[Santé communautaire] Le ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique fait des révélations
-Le résultat de la grande offensive de la confédération et le point d’une première journée de grève
-Quand le Synaescom-ci mène un mouvement noble et se met le doigt dans l’œil
-Vers la fin du ‘’calvaire’’ des agents
Le Syndicat national des agents des établissements sanitaires à base communautaire de Côte d’Ivoire (Synaescom-ci) a entamé le lundi 7 mai une grève de 72 heures pour salaires impayés des agents depuis le mois de janvier 2018. Un seul établissement sanitaire communautaire a été ‘’pris en otage’’ par l’arrêt de travail.
La première journée de la grève conduite par le secrétaire général du Synaescom-ci, Meney Kaman Georges et ses membres, n’a pas été suivie. Seule la formation sanitaire à base communautaire d’Abobo-Avocatier, Henriette Konan Bédié, a observé la grève sans respecter le service minimum dans certains services. Les grévistes revendiquent le paiement des quatre mois d’arriérés de salaire, la régularisation de la paie chaque mois par virement, et la paie de la prime d’ancienneté.
En se rendant à la Formation sanitaire à base communautaire d’Abobo-Avocatier, Henriette Konan Bédié, le lundi 7 mai 2018, Mme Kouadio Patricia, enseignante dans un établissement privé à Abidjan, était loin de s’imaginer qu’elle allait faire la navette entre une clinique et la maternité de l’hôpital. Rencontrée aux environs de 15 h parce que sa petite sœur a accouché la veille dans cet établissement sanitaire, elle nous conte ses déboires. « Je viens de prendre le résultat du groupe sanguin du nouveau-né de ma sœur dans une clinique » indique-t-elle. Pendant les 24 heures, elle estime avoir été ‘’très bien reçue’’, mais se plaint de la grève. « Hier (ndlr : dimanche 6 mai) quand nous sommes arrivées, il y avait des patientes et nous avons été très bien reçues et tout s’est bien passé. C’est aujourd’hui que j’ai été informée de la fermeture de certains services alors qu’on doit faire un examen de sang au bébé. Si le laborantin était là depuis 6 h du matin, les sages-femmes allaient nous libérer », ajoute-t-elle.
Un seul service où le service minimum est assuré. Par ailleurs, le service minimum est assuré à la maternité, où on ne reçoit que les femmes en travail, selon la sage-femme Bazo. En revanche, elle a un pincement au cœur vu que plusieurs femmes enceintes venues pour les consultations prénatales, tôt le matin, n’ont pu être reçues. « Malgré la grève, nous avons assuré le service minimum à la maternité pour sauver deux vies : celle de la mère et de l’enfant. Mais, en tant que mère, c’était difficile de voir des femmes enceintes retourner chez elles sans être consultées, à cause de la grève.»
Depuis 1999, Soumahoro Daouda est employé dans cet hôpital, il s’interroge sur les retards de paiements à n’en point finir depuis 2011, année pendant laquelle, le gouvernement s’est engagé à payer les salaires des employés des établissements sanitaires urbaines à base communautaire. Il s’est rendu sur son lieu de travail, mais il ne travaille pas. « Depuis la paie de décembre jusqu’à ce jour, nous n’avons pas perçu notre salaire. Cette fois, nous avons décidé d’entrer en grève jusqu’à ce que la régularité de paiement mensuel soit effective. Nous ne voulons plus retomber dans les mêmes problèmes de retard de paiement de nos salaires. Si le gouvernement ne peut pas, qu’on retourne à l’ancienne méthode », menace-t-il.
Le secrétaire général du Synaescom-ci, qui travaille dans cet établissement, a brillé par son absence et était injoignable au moment de notre passage. Cependant, nous avons rencontré le premier employeur des agents, le président du conseil d’administration (PCA) de cet hôpital, Yapi Gustave. Il déplore la situation, en tant que nouveau PCA qui a pris fonction, il n’y a que six mois. Selon lui, le centre a toujours bien fonctionné jusqu’à ce qu’il soit confronté à cette situation de grève ‘’déplorable’’ de ses agents. « Je n’ai jamais souhaité et je ne voudrais pas voir le centre dans cette situation. Notre devoir est d’œuvrer pour le bien-être de la population, donc c’est une situation difficile à supporter, s’indigne le PCA qui ajoute par ailleurs, je fais confiance à nos autorités qui ont déjà régularisé la situation. Donc, je demande une reprise effective du travail.»
L’appel de la confédération entendu. Face à la menace du syndicat d’observer une grève de 72 heures à compter du lundi 7 mai 2018, le bureau national de la confédération des formations sanitaires urbaines communautaires de Côte d’Ivoire, présidé par Ouattara Clément a invité, le dimanche 6 mai, le Synaescom-ci, à ‘’ surseoir à cette grève.’’
Sur 37 établissements sanitaires à base communautaire, sept n’ont pas observé la grève et ont travaillé à plein régime ; 29 ont travaillé en respectant le service minimum par service et un seul a violé la règle. Tel est le point de la situation dressé aux environs de 20 heures à la formation sanitaire urbaine communautaire de Yopougon-Ouassakara-Attié par le président confédéral, M. Ouattara Clément. « Nous saluons et remercions tous les employés qui ont dit non à la grève pour donner le sourire et la vie à des patients ce jour. Ils ont posé un acte salutaire et seul le Seigneur saura les remercier », salue-t-il.
Aux autres centres, il maintient le langage de la reprise du travail parce que convaincu que le paiement se fera dans les heures qui suivent. En effet, grâce à l’implication personnelle du président confédéral, Ouattara Clément, les populations n’ont pas trop souffert de la grève le premier jour. Mieux, il promet la reprise ‘’effective’’ du travail dans tous les établissements sanitaires urbains communautaires le mardi 8 mai. « Nous avons fait le tour des administrations concernées par le salaire de nos employés au ministère de la Santé. Tout est en bonne voie afin que la situation se régularise », rassure-il.
Vers la fin du calvaire des employés. Les différents services du ministère de la Santé et de l’Hygiène publique, concernés par la paie des agents de la santé communautaire de Côte d’Ivoire, travaillent depuis des années sur la question qui concerne ‘’environ 1400 agents’’. Ce, dans le cadre de la poursuite de la mise en œuvre de la mesure de la gratuité ciblée, mais la lenteur de la transmission à la direction des Affaires financières (DAF) des états de salaires émargés des agents contractuels qui travaillent sous la responsabilité des PCA est déplorable.
Le responsable de la sous-direction du recouvrement des coûts, des actes de la santé et la mobilisation des ressources au ministère de Santé, Guéyo Montan, n’est pas passé par quatre chemins pour nous éclairer. Même s’il n’a pas daigné dévoiler le montant global du salaire des 1400 employés, il précise qu’il s’agit d’une contribution de l’Etat à la prise en compte des charges salariales, les agents contractuels ayant pour employeurs les ESCOM. « Dès la prise de fonction de l’actuel DAF en février 2017, il a proposé que les salaires émargés des agents contractuels soient déposés chaque 5 du mois en cours. C’est une mesure qui a très bien fonctionné jusqu’en décembre 2017 », rappelle-t-il.
Malheureusement, en 2018, les structures ont baissé les bras. En témoigne le retard accusé par certaines structures en avril 2018, bien qu’un courrier ait été adressé aux ESCOM le 9 mars pour interpeller leurs employeurs. « (..) Je vous prie de bien vouloir me transmettre les états de salaires émargés des mois de janvier, février et mars 2018 des agents contractuels sous votre responsabilité. Il en sera ainsi chaque 5 du mois en cours (…) », peut-on lire en substance dans le courrier signé par l’administrateur des services financiers, directeur des Affaires financières (DAF) au ministère de la Santé et de l’Hygiène publique, Touré Kaffouba.
En effet, à cette date, sur 43 établissements sanitaires urbains communautaires répertoriés par le ministère de la Santé, 13 structures n’avaient pas encore déposé leurs états de salaires émargés. Or, c’est un ‘’état collectif et non individuel’’. Ce n’est que le 16 avril 2018 que l’ensemble des états a été déposé malgré le courrier d’interpellation du DAF. « Voilà l’une des situations, auxquelles nous sommes confrontés », indique-t-il. Sur la liste des 13 retardataires on peut citer, entre autres, les établissements de la Palmeraie, d’Anonkoua-Kouté, de Kouamassi-quartier, de Gonzagueville. Par ailleurs, le responsable de la sous-direction du recouvrement des coûts, des actes de la santé et la mobilisation des ressources a conseillé que ces structures prennent exemple sur les autres, notamment celles de Yopougon-Andokoi, Ouassakara-Attié, Vridi 3-Pointe des Fumeurs, PK 18 Agoueto, Abobo-Avocatier (Henriette Konan Bédié) qui conduisent bien ‘’la mesure’’.
Le respect du chronogramme pour pallier cet état de fait. À ce jour, rassure M. Guéyo, il n’y a pas de problèmes de trésorerie, le Trésor public a finalisé le virement des salaires. Les trois trésoreries générales d’Abidjan notamment, Abidjan-nord (Yopougon et Abobo), Abidjan-centre (Cocody, Plateau, Adjamé et Bingerville), et Abidjan-sud (Marcory, Treichville, Koumassi, Port-Bouët et Vridi) sont fin prêtes, ainsi que les trésoreries principales. « Le problème qui revient chaque fois est lié à une question de procédure à savoir le retard accusé par les ESCOM dans la transmission des états de salaires à la DAF et non une question de disponibilité des fonds », précise notre interlocuteur.
Dans les prochains jours, le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique et le confédéral vont arrêter des mesures afin de trouver une solution définitive à la situation. Il s’agira du respect de la date du dépôt des états par toutes les structures ‘’chaque 5 du mois en cours.’’ . « Ensemble, nous allons décider du choix d’un interlocuteur au niveau des ESCOM pour le suivi.»
Cette disposition permettra de mieux situer les responsabilités et d’éviter des interprétations en déphasage avec la réalité. Mieux, il coupe court à certaines rumeurs qui accusent les responsables de garder l’argent sur leur compte afin de partager les ristournes. « Le salaire de chaque agent est versé directement sur son compte à la banque par le Trésor Public. Dès que le dépôt est fait, il reçoit un sms sur son téléphone cellulaire.»
Il est trop tôt d’affirmer que désormais tous les différents points de revendication du personnel des établissements sanitaires communautaires de Côte d’Ivoire sont résolus.
Après le paiement des 4 mois d’arriérés de salaires, les PCA devront faire face au rappel de la prime d’ancienneté de leurs employés qui est de 1% chaque année sur le salaire des employés.
Sériba Koné
kone.seriba67@gmail.com
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