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Exclusif: Utilisation des ex-combattants comme vigiles, l’inexistence de l’ADDR sur les sites de regroupement/ Une affaire de gros sous pour le Commandant de la BAE, affirme le chef de casernement Binaté Moussa.


Binaté Moussa, le chef de casernement (Ph: Notre Photo)

Binaté Moussa, le chef de casernement (Ph: Notre Photo)

Depuis le cambriolage et le pillage e de son appartement au sein de la BAE dans la nuit du dimanche 23 au lundi 24 novembre 2014, et son arrestation par sa hiérarchie le jeudi 27 novembre 2014, pour être emprisonné, Binaté Moussa, le chef de casernement de ce site est activement recherché. Depuis sa cachette, il fait des révélations troublantes. Voici l’intégralité de ce qu’il a voulu nous faire partager afin que le Président de la République, chef suprême de l’armée prenne des dispositions.

« Les chefs utilisent les ex-combattants à des fins personnelles. Ces derniers leur font rentrer des millions Fcfa par mois. Ils les utilisent dans les sociétés, les plantations, les usines etc., comme vigiles avec des contrats signés en accord avec les responsables de ces entreprises. A la fin du mois, ce sont les chefs qui encaissent l’argent. Les ex-combattants, qui devraient être les vrais bénéficiaires sont obligés de mendier. Or, il existe des sociétés de gardiennage légalement reconnues en Côte d’Ivoire pour faire ce genre de travail. J’attire l’attention des autorités au plus haut niveau, afin que ceux-ci ouvrent une enquête sur la BAE, à cet effet.

Outre cela, les ex-combattants sont utilisés par les chefs pour de sales besognes. A savoir, des missions secrètes, à savoir des règlements de compte. Il faut que nos autorités ferment les sites de regroupement qui peuvent être un danger pour l’avenir. Si l’on n’y prend garde, les sites de regroupement risquent de se transformer en centres de recrutement de mercenaires, pour la déstabilisation de la Côte d’Ivoire.

Le danger dans tout ça, c’est que les différents responsables des sites disent à qui veut les entendre qu’ils sont protégés par le ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur, Hamed Bakayoko et  le Commandant des forces terrestres de Côte d’Ivoire, Gaoussou Soumahoro. Ces deux personnalités leur servent de parapluie, surtout à ‘’Gruman’’. Sinon à votre avis, il y a des sociétés de gardiennage légalement constituées, pourquoi ces sociétés n’assurent-elles pas la sécurité des personnes et des biens, plutôt que de laisser cette tâche à des ex-combattants, sans la moindre possibilité de se plaindre ?

Nous avions beaucoup d’admiration pour le Commandant Fofana Inza dit ‘’Gruman’’ quand il arrivait pour la première fois sur le site. Il tenait un langage militaire, mais quand il a découvert la richesse, le langage a changé. Il est allé jusqu’à annuler les réunions que nous tenions, parce qu’il est devenu homme d’affaires. Il a même promis à tous les responsables et encadreurs, au cours d’une réunion, qu’il allait nous remettre un peu d’argent chaque fin de mois. Il n’a jamais tenu cette promesse.

J’étais espionné au jour le jour par des éléments. Chaque fois que je recevais quelqu’un sur le site, il envoyait des éléments pour savoir l’identité de la personne. Comme je ne me reprochais rien, je n’avais aucune crainte. Seulement, il faut reconnaître que la cohabitation n’a pas été facile.

Les chefs font travailler les ex-combattants en leur miroitant l’espoir de l’obtention d’un matricule. C’est pourquoi, ils ne veulent même pas que la situation de ces derniers se règle. Il n’y a pas de délégué de l’Autorité pour le Désarmement, la Démobilisation et la Réinsertion (ADDR) sur les sites. Or, leur présence est importante pour le suivi des ex-combattants. C’est lui qui doit orienter l’ex-combattant. En principe, les délégués de l’ADDR devraient avoir des bureaux sur les différents sites où sont regroupés les ex-combattants.

Cette absence de l’ADDR est un véritable danger, parce que quelqu’un qui est en arme et qui est utilisé pour qu’à la fin il s’en sorte avec zéro franc, vous voulez qu’il fasse quoi ? Ils sont sur le carreau dans l’espoir de devenir des militaires, comme leur promettent les chefs. Quand cela dur, ces ex-combattants sont prêts à tuer pour gagner leur vie. Il y a des pères et mères parmi eux qui ont besoin de répondre aux besoins de leur famille.  

Aujourd’hui, je me suis rangé loin de tout cela parce que je suis menacé de mort. C’est pourquoi, une fois de plus, j’attire l’attention du chef de l’Etat, le Président Alassane Ouattara, par ailleurs chef suprême de l’Armée à faire vider les sites de regroupement. A Yopouon, il y a la Brigade Anti-Emeute (BAE), il y un autre site au nouveau quartier et le dernier au Km 17. Outre ces sites de regroupement de Yopougon, je sais que ce sont les mêmes choses qui se passent partout. J’aime mon pays, j’aime mon Président, j’aime les Ivoiriens c’est pour cela que j’ai tenu à faire ces révélations afin que des dispositions soient prises. Je ne nourris aucun sentiment de haine contre qui que ce soit, ce sont des vérités ».

Propos recueillis par téléphone par Sériba Koné  

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