Prikro-Famienkro/ Le roi détenu en prison, des populations toujours terrées dans les forêts #civ
-Les images de l’incendie des maisons après le passage des forces de l’ordre
Abidjan, le 2-8-15 (lepointsur.com)-Le conflit foncier qui oppose les populations des villages de Famienkro, Timbo et Groumania au ministère de l’Agriculture, via la Compagnie hévéicole du Cavally (CHC) est loin de connaître son épilogue, tant les révélations les unes aussi troublantes que les autres de la mutuelle des 8 villages (MUDECO) finissent par convaincre que le ministère de l’Agriculture entretient le flou. Sans compter le silence troublant des rois et chefs coutumiers de Côte d’Ivoire.
Prikro(Famienkro) : Litige foncier villageois-Gouvernement ivoirien/Terrorisés et traumatisés les populations fuient les villages #civ
Le silence troublant des rois et chefs coutumiers
Les affrontements violents et sanglants de Famienkro dans le département de Prikro entre les forces de l’ordre (gendarmerie) et les populations opposé au projet hévéicole HPC commencent à livrer ses secrets avec des images effroyables d’incendie de village, du retrait des populations dans les forêts et de l’incarcération du roi. Nous écrivions que dans la nuit de mercredi 22 juillet au petit-matin de jeudi 23 juillet 2015, aux environs de 2 heures, des agents de la Brigade de la gendarmerie de Priko auraient fait une descente musclée dans les villages de Faminekro et Kofesso. Le bilan selon des sources riveraines était lourd. Des verrous de maisons défoncées, certaines incendiées. Le chef du village de Kofesso et deux de ses notables, ainsi que certains habitants de Famienkro ont été interpellés pour nécessité d’enquête selon le Commandant de la gendarmerie joint par téléphone dans l’après-midi. La reine-mère, Ouattara Nazata dite Angbo Nazata et le roi de Famienkro Nanan Akou Morou II ainsi qu’une trentaine de personnes sont encore détenus à la prison de M’Bahiakro.
Le 31 mai 2012, la Mudeco qui regroupe les 8 villages concernés par les parcelles de terrain qui font l’objet de conflit après avoir pris connaissance du courrier du ministère de l’Agriculture informant les villageois du projet de la Compagnie hévéicole du Cavally (CHC) a à son tour répondu, au sortir d’une Assemblée générale (Ag).
« Nous avons accusé réception de votre courrier du 11 novembre 2011 portant sur la Compagnie Hévéicole du Cavally (CHC) et sur la mission conjointe du ministère de l’Agriculture et de l’Economie et des Finances ‘’pour s’entretenir avec toutes les populations concernées par les parcelles’’. Sans que la date ne nous soit précisée, nous avons eu la chance d’assister à cette rencontre le 09 décembre 2011 dernier, et c’est avec un réel plaisir que nous avons entendu M. Touré du ministère de l’Economie et des Finances (chef de mission) dire aux parents que contrairement à ce que la CHC a voulu faire croire le 15 août 2011 à Famienkro , il n’y a aucun contrat entre l’Etat de Côte d’Ivoire et cette société qui est d’ailleurs allée en prospection personnelle .» Telle est en partie, le contenu du courrier d’accusé réception des villages concernés par le litige foncier.
Par ailleurs, ladite correspondance fait des précisions quant à la position des villageois. « En réponse, les populations, notamment celles de Koffesso, Timbo, Sérébou et même les femmes et les jeunes de Famienkro ont exprimé leur refus de céder ces parcelles à la CHC (comme vous le confirmeront les rapports de la délégation interministérielle et du préfet de Prikro). En additif aux différentes réponses données à la mission et comme le village de Koffesso l’écrivait à votre prédécesseur le 26 octobre 2006 et étant donné que l’Etat de Côte d’Ivoire recherche pour les populations ce qu’il y’a de mieux pour leur bien-être, nous avons le plaisir de vous informer qu’en accord avec les populations concernées, la SAPH va louer lesdites parcelles à des conditions trouvées plus intéressantes.10.000 FCFA/ha/an pendant la phase végétale ; 4.000 FCFA/ha/an pendant la période productive en plus de 15% des bénéfices annuels, sans oublier l’aide à la création de plantations villageoises. » Renchérit le courrier des populations. Non sans préciser les autorités administratives, notamment le Préfet et le sous-préfet de Prikro ainsi que le sous-préfet de Famienkro ont été verbalement été informées fin août 2011 dans le bureau du préfet de Prikro par les populations villageoises.
La préoccupation des villageois n’a pas été prise en compte
S’il est vrai que l’objectif du gouvernement ivoirien est d’œuvrer pour le bien-être des populations, alors, d’où vient-il que la position des villageois n’ait pas été prise en compte dans le cadre du règlement de ce conflit ? La question mérite d’être posée quad on sait que les villageois ont clairement mentionné qu’ils optaient pour les propositions de la SAPH qu’ils trouvaient meilleurs pour eux, compte tenu des avantages qu’ils pouvaient en tirer. Faisant fi de leur avis et propositions, le gouvernement qui soutient pourtant œuvrer pour leur mieux-être leur impose la CHC. N’est-ce pas d’ailleurs pour cette raison que le président du comité inter-village M. Sinan Ouattara souligne dans le même courrier « Nous sommes convaincus que le Gouvernement est d’avis avec nous que ce que nous recherchons tous, c’est en priorité ce qu’il y’a de mieux pour les populations, surtout rurales. » Au demeurant pour prévenir des conséquences regrettables, comme c’est le cas actuellement, M. Mama K. Sinan, assistant du Président de la République, fils de la région interpellant les autorités a souhaité que « le problème soit régler avec tact et lucidité dans l’intérêt supérieur des populations riveraines. »
Le silence troublant des rois et chefs traditionnels
Interpellés pour nécessité d’enquête selon le Commandant de la gendarmerie de Prikro Karamoko Ladji, le roi de Famienkro et certains de ses proches ont été déférés à la prison de M’Bahiakro selon des sources proches du dossier. C’est un secret de polichinelle. Après son accession à la magistrature suprême, l’actuel tenant de l’exécutif ivoirien Alassane Ouattara a redoré le blason des rois et chefs traditionnels de Côte d’Ivoire en leur donnant un statut qui leur permet désormais d’être consultés au même titre que certaines autorités administratives. Le président de l’Association des rois et chefs coutumiers de Côte d’Ivoire est le roi d’Agnibilékrou, Nanan Agnini Bilé II, roi du Djuablin. De sources proches des villageois de Groumania, Sékrébou, Famienkro…dès le déclenchement du litige foncier le président des rois et chefs coutumiers de Côte d’Ivoire Nanan Agnini Bilé II a été saisi en vue de trouver une issue heureuse pour toutes les parties.
Jusqu’à ce jour, les villageois se demandent encore si des démarches ont été effectivement faites dans ce sens. Ne voulant donc pas restés les bras croisés, ils ont saisi Nanan Trei-Dê, roi des Berbô (dans le Zanzan) pour sa médiation suite à l’arrestation du roi et du chef du village de Groumania, N’Djoré Yao Kassoum. C’est donc dans l’anxiété et la peur que les populations qui auraient déserté les villages concernés, de peur d’être arrêtés vivent désormais. « Les populations sont terrorisées et traumatisées par tout ce qui leur est arrivé et surtout au roi, à la reine-mère et au chef du village de Groumania. Aujourd’hui, samedi (Ndlr : 1er août 2015) nous avons appris la libération de 16 prisonniers. Nous ne savons pas si c’est la vérité, parce que personne ne veut se faire voir, de peur d’être arrêté par les gendarmes. Aussi, nous n’avons aucune nouvelle du roi et de ses proches qui sont en prison à M. Bahiakro. Je vous assure qu’au moment où, je vous parle, il n’y a plus personne dans les villages concernés. Tous les villageois ont fui pour se refugier dans la brousse. En tout cas, nous avons tous peur. Il faut que le Président de la République fasse quelque chose pour nous, si les rois et autres chefs traditionnels ne veulent rien faire pour nous… » A dit ce villageois, visiblement traumatisé sous le sceau de l’anonymat. Comme ce villageois, ils sont nombreux les observateurs qui s’interrogent quant au silence, à tout le moins curieux de Nanan Agnini Bilé II et de ses pairs ; dont l’intermédiation est sollicitée par les habitants des villages concernés. En tout cas, l’attitude des dépositaires des us et coutumes de Côte d’Ivoire est curieuse.
EKB
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