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Révision constitutionnelle/Jusqu’où ira Ouattara ?


Coalition de l'opposition ivoirienne BONAbidjan-04-07-16 (lepointsur.com) Officiellement ouvert par la société civile ivoirienne, singulièrement l’ONG CIVIS-CI en collaboration avec la Fondation Friedrich Naumann, le débat sur la réforme constitutionnelle bat son plein. Le 30 juin 2016, 23 partis de l’opposition, dont le Front Populaire Ivoirien (FPI), ont demandé le retrait du projet de la nouvelle Constitution. Au moment où l’on s’achemine allègrement vers le mois de novembre prévu pour le référendum, nombreux sont les observateurs qui se demandent ce que va faire le président de la République Alassane Ouattara, à l’origine du projet.

En organisant un panel de haut niveau sur le thème « Réforme constitutionnelle et démocratie en Côte d’Ivoire : Comment la réforme constitutionnelle peut-elle permettre un meilleur enracinement des valeurs démocratiques et d’Etat de droit ? » avec des leaders de partis Politiques, la société civile, des organisations de jeunesse et des représentations diplomatiques accréditées en Côte d’Ivoire, CIVIS-CI, présidée par Dr Kouamé Christophe caressait le secret espoir de sensibiliser les acteurs nationaux et les acteurs internationaux sur la nécessité d’un engagement dans un processus participatif, pluraliste, démocratique, transparent et consensuel de réforme constitutionnelle.

Dr Christophe Kouamé, président de CIVIS-CI et ses collaborateurs ont décidé de donner un coup d'accélérateur à la démocratie en Côte d'Ivoire. Ph. Dr

Dr Christophe Kouamé, président de CIVIS-CI et ses collaborateurs ont décidé de donner un coup d’accélérateur à la démocratie en Côte d’Ivoire. Ph. Dr

C’est d’ailleurs, pour cette raison que Dr Kouamé Christophe,  Président de l’ONG, a relevé les  trois raisons qui  ont motivé l’organisation de l’atelier : “il s’agit d’abord de la paix sociale relative et de la croissance économique soutenue, puis de la lente amélioration des conditions de vie malgré les efforts du gouvernement et enfin la modification récurrente de la Constitution par certains Chefs d’Etat africains en fin de mandat.” Non sans dénoncer la prédominance du pouvoir exécutif sur le législatif et le judiciaire, qui a pour conséquence l’insuffisance de l’application de l’Etat de droit.

Cet avis est partagé par Madame Sophie Koné, représentant la Fondation Friedrich Naumann, qui pense que cet atelier  devrait permettre de donner une réponse aux attentes d’un peuple avide de cohésion sociale, de paix, de liberté et de stabilité en vue de la construction d’une société plus juste. On peut le dire. Par cette initiative, Christophe Kouamé, président exécutif de Civis-Ci  et ses collaborateurs et partenaires veulent informer les citoyens sur les mécanismes et procédures de la révision de la Constitution et plaider auprès des acteurs nationaux  pour la prise en compte participative, pluraliste, démocratique, transparent et consensuelle des populations.

Du caractère anti-démocratique du projet, selon l’opposition…

En rejetant le projet du président Alassane Ouattara, l’opposition ivoirienne entendait là dénoncer,  le caractère anti-démocratique de la décision.

Primo : sur le fond, la coalition s’est insurgé contre  les principaux points du projet. « La nomination d’un vice-président par le chef de l’Etat est une dérive monarchique qui permettrait à Alassane Ouattara de choisir son successeur. Idem pour  la création d’un Sénat dont le tiers serait nommé par le président. » Dénonce-t-elle.

Secundo : la forme n’a non plus pas été épargnée par ladite coalition qui a remis en cause la méthode proposée par le Président Alassane Ouattara  qui consiste à un travail préliminaire d’un comité d’experts que lui-même a mis en place, dont le texte émanant sera soumis au Conseil du gouvernement, avant d’atterrir sur la table du  Conseil des ministres pour passer à l’appréciation des députés, pour enfin être soumis à référendum  en septembre ou octobre. Pour autant, propose-t-elle un débat constitutionnel rassemblant toutes les couches de la nation.

Le comité d'experts mis en place par le président de la République est contesté par les opposants ivoiriens. Ph.dr

Le comité d’experts mis en place par le président de la République est contesté par les opposants ivoiriens. Ph.dr

Pire, les 23 partis qualifient de danger, le projet qui « menace la paix et la stabilité » d’un pays qui selon eux, connaîtrait une résurgence des violences et des frustrations. Au total pour la coalition, le moment pour élaborer une nouvelle Constitution est donc inopportun. Parce ce que  les conditions ne seraient  pas réunies tant que la société ivoirienne reste divisée. « Le pays n’est pas encore sorti totalement de la crise de 2010-2011, avec les nombreux prisonniers politiques, les procès interminables, qui continuent d’entretenir la rancœur et la frustration. Sans compter les nombreux exilés », indique  Pascal Affi N’Guessan, président du FPI, signataire de la déclaration. La situation nationale est telle que nous considérons que ce n’est pas le moment pour engager un processus qui devrait rassembler tous les Ivoiriens de manière à ce que la nouvelle Constitution nous permette d’éviter les erreurs du passé. Nous appelons le chef de l’Etat à renoncer à cette initiative et à créer les conditions pour que dans l’avenir, nous puissions, avant les élections de 2020 en particulier, si tous les Ivoiriens le désirent, fonder la nouvelle Côte d’Ivoire. » A renchéri le patron des refondateurs.

De la réplique du pouvoir ivoirien

Comme il fallait s’y attendre, la réaction des tenants actuels du pouvoir d’Etat ne s’est pas fait attendre. L’entourage du président  pense au contraire que le moment est on ne peut  plus arrivé pour doter la Côte d’Ivoire d’une nouvelle Constitution. « Dans dix ans, on pourra continuer à dire que ce n’est pas le moment opportun, parce qu’il y aura encore des problèmes non résolus au niveau de la nation, souligne-t-il. Il n’y a aucune nation qui n’ait complètement résolu ses problèmes avant d’aller travailler sur une Constitution. Bien au contraire, le bon moment pour travailler sur une Constitution, c’est justement le moment où il y a des difficultés. Et chacun sait que la Constitution précédente a créé à notre pays d’énormes problèmes. Beaucoup de difficultés que la Côte d’Ivoire a traversées au cours des dix, quinze dernières années, sont venues malheureusement de cette Constitution-là. Le chef de l’Etat entame un deuxième mandat, je ne vois pas quel moment peut être plus opportun pour cet exercice. » Martèle-t-il.

Qui du président de la République et de l’opposition politique et de la société civile significative ivoirienne aura le dernier mot ? Le pouvoir, va-t-il tenter un coup de force comme l’indique l’opposition ivoirienne ? Le président Alassane Ouattara et son camp vont-ils reculer ? Autant de questions que se posent nombre d’observateurs. Toujours, est-il que les semaines à venir réservent bien des surprises.

EKB

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