaptation du cadre législatif aux réalités actuelles du monde du travail.
Ces réformes, a-t-elle précisé, seront menées dans une approche inclusive, en étroite collaboration avec les partenaires sociaux, afin d’assurer leur pertinence et leur efficacité.
Quant au premier magistrat de la Commune de Yopougon, le président Adama Bictogo, il s’est longuement exprimé sur les défis économiques et sociaux auxquels font face les travailleurs ivoiriens. S’il s’est réjoui de l’appréciation du diplomate Ahoua Don Mello sur la performance du modèle économique ivoirien, qu’il qualifie de « croissance éclairée » sous la houlette du Président Alassane Ouattara, Bictogo a surtout mis l’accent sur la nécessité d’un libéralisme économique assorti d’une dimension humaine.
« Tous ces pays ont un point commun : un socle solide d’ouvriers qualifiés. C’est cette base qui leur a permis de bâtir de véritables industries et d’assurer une croissance inclusive », a-t-il souligné, appelant à une réforme profonde de la formation technique et professionnelle en Côte d’Ivoire.
Dans un contexte marqué par un déficit criant de logements, Adama Bictogo propose d’investir dans l’industrie immobilière, qui pourrait à la fois résorber la crise du logement et générer des emplois qualifiés.
« Le 1er Mai est un moment de rappel que le développement économique ne vaut que s’il intègre la justice sociale et la dignité humaine », a-t-il martelé.
Enfin, dans un monde en mutation, marqué par des replis identitaires croissants, Adama Bictogo a réaffirmé l’engagement de la Côte d’Ivoire en faveur du multilatéralisme, convaincu que l’ouverture et la coopération internationale sont essentielles à l’amélioration continue de la qualité de la main-d’œuvre et à la transformation structurelle de l’économie nationale.
Médard KOFFI