[Décès de Cheick Boikary Fofana] La Côte d’Ivoire perd un chef religieux respecté et un conseiller écouté
Abidjan, 18-05-2020 (lepointsur.com) À Barthelemy Zouzoua Inabo
Temps brumeux. La Côte d’Ivoire éprouvée. Par la maladie à coronavirus. Par la mort. La communauté musulmane nationale en deuil. Le chef, le Cheick, le guide s’est éteint dans sa 77ème année. En pleine période de pénitence. De rapprochement avec Dieu, le créateur. Les larmes, la douleur des amis et frères, des fidèles sont contagieuses.
«Mes yeux se sont mouillés comme s’il était un membre de ma famille…. finalement oui… de ma famille religieuse», dit une fidèle musulmane. «Un imam de Mankono m’avait dit ça, je n’y ai pas accordé́ trop d’importance mais là je commence à croire. Il m’a dit que l’année serait éprouvante pour les sommités», révèle un autre fidèle.
Dieu a donné, Dieu a repris
La nouvelle est tombée en début de soirée. Mais déjà, en milieu d’après-midi, les spéculations résonnaient dans les inbox. Pour la première fois, des journalistes, bien informés, maîtrisant l’information, se refusaient de la commenter. Même inbox. «Il y’a des nouvelles qu’il vaut mieux n’être pas le premier à annoncer, car les hautes autorités prennent des précautions en ce moment à cet effet ! ». Quand j’insiste et leur dis: « mes quiconque m’ont alerté sur la santé préoccupante d’un dignitaire, affecté par la maladie à coronavirus », la réponse est étonnante, « ton affaire tu cherches-là, nous ne sommes pas dedans. ».
La nouvelle se répand très vite pourtant. Le guide religieux, interné depuis quelques jours, a succombé à la maladie. Pendant que les organisations musulmanes cherchent les mots pour annoncer la mauvaise nouvelle, le gouