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Sommes-nous bien informés par nos dirigeants ? #CIV


Abidjan, le 9-6-15 (lepointsur.com)-Cette semaine à travers des exemples précis, nous analyserons la manière dont le citoyen est apprécié par le gouvernant à travers la méthode utilisée pour véhiculer le message :

Nous sommes le 25 mars 2014. Une jeune fille du nom de Awa est déclarée morte aux urgences d’un CHU d’Abidjan. La négligence des médecins serait à la base du décès, quelques heures après, c’est Madame la ministre Goudou Coffie qui sur les antennes de la RTI félicite, tout le service des urgences du CHU, après l’avoir dédouané de ce décès. « La victime est décédée suite à une agression inadmissible et intolérable qui n’engage pas la responsabilité des services de santé. » 48 heures après cette déclaration, coup de théâtre. Elle démet le premier responsable des urgences, et la ferme pour réhabilitation. Dans ce tintamarre mal ficelé, nul n’expliquera au citoyen lambda les causes réelles du décès, et de la démission et d’autre part  le motif justifiant la fermeture des urgences.

Sommes-nous bien informés par nos dirigeants ?  La lettre à Collette de Omar Samson #CIV

gouvernement-ivoirien-22-novembre-2012Deuxième acte : le 21 Mai 2014, Une jeune dame du nom de Madjara a tenté de s’immoler devant le  palais présidentiel, Parce que l’Etat ivoirien refuserait de lui payer une dette contractée sous l’ancien régime. Ses « restes fumants » ont été transférés aux urgences. Elle n’a pas survécu. Et le soir après le conseil des ministres, dans un communiqué, évasif, le ministre,  Bruno Koné, porte-parole du gouvernement survolera  cette affaire, en la banalisant presque. Et depuis lors silence radio.

Si ce qui se dit en ville  est fondé, le dernier cas en date est plus que dramatique : nous sommes au lendemain   du mardi 2  juin 2015, on  nous apprend que deux jeunes braqueuses à bord d’un taxi ont été abattues dans Abidjan. D’ailleurs le lendemain, la presse proche Soro (excusez pour la précision tout dans ce pays : ministres, généraux, investisseurs, députés, tous s’éloignent finalement du PR pour être proche-Soro ou Proche-Hambak) affichait l’info à leur Une. Et le 3 juin, avant 11 heures, nous sommes informés que contrairement à ce qui avait été distillé toute la soirée du 2, il s’agissait d’une bavure policière. Face à la gravité de la situation, nous espérions qu’au JT du soir, une autorité compétente viendrait en briefing. Pas de briefing, car une fois de plus, le plat de résistance du JT fut l’agenda de Monsieur et madame Ouattara, et le dessert, une affaire de drogue saisie à Noé.   

Pourquoi parler de tout cela à un moment où l’actualité ne manque pas de thèmes croquants ? Parce que via les chaines de TV étrangères, et comme cela se voit dans les pays sérieux, respectant leurs citoyens, chaque fois qu’une situation similaire se produit, une autorité compétente bien instruite se charge de mettre tout le monde au même niveau d’information, laissant la police et la justice travailler. A quoi assistons-nous sous nos cieux ? Un mutisme rimant avec moquerie et foutaise, insultes et désinvolture. Pourquoi se moquent-ils en ôtant volontairement la courroie  entre eux et nous chaque fois qu’une communication s’impose ? Parce que tout simplement nos gouvernants se contrebalancent de notre sérénité (informer c’est « sérénité »). Et plus grave, même dans les situations les plus sérieuses (le recensement, l’augmentation du coût de l’électricité, l’AMU), aucune émission spéciale Radio ou Télé anticipée, pour sensibiliser, informer et expliquer le bien-fondé. Depuis le sommet, jusqu’aux commissions en charge, on se tait et un après-midi de mercredi, on « balance le son » suite à la rencontre hebdomadaire qu’on s’est imposée et baptisée conseil des ministres. Toujours pour vous réconforter dans votre amateurisme, c’est après avoir décrété, qu’on réfléchit aux modalités d’application comme dans le cas de l’électricité. Ne nous « gérez » pas. Nous en sommes vaccinés. Et comme le disait vendredi nuit « Pélagie Dent tiré », un enfant qui est né dans plantation de tamarin et qui a fait son adolescence dans un champ de citron, aucun autre fruit acide n’effrayera sa langue.

