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[Entretien] Le maire de Bin-Houyé, André Meman Narcisse, très rassurant


La commune de Bin-Houyé, à l’Ouest de la Côte d’Ivoire, a désormais un plan stratégique de développement local et un plan d’urbanisme directeur, dont la réalisation se fera sur une période de quinze (15) ans. Dans cet entretien, le maire André Narcisse Meman explique les enjeux de ces outils de développement et sa vision pour sa commune.

Abidjan, le 26-8-22 (lepointsur.com) La commune de Bin-Houyé a décidé de se doter d’un plan stratégique de développement local et d’un plan d’urbanisme directeur, dont le séminaire de restitution a eu lieu au mois d’avril 2022. Qu’est-ce qui sous-tend une telle initiative ?

La commune de Bin-Houyé a décidé de se doter de ces outils pour un certain nombre de raisons. La planification stratégique, dans la gestion moderne, est une exigence moderne pour toute organisation. Notre commune, en se dotant du plan stratégique de développement local, mais également d’un plan d’urbanisme directeur, visait deux objectifs : d’abord, tracer les sillons d’un développement harmonieux, avec l’implication de toutes les forces vives de la commune (populations, élus et cadres, les administrations déconcentrées, l’autorité administrative, la mairie, avec l’appui technique du Bureau national d’étude et de développement).

Mais nous avons compris que nous ne pouvions pas nous limiter à la commune. Il fallait prendre en compte la ville de BinHouyé, faire en sorte que le développement de la commune se fasse en tenant compte de la ville. Parce que la ville est le lieu de convergence de toutes les populations de Bin-Houyé, et c’est le reflet de notre développement économique. Et donc nous voulons que le développement de notre ville se fasse de façon disciplinée, que nous puissions programmer dans le temps les différents investissements de sorte à ce que l’occupation spatiale de notre ville ne se fasse pas de façon désordonnée. En clair, à travers ces outils, nous voulons avoir une boussole pour le développement de notre ville, et le développement harmonieux de notre commune dans son ensemble.

Quelles ont été les grandes articulations de ces trois jours de travaux qui ont marqué la restitution de ces études?

Avant de revenir sur le séminaire, il est bon de rappeler que ce séminaire est une étape du processus d’élaboration de ces études. Après avoir contracté avec le Bnetd, il a été décidé un processus qui a commencé par un atelier de lancement le vendredi 8 octobre 2021. A la suite de cet atelier, les experts du Bnetd ont fait des études sur le terrain, échangé avec les populations, les forces vives de la commune, pour connaître leurs préoccupations, avec nous-mêmes, administration, corps préfectoral, administration déconcentrée, directeurs et chefs de services techniques, directeurs départementaux, directeurs régionaux, etc.

C’est à la fin de ce travail qu’ils ont élaboré le diagnostic. Aussi bien pour le plan stratégique de développement local que pour le plan d’urbanisme directeur. Et ce diagnostic a abouti à des analyses stratégiques qui ont conclu au fait que la commune de BinHouyé a des défis. Et ces défis sont au nombre de cinq (5) : il y a le défi qui concerne l’urbanisation et le développement économique de la ville.

Le développement de notre commune a été stoppé du fait des grandes crises que nous avons connues. Il n’y a pas eu de grands investissements tant au niveau des infrastructures que des superstructures dont a besoin la ville pour son développement et pour répondre aux attentes des populations. Il y a aussi le défi de la gestion durable des ressources et du milieu naturel (la nécessité de protéger l’environnement face aux activités agricoles, orpaillages etc).

Troisième défi, c’est le renforcement des infrastructures et des services socio-collectifs (la voirie, le manque de bitume, le besoin croissant d’écoles, de centres de santé, d’électrification, d’adduction en eau potable, etc).

Quatrième défi, le développement économique local. L’économie de la région est tirée par l’agriculture qu’il faut moderniser, explorer d’autres voies telles que l’artisanat, le tourisme, des leviers sur lesquels on peut jouer pour le développement.

‘’Nous avons des sites touristiques que nous voulons promouvoir, pour attirer le maximum de personnes.’’

Dernier défi, la gouvernance locale et la sécurité. Avec les différentes crises, l’arrivée massive des frères de la Cedeao, et même des allochtones, la population est aujourd’hui diversifiée. Nous sommes une région frontalière avec le Liberia qui a connu une grave crise comme nous, avec pour effets collatéraux la question de la sécurité et de la gouvernance qui sont des questions sérieuses auxquelles BinHouyé doit faire face. La construction de commissariats, de brigade de gendarmerie, la réhabilitation de la résidence du sous-préfet, sont autant d’enjeux qui appellent la création d’un mécanisme pour maintenir la paix et la cohésion entre les populations qui sont de plus en plus nombreuses. Voici les cinq (5) enjeux majeurs identifiés par le Bnetd.

Et à la suite de cela, des propositions ont été faites et les ateliers ont tourné autour de quatre (4) thématiques : d’abord, la question de la gestion durable des ressources, ensuite le renforcement des infrastructures et des services collectifs, le développement économique local, l’amélioration de la gouvernance locale et la sécurité. Et bien sûr, la question de l’urbanisation a été traitée à l’intérieur de tous ces ateliers, mais prioritairement dans l’atelier sur le renforcement des infrastructures et des services collectifs.

Voici les thématiques abordées dans les quatre (4) commissions qui ont vu la participation de toutes les composantes : les populations (femmes, jeunes), les partis politiques représentés au plan local (Rhdp, Pdci, le Fpi, Ppa-Ci), administrations déconcentrées: Directions régionales, départementales, chefs de services de Bin-Houyé, les cadres, les élus, tous représentés à ces ateliers qui ont posé le diagnostic et proposé des actions pour le développement de notre commune.

