Jeannot Ahoussou Kouadio sur Rfi : ‘’La nomination d’un vice-président par le Président de la République n’est pas antidémocratique’’
En Côte d’Ivoire, « le projet de nouvelle Constitution proposé par Alassane Ouattara est un recul démocratique », a affirmé le FPI pro-Gbagbo. Réaction aujourd’hui d’un proche du président Ouattara : Maître Ahoussou-Kouadio a été son Premier ministre et aujourd’hui, il est son ministre d’Etat en charge du Dialogue politique et des Relations avec les institutions. Répondant aux questions de Christophe Boisbouvier, le vice-président du Pdci soutient que la nomination d’un vice-président.
RFI : Cinq jours pour décortiquer 184 articles à l’Assemblée nationale, est-ce que ce n’est pas un peu court ?
Maître Ahoussou-Kouadio : Je ne pense pas que ce soit court parce que les grandes orientations du texte étaient partagées, et par les membres du gouvernement et par le président de l’Assemblée nationale. Je ne pense pas que cinq jours soient courts.
Le projet a été rédigé par un comité d’experts et non pas par une assemblée constituante et du coup beaucoup d’Ivoiriens sont choqués par cela ?
Mais je suis vraiment désolé, en 2000, c’était un groupuscule de personnes qui a été constitué, ils n’avaient aucune légitimité, ils nous ont proposé un texte qui est passé directement au référendum. Et cette fois-ci, un comité d’experts a rédigé un projet de texte, ce projet de texte a été analysé par le gouvernement, par l’Assemblée nationale. Et je suis vraiment désolé, j’écoute des grands juristes qui disent que ce qui s’est passé au comité des experts n’a aucune crédibilité, mais n’oublions pas que le texte a subi l’épreuve de l’Assemblée nationale qui est légitime.
Mais tout de même, les critiques de l’ancien président du Conseil constitutionnel, le professeur Fancis Wodié, ça ne vous gêne pas ?
Mais quelles critiques ? Parlez de constituante, mais il ne sait ce qu’il appelle constituante. Vous savez, le professeur Wodié, il y a des constants dans ses critiques parce que même la Constitution de 1960, de novembre 60, déjà il la critiquait. Mais pour nous, c’est une véritable nouvelle Constitution qui prend en compte la question des droits de l’homme parce que ça, on n’en parle pas suffisamment, qui prend en compte la parité homme – femme. C’est donc une Constitution d’avenir, une Constitution moderne.
Vos opposants disent qu’ils n’ont pas confiance, car vous ne respectez pas la loi, la preuve, disent-ils, le chef de l’Etat contrairement à la Constitution, refuse de déclarer son patrimoine et continu de présider un parti politique ?
Je pense qu’ils devraient se poser eux-mêmes la question, eux qui ont violé la Constitution pendant dix ans. Le mandat présidentiel c’était de cinq ans. Le président Ouattara, j’affirme, a fait sa déclaration de patrimoine à la Cour des comptes, il a déposé cela. Nous, on est transparents, on ne fait pas dans l’hypocrisie.
L’une des principales nouveautés de cette future Constitution, c’est la mise en place d’un poste de vice-président. Mais en attendant la présidentielle de 2020, le premier vice-président de la future troisième République sera nommé par l’actuel chef de l’Etat. Est-ce que ce n’est pas antidémocratique ?
Je ne pense pas que ce soit antidémocratique, d’autant plus que la loi fondamentale sera adoubée par la population, le peuple va voter la Constitution donc le peuple va lui donner la permission de le faire.
Autre innovation, la mise en place d’un Sénat. Un tiers des sénateurs seront nommés par le chef de l’Etat, est-ce que ce n’est pas contraire au principe de la séparation des pouvoirs entre l’exécutif et le législatif ?
Ce n’est pas la première fois qu’on le fait dans le monde. Au Canada, cela existe, les sénateurs sont nommés par le gouverneur général depuis plus d’un siècle. En Algérie, le tiers des sénateurs est nommé par le président de la République. Donc la séparation n’est pas étanche. Nous sommes aujourd’hui dans un pays en reconstruction donc tout ce qui peut être compétence, capacité à apporter pour la constitution du pays faut utiliser toutes les ressources d’où qu’elles viennent. Même les ressources humaines de l’opposition seront utilisées. On va laisser la possibilité au président Alassane Ouattara de pouvoir choisir, je donne un nom, comme le professeur Mamadou Koulibaly qui, nous le savons, réfléchit beaucoup et a de bonnes idées.
L’ancien président de l’Assemblée nationale.
L’ancien président de l’Assemblée nationale qui a perdu les élections en 2011. Ca m’étonnerait qu’il puisse être réélu à un suffrage quelque part comme député, mais pourra être proposé au Sénat. S’il accepte, il viendra avec ces idées pour permettre à la Côte d’Ivoire d’avancer.
Pas de changement au Conseil constitutionnel, trois des six membres de cet organe resteront nommés par le chef de l’Etat. Mais, quand on se souvient du poids politique de ce Conseil lors de la présidentielle Gbagbo – Ouattara de 2010, est-ce qu’on ne peut pas regretter que cet organe reste dépendant du pouvoir exécutif ?
Non. Le Conseil constitutionnel n’est pas dépendant du pouvoir exécutif, c’est une institution totalement libre et indépendante.
En tout cas, il ne l’a pas vraiment été en décembre 2010 ?
En décembre 2010, mais vous savez, l’indépendance dépend des individus.
Ca ne dépend pas aussi des nominations ?
Pas forcément, on peut vous nommer et puis vous affichez votre indépendance.
Au Conseil constitutionnel comme à la Cour suprême, comme au Sénat, le chef de l’Etat, quel qu’il soit aura un fort pouvoir de nomination. Est-ce que ce n’est pas lui donner des pouvoirs exorbitants ?
Mais cela a toujours existé ici et les magistrats de la Cour suprême sont très indépendants, amoureux de leur indépendance.
Dans la future Constitution, si elle est adoptée le 30 octobre, les règles d’éligibilité à la présidence seront moins strictes qu’avant, du coup elles sont trop permissives disent les dirigeants du FPI ?
Je pense que les gens du FPI, qu’ils arrêtent d’affabuler. J’ai écouté hier matin on parlait, on disait pourquoi est-ce qu’on a fait lever le plafond quant à l’âge pour être candidat, c’est le seul article qui a été rédigé à Marcoussis et signé même par le FPI. Je crois qu’en levant le plafond, demain, j’espère bien si le président Gbagbo finit de purger sa peine de prison, il pourra devenir candidat. Alors le FPI n’a pas être contre.
Et Alassane Ouattara aussi pourra être candidat en 2020 du coup ?
Le président de la République Alassane Ouattara est un homme de parole. Il a suffisamment affirmé, et dernièrement devant la communauté internationale, en face des ambassadeurs, il a dit qu’il ne sera pas candidat en 2020, qu’il prépare la génération future. Lui et son ami Henri Konan Bédié préparent les jeunes pour continuer le travail qu’ils ont commencé ensemble.
Source : Rfi