Le frère de Moulay Rachid, plus qu’un ami pour la Côte d’Ivoire, un vrai « compatriote ». Si M. Gbagbo se rendait constamment au Maroc, officiellement pour traiter sa dent (Dieu, ses médecins et lui-même connaissent les vraies raisons de ces fréquentes visites), sans que le Roi ne lui retourne plusieurs fois l’ascenseur, M6 vient de quitter Abidjan suite à sa 3ème visite en 4 ans. Comme quoi, les intérêts sont divergents selon les individus, et la considération dont vous bénéficiez de l’extérieur est fonction de votre auto-marketing et partant de celui de votre pays. Pourquoi celle chaleur brusque dans les relations ivoiro-marocaines ? M. Ouattara a su vendre la destination C.I. et « Notre ami le Roi » en est tombé sous le charme. Comme l’a dit un ami journaliste marocain il y’a une semaine, « M. Ouattara a repris les relations C.I.-Maroc exactement là ou Houphouët Boigny les a laissés ». Et face à la récession économique dans une Europe vieillissante, renfermée dans une grande diversité, engendrant une faiblesse d’investissement dans certains domaines  et en Europe et en C.I., le Maroc profite pour accroitre ses investissements au Sud du Sahara et singulièrement en Cote d’ivoire. Et ses investissements sont l’œuvre d’entreprises de qualité de pointe. Pour petit rappel,  71 sociétés marocaines figurent dans le classement des 500 plus grandes entreprises africaines. Et mieux, selon Nadia Rhaouti, « 25% des investissements marocains dans le monde se font vers la Côte d’Ivoire » dans presque tous les domaines : SAHAM Assurance, CIMAF, SIB, BOA, polyclinique INDENIE, CCIM-CI, Carré d’Or, la pèche, les routes, installation de 3 centrales hydroélectriques, ADDOHA, le textile… le prof parlant du poète a dit : « donnez lui de la boue, il en ferait un chef-d’œuvre »  les marocains disent offrez à MARCHICA-MED vos lagunes d’excréments et de puanteur, il en fera une marina digne des côtes méditerranéennes. Et l’ayant compris, Ouattara a offert gracieusement la baie de Cocody aux marocains pour 137 milliards. Rendez-vous dans quelques mois pour voir ce qu’ils en feront. Les connaissant à travers la métamorphose de Nador dans le nord-est marocain, pour une fois, nous ne seront pas des Saint-Thomas. Voila ce qu’on pourrait qualifier de relations sud-sud, et ce sont là des modèles de présidents panafricanistes dans les faits, et non dans le verbe. De toute évidence, face à la quantité élevée des investissements dans le sens Rabat-Abidjan, la balance est largement excédentaire en faveur du Maroc.

Mais pourquoi les entreprises ivoiriennes peinent à intégrer les capitaux des grands groupes pour être aussi citées en exemple à l’extérieur ? Pour au moins deux raisons : d’abord la peur du risque. Nous préférons éjecter 75% de nos revenus dans les grosses boîtes de nuit, sponsorisation les concerts, et la construction immobilière, juste pour mettre à l’abri nos descendants sur quatre générations, ensuite le système ivoirien n’est d’abord pas assez souple localement. Et nous en voulons pour preuve la réaction de ces deux dames chefs d’entreprise lors de l’émission Réussite sur Canal+. La première exerce dans le complément alimentaire pour enfant. Il lui a été demandé sans autre forme de procédure d’enlever l’image de l’enfant sur ses emballages (pourtant son succès reposait sur cette image) et l’autre dans le lait pré fermenté (caillé) à qui presque toutes les banques refusaient de faire crédit pour son expansion. A les écouter, et en lisant entre les lignes, on sentait qu’elles venait d’en haut, les amener à fermer et récupérer l’affaire. Tant que les autorités ne seront pas plus souples à l’égard des locaux, on verra toujours des pays comme le Maroc, l’Egypte et l’Afrique du Sud leur ravir les grands marchés.

Omar Samson

 

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