Les défis ainsi identifiés, que peut-on retenir au titre des résolutions adoptées aux termes des réflexions ?

Au terme de ces travaux, ce sont 65 objectifs stratégiques qui ont été identifiés. De même 330 actions concrètes ont été retenues, dont 182 actions prioritaires. Et il est bon de préciser que ce travail doit se faire sur une période de quinze (15) ans. En résumé, au niveau de chaque atelier, des propositions pertinentes ont été faites. Au niveau du développement économique de la commune, des propositions ont faites pour faire en sorte que des activités comme l’artisanat, ou le tourisme puissent être promus, développés, pour venir en appoint des activités que nous connaissons traditionnellement comme l’agriculture (hévéa, cacao, café, riz, etc); de même que la modernisation de l’agriculture, faire en sorte que le programme national d’investissement agricole puisse servir à la commune de BinHouyé. En clair, il faut diversifier notre économie.

Au plan des infrastructures, une recommandation forte a été faite, qui est même une exigence : le bitumage de la voie Toulepleu – Zouan-Hounien via Bin-Houyé. C’est quelque chose de fondamental. La route précède le développement, a-t-on coutume de dire. Et donc, tout ce que nous allons faire, toutes les propositions, toutes les initiatives ne sauraient véritablement prospérer si cette route n’est pas réalisée. Or cela ne dépend pas de nous. Le bitumage de cette voie dépend de l’Etat de Côte d’Ivoire. Et c’est le lieu pour nous de demander au chef de l’Etat, S.E.M. Alassane Ouattara et au gouvernement du Premier ministre Patrick Achi, qui sont déjà informés de cette situation et qui y travaillent, de faire en sorte que les délais soient raccourcis, toute chose qui pourrait booster le développement de notre commune.

Au niveau des infrastructures, les actions qui sont souhaitées, c’est par exemple la construction d’un deuxième château d’eau à Bin-Houyé, parce que la population de la ville est en train de croitre, la construction d’un centre technique pour occuper, former les jeunes.

Un pont entre la Côte d’Ivoire et le Liberia est souhaité pour booster l’économie de la région, à travers les échanges qui pourraient être accentués entre les populations des deux pays. En ce qui concerne la gestion durable de nos ressources, la sensibilisation des populations qui doivent mener les activités agricoles en tenant compte de la préservation de notre environnement, les amener à adopter l’agroforesterie comme solution, que les activités minières se mènent en protégeant notre écosystème. Parce qu’aujourd’hui avec l’orpaillage clandestin, on utilise des substances qui sont destructrices pour l’environnement (pour le sol, le sous-sol, mais aussi pour la nappe phréatique), en tous cas les populations doivent être sensibilisées pour éviter que nous détruisions notre environnement.

En ce qui concerne l’amélioration de la gouvernance locale, BinHouyé doit disposer, dans l’urgence, d’un commissariat et d’une brigade de gendarmerie pour que la sécurité soit de mise.

Il faut réhabiliter les bâtiments administratifs tels que le trésor, la résidence du sous-préfet. Bin-Houyé doit se doter d’une Hôtel de ville digne de ce nom, tout cela participe de l’affirmation de l’autorité. Voici, pêle-mêle quelques actions retenues, et dont la mise en œuvre porte sur une période de 15ans.

En lançant un plan stratégique de développement et un plan d’urbanisme directeur sur 15 ans, il est clair que vous rêvez grand pour votre commune. Parlez nous un peu de ce rêve…

Notre vision, n’est plus la vision du maire. Traduite dans ce plan, elle est devenue la vision des populations de Bin-Houyé. Après le séminaire de restitution, nous avons arrêté une vision collective. Et cette vision est intitulée ‘’Bin-Houyé, territoire durable, pôle agro-économique moderne, vitrine touristique du Tonkpi à l’horizon 2037’’.

Vous verrez que dans cette vision, il y a trois idées majeures. La première idée, c’est que Bin-Houyé s’engage désormais de façon claire et nette et affiche sa volonté de faire de la question de la protection de l’environnement, de la question de la durabilité une préoccupation. Et donc comment faire en sorte

que des actions économiques soient menées mais en tenant compte des intérêts des générations futures. Parce que nos populations ont compris que ce n’est plus une question réservée à d’autres nations, à d’autres types de populations. Mais que, elles aussi, en subissent les conséquences au quotidien. Donc, nous avons pris clairement l’option de faire de la question de l’environnement une préoccupation essentielle.

La deuxième idée forte qui ressort de cette vision, c’est que nous voulons faire le développement économique de notre localité.

Nous voulons en faire une localité moderne mais en nous appuyant sur ce que nous avons, qui est notre potentiel : l’agriculture. Donc nous voulons être un pôle agricole en modernisant davantage l’agriculture. Faire en sorte qu’elle apporte une valeur-ajoutée, qu’elle soit attractive pour les jeunes. Le dernier point important, c’est que nous voulons être une vitrine touristique du Tonkpi.

C’est un rêve mais c’est un engagement ferme. Et nous avons du potentiel dans ce domaine. Nous pensons que l’agroforesterie, par exemple, que nous voulons développer, ce sont des activités qui peuvent attirer.

Nous avons des sites touristiques que nous voulons promouvoir, pour attirer le maximum de personnes. En sommes, voici les trois idées fortes qui ressortent de notre ambition. Et je pense que tel que les choses ont été conçues, je ne crois pas que ce sont des rêves qui sont au-dessus de nos capacités. Et nous travaillons à faire de cette vision une réalité.

Entretien réalisé par L’INTER

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