Actualite, Contribution, Point de vue, Point Sur

Plaidoirie pour la paix, la Côte d’Ivoire joue sa crédibilité et son avenir (communiqué)


Jean-Baptiste PANY, Sénateur, élu de la République de Côte d’Ivoire plaide en faveur de plusieurs points pour une présidentielle apaisée en Côte d’Ivoire. Ci-dessous l’intégralité de sa plaidoirie.

À trois mois de l’échéance constitutionnelle prévue pour l’élection du nouveau Président de la Côte d’Ivoire pour les cinq années à venir, le pays, comme à ses habitudes, est pris dans un tourbillon d’inquiétudes, de menaces, de fourberies et de calculs politiciens.

Tout y passe, la raison et le respect des règles librement fixées semblent ne plus être les repères individuels et collectifs.

Face au tintamarre auquel nous assistons aujourd’hui en Côte d’Ivoire, notre indifférence pourrait être interprétée comme une complicité condamnable aux mêmes peines que les principaux coupables, pour les déviations observées.

C’est pourquoi, en ma qualité de Sénateur, élu de la République de Côte d’Ivoire, une fois de plus je joins ma voix à celles de nombreux ivoiriens responsables, qui m’ont précédé sur le chemin de l’interpellation du Président de la République et de ses collaborateurs pour dire ceci :

‘’Face au tintamarre auquel nous assistons aujourd’hui en Côte d’Ivoire, notre indifférence pourrait être interprétée comme une complicité condamnable aux mêmes peines que les principaux coupables, pour les déviations observées.’’

1 – Après deux mandats à la tête de notre pays, sauf à se laisser aveugler par un parjure irresponsable, aucune loi ne permet au Président de la République sortant de se porter candidat pour un troisième mandat présidentiel. C’est un fait abondamment démontré par tous nos juristes encore crédibles, sans exception.

Le Président de la République ne peut donc pas défier notre loi suprême, ni être poussé impunément par une certaine élite politique, à violer la Constitution de la République de Côte d’Ivoire.

2- Si le Chef de l’Etat peut, sans gêne et aussi simplement, prétendre impunément violer notre loi suprême, quel autre engagement national ou international pourrait-on encore mettre à l’abri du viol en Côte d’Ivoire ?

3 – Par ailleurs, dans cette confusion artistique où certains candidats déclarés ou pressentis sont menacés d’exclusion, de procès politiques sans issue au plan national, d’emprisonnement ou d’exil forcé, le recours à l’arbitrage du Conseil Constitutionnel est savamment suscité par certains. Curieusement, tous sont membres du RHDP-RDR. Dix ans après la crise post-électorale de fin 2010, cette élite espère sans doute que la mémoire des ivoiriens aurait oublié que c’est ce clan politique qui avait refusé le verdict du Conseil Constitutionnel alors dirigé par le Professeur Yao Paul N’Dré. Franchement, quel crédit attend-on encore du Conseil Constitutionnel quand on sait qu’il pourrait être taxé d’être à la solde d’un clan?

‘’J’implore tous les guides religieux et les autorités coutumières afin qu’ils assistent utilement notre Cher Président de la République en vue de l’emmener à garder le cap, malgré les vagues, et surtout pour lui éviter une humiliation ainsi qu’à la Côte d’Ivoire.’’

La Côte d’Ivoire a besoin de paix et de réconciliation vraie. Elle a aussi besoin de rassurer la Communauté internationale ainsi que tous les partenaires au développement en ce qui concerne ses propres mécanismes internes dédiés au respect inéluctable de ses engagements tant nationaux qu’internationaux.

J’en appelle donc à la raison du Chef de l’État, le Président Alassane Ouattara pour :

– Le respect de notre Constitution sans ruse politicienne;

– La libération de tous les prisonniers politiques et militaires ;

– L’abandon des peines contre tous les leaders politiques et contre certains de leurs partisans encore poursuivis;

– Mettre un terme aux harcèlements judiciaires dirigé contre les personnalités de l’opposition, ou soupçonnées comme telles;

– Le retour des exilés politiques ;

– L’organisation d’élections présidentielles transparentes, crédibles et ouvertes à tous ;

– L’application des décisions de la Cour Africaine des droits de l’Homme et des Peuples (CADHP);

– L’abandon des critères non constitutionnels et non consensuels imposés aux candidats aux élections présidentielles, à trois mois des échéances électorales. Il s’agit notamment du critère du parrainage qui manifestement viole le secret du vote protégé par notre Constitution.

J’implore tous les guides religieux et les autorités coutumières afin qu’ils assistent utilement notre Cher Président de la République en vue de l’emmener à garder le cap, malgré les vagues, et surtout pour lui éviter une humiliation ainsi qu’à la Côte d’Ivoire.

Je supplie tous les amis de la Côte d’Ivoire, notamment les chancelleries établies chez nous, à ne pas demeurer indifférents à la tragédie qui guette la Côte d’Ivoire.

La Constitution ayant vocation à être appliquée telle qu’elle est écrite et non à être interprétée, je voudrais terminer ma plaidoirie en empruntant quelques pensées au Président du Conseil Constitutionnel actuel, Mamadou KONÉ, extraites de son discours du 03 novembre 2015 lors de l’investiture du Président Alassane Ouattara, pour dire ceci:

1- « instruits de l’expérience du passé, nous devons en éviter les erreurs »;

2 – Ceux d’entre nous qui ont encore l’avantage de parler à l’oreille du Président de la République, doivent nécessairement lui demander de donner tort à ceux qui lui demandent d’engager la Côte d’Ivoire dans une aventure périlleuse.

Car «le peuple ivoirien sait avec précision le contrat social qui le lie à lui ». Si vous le laissez céder à la tentation du troisième mandat, au final le Peuple aura tout comme moi aujourd’hui, «le sentiment désagréable d’avoir été entrainé malgré lui dans un traquenard » avec cette fameuse Constitution votée le 08 novembre 2016.

Nous sommes nombreux à penser que personne ne doit hésiter à suivre le Peuple souverain de Côte d’Ivoire dans la rue s’il le faut, si le Président de la République, garant de l’application de la Constitution aux termes des articles 54 et 58, s’entête à violer son serment.

Jean-Baptiste PANY

Sénateur, élu de la République de Côte d’Ivoire.

Commentaires

commentaires