Vous êtes nombreux à demander mon opinion sur la nomination du français Michel Dussuyer à la tête dės Eléphants. Je vais être franc avec vous: C’est une désignation qui relève de la responsabilité de la fédération ivoirienne de football. De tout temps, en tout cas depuis l’ère Jacques Anouma, le comité exécutif nomme l’entraîneur national. Sidy Diallo n’a pas innové. La seule fois qu’il a dérogé à la règle,en 2012, en désignant sans concertation préalable avec le comité exécutif, Sabri Lamouchi, il a affronté le mécontentement généralisé en Côte d’Ivoire. Après l’échec au mondial 2014 au Brésil, il est revenu à ce qui toujours été le mode opératoire. Hervé Renard a été désigné dans des conditions plus ou moins transparentes et surtout acceptées par l’opinion sportive. Michel Dussuyer a été désigné par le même procédé. Je n’ai pas l’habitude des procès d’intention. Je juge sur pièce. Je n’ose pas mettre en doute la rigueur, la responsabilité et l’honnêteté des personnalités, membres du comité mis en place pour le choix du sélectionneur national.
Une chose est sûre cependant: la fédération ivoirienne de football connait ma position sur le football, sa gestion, son modèle économique, ses animateurs et surtout la formation des cadres. Les dirigeants de la fédération ivoirienne savent que notre Sport-roi va mal. Plus qu’un pansement pour sauver les apparences, il faut une thérapie de choc et en profondeur. Il faut une réflexion globale. Un entraîneur à lui tout seul ne fera pas la valeur et l’avenir de notre football. Je milite pour le long terme et non pour les victoires sporadiques. Les situations de fait. Je suis pour une vraie politique de formation qui ouvre les perspectives pour les anciens joueurs. Je suis pour que la génération Drogba intègre dans les années à venir les centres de décision et de gestion de notre sport-roi.

Challenge et piège pour Dessuyer

Michel Dessuyer? Tiens, il a servi en Côte d’Ivoire comme adjoint de Henri Michel de 2004 à 2006. Ce français de 59 ans n’est donc pas en territoire inconnu. Pas plus qu’il n’est étranger dans la sous-région. Pour avoir été entraîneur au Bénin et en Guinée.
Michel Dussuyer arrive en Côte d’Ivoire sur les traces d’un entraîneur charismatique, un gentleman, son compatriote Hervé Renard. Toute sa difficulté sera là: son rapport au vécu et à la performance du désormais entraîneur de Lille en Français. Hervé Renard a conquis les cœurs et les esprits hors des stades et à l’intérieur des stades. Il est entré dans l’histoire en Côte d’Ivoire en offrant au pays sa deuxième médaille d’or en coupe d’Afrique des nations. Il n’avait pas la meilleure équipe ivoirienne sous la main mais il a su transformer un groupe moyen en compétiteur et gagneur. Michel Dessuyer devra au moins, tenir cette comparaison. C’est un piège pour lui.
Le challenge pour lui est de prendre une équipe auréolée de son titre de champion d’Afrique. Il n’y a plus d’essai à faire. Il n’y a que des résultats à obtenir ou à confirmer. Si son agenda secret est de profiter de l’aura de la Côte d’Ivoire pour densifier son CV, il aura fait le très mauvais calcul.

La Côte d’Ivoire est sortie affaiblie, divisée de son succès de Malabo. La récupération politique de la victoire sportive, la guerre des primes impayées qui n’a pas encore livré ses dessous, la fronde des joueurs et non des moindres, les médisances ont nui à l’éclat de la réussite des Eléphants. Des cadres de l’équipe n’ont pas manqué de dénoncer l’amateurisme et le pilotage à vue à la fédération ivoirienne de football. Le premier match des Eléphants après Malabo contre le Gabon, a montré l’étendue des problèmes de l’équipe nationale. D’ailleurs la CAN2015 se poursuit toujours pour la Côte d’Ivoire: elle a quitté le stade certes mais c’est désormais la police économique et la justice qui l’arbitrent. Dossier en cours.
C’est dans cette ambiance tendue que Michel Dessuyer arrive en Côte d’Ivoire.

Il a conduit la Guinée en quart de finale de la CAN2015 en jouant contre Ebola. Il a eu un énorme sens de responsabilité en restant à la tête du Syli national malgré toutes lès difficultés. Il a su intégrer les problèmes africains dans son logiciel. Pendant 10 mois, il n’a pas perçu ses indemnités en Guinée mais il s’est montré patient. Il n’a pas fait de vagues. Peut-être le genre d’entraîneur qui convient à la fédération ivoirienne de football. Pas forcément au football ivoirien. Le football ivoirien a besoin d’un leader technique pour sa refondation. Michel Dessuyer sera-t-il cet homme? Là est toute la question.

Source:Le Blog de Fernand Dédeh

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