[Santé] Le Covid-19 pourrait-il déboucher sur une longue maladie, voire une maladie chronique ?
Au-delà des effets graves du Covid-19, qui emmènent parfois les malades en réanimation, un certain nombre d’entre eux, considérés guéris, se plaignent des semaines plus tard de symptômes persistants. Le Covid-19 pourrait-il déboucher sur une longue maladie, voire une maladie chronique ?
Le terme de « Covid long » est un terme générique qui a été inventé par les patients pour décrire tout ce qui se passe après la maladie et qui englobe toutes sortes de symptômes. On sait que la maladie peut toucher différents organes, et pas seulement les poumons, en particulier en raison de cet orage inflammatoire aigu qui peut survenir et laisser des traces. Mais il y a aussi le passage en réanimation, traumatisant pour le patient. Les symptômes ressentis par les patients guéris sont donc aussi divers que les organes touchés.
La Communauté de patients pour la recherche des hôpitaux de Paris, ComPaRe, a permis, avec le Centre d’épidémiologie clinique de l’Hôtel-Dieu AP-HP, la réalisation d’une étude épidémiologique qui s’appuie sur les déclarations volontaires de 600 patients. Cette étude identifie, à partir de trois semaines après la maladie, une cinquantaine de symptômes différents touchant une dizaine d’organes. Les signes les plus fréquents sont une fatigue importante, un essoufflement, des douleurs cardiaques, et des signes neurologiques comme une difficulté à se concentrer, mais on parle aussi de syndrome post-traumatique, de type anxiété ou dépression.
Une maladie récente, des études en cours
En janvier, des chercheurs chinois ont publié dans la revue britannique The Lancet une étude portant sur 1 733 patients hospitalisés pour Covid-19 entre janvier et mai 2020 à l’hôpital de Wuhan, qui montre que 76% des patients hospitalisés ont encore au moins un symptôme 6 mois plus tard.
Le 17 mars 2021, les résultats d’une étude française menée à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre (COMEBAC / Consultation Multi Expertise de Bicêtre Après Covid-19) avec les hôpitaux universitaires Paris-Saclay, a été publiée dans la revue JAMA. 480 patients ont été recontactés quatre mois après leur hospitalisation et tous ceux qui avaient des symptômes ont été revus pour un bilan exhaustif pluridisciplinaire prenant en compte l’aspect psychologique.
Les résultats montrent que 51% des patients qui ont été hospitalisés ont au moins un symptôme post-Covid quatre mois plus tard, notamment une fatigue persistante ou des troubles cognitifs. Les patients suivis ont passé un scanner pulmonaire et les médecins ont constaté que, même après une forme grave de Covid-19, il y a peu de lésions pulmonaires, et rares sont les lésions très sévères – fibroses -. Ces lésions les plus sévères concernent les patients qui ont été en réanimation, dont un quart des poumons, au maximum, est atteint.
Pour le professeur Xavier Monnet, co-auteur de l’étude, c’est une bonne nouvelle au regard de la gravité de la maladie initiale : « On pouvait penser qu’il y aurait des séquelles respiratoires importantes, mais on voit qu’à quatre mois ce n’est pas le cas ».
Des symptômes connus, des patients nombreux
La phase inflammatoire aigüe peut engendrer des séquelles sur les organes touchés, mais les chercheurs et les médecins ont constaté que ces séquelles ressemblent à celles laissées par les maladies touchant habituellement ces organes, et ne semblent pas plus importantes : une atteinte grave des poumons par le Covid peut laisser des séquelles identiques à celles d’une grave pneumonie due à la grippe.
Sur l’aspect psychologique de la maladie, l’étude du Kremlin-Bicêtre montre que chez les malades qui sont passés en réanimation, le taux de patients anxieux a posteriori ou souffrant d’un syndrome post-traumatique n’est pas plus fréquent que dans d’autres contextes après réanimation. Ce qui est particulier, ce sont les troubles cognitifs, troubles de l’attention et de la mémoire, mais on les observe aussi dans d’autres maladies virales comme la mononucléose chez l’adulte, avec une fréquence quasi-identique.
La grande différence, c’est le nombre de patients atteints : l’étude française montre que 16% des personnes ont un essoufflement résiduel quatre mois après la maladie, dans l’étude chinoise, 60% des patients se plaignent d’une fatigue persistante à 6 mois, le volume de prise en charge nécessaire est donc énorme. D’où la demande de nombreux patients qui souhaitent voir le Covid-19 entrer dans la catégorie des affections longue durée (ALD) de la Sécurité Sociale en France.
Construire l’avenir
Plusieurs études sont aujourd’hui en cours à l’international. L’étude COMEBAC se poursuit dans l’objectif d’identifier l’impact des traitements – qui n’existaient pas lors de la première vague – sur les symptômes persistants, et l’impact des variants apparus au dernier trimestre 2020. Du côté épidémiologique, les chercheurs de ComPaRe travaillent sur un questionnaire dans l’idée de fournir aux médecins un outil de suivi. Tous les patients ayant été atteints par la maladie sont invités à y participer.
L’association de patients Covid long, Après J20, demande la reconnaissance du Covid en longue maladie, et la prise en charge des séquelles au titre de la maladie elle-même
Source : Rfi