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Les douleurs de la salubrité


CIV-lepointsur.com (Abidjan, le 23-8-2016) Certainement payée pour faire ce travail on ne peut aujourd’hui pas envier la ministre de la Salubrité urbaine. Cette dame fait honneur aux femmes en démontant par l’exemple, tous les préjugés qui leur sont habituellement collés. Un journaliste de la télévision nationale rappelait son surnom de «bulldozer» qu’il a présenté comme une marque d’affection.

Est-ce vraiment un câlin ? Cet engin est tout sauf l’image d’une caresse. Mais par contre, il inspire respect et admiration par sa force, sa détermination et son efficacité. Enfant, je me souviens encore dans les années 1960, être resté des journées entières à regarder travailler des Bulldozers allant en guerre contre les endroits insalubres à l’environnement humain moderne que voulaient se donner les pionniers de la construction de la Côte d’Ivoire.

En un temps deux mouvements, ils produisaient une somme colossale de travail ! Qu’un ministre soit ainsi surnommé « bulldozer » signifie que son travail est reconnu par tous, apprécié ou pas peu importe. Fille d’un officier supérieur, Mme Anne-Désiré Oulotto a de qui tenir. Mais devons-nous l’admirer tout béatement ? Le travail qu’elle fait est celui que tous les maires de ce pays devraient se mettre en devoir d’accomplir.

Le phénomène d’une urbanisation incontrôlée porte un préjudice incommensurable à la qualité de vie dans nos villes. Depuis l’instauration du laissez-faire de l’époque déclinante du Président Houphouët-Boigny rien de sérieux n’a été entrepris pour maîtriser le désordre qui s’installait. Les villes aujourd’hui en Afrique et particulièrement en Côte d’Ivoire sont des modèles achevés du mal-développement.

Mme la ministre de la Salubrité a du pain sur la planche car elle s’en prend à un phénomène monstrueux. L’insalubrité des espaces urbains venant de multiples insalubrités humaines d’abord et de phénomènes historiques non maîtrisés tels que la croissance démographique, l’immigration incontrôlée dont les impacts sur les prévisions de développement sont aujourd’hui manifestent.

Il faut en même temps qu’on libère les espaces, solliciter la participation active des leaders d’opinions des communautés étrangères installées librement en Côte d’Ivoire, afin que chacun comprenne le bienfondé de l’action du ministère de la salubrité. Les lois sont impersonnelles pour s’appliquer à tous sans discrimination. Si l’on quitte sa région pour un espace plus ou moins loin de chez soi c’est pour s’assurer un mieux-être.

On ne peut logiquement vouloir dupliquer son espace d’origine. Ainsi, tous les chefs d’Etat exigent de leurs ressortissants vivant dans les pays frères aux leurs, de toujours respecter les lois locales. Il faut reprendre en écho ces recommandations. Vivant dans ce qu’on appelle les quartiers d’Abidjan beaucoup de choses se laissent voir.

Il faut savoir casser des œufs pour faire des omelettes. Si la politique de salubrité crée beaucoup de douleur, doit-on accepter qu’une ville entière soit transformée pour autant en immense marché ? Je voudrais ici feindre d’ignorer que tout se marchande partout, en effet, et ne voir que la partie émergée de l’iceberg social. Abidjan est une ville monstrueuse qu’il faut reconstruire pacifiquement mais avec fermeté et rigueur.

Pol Pot et ses Khmers rouges eurent une solution inhumaine qui ne se répètera certainement pas dans l’histoire encore moins en Côte d’Ivoire, mais il faut trouver une solution au problème.

Jean Luc Lemoine (collaborateur extérieur)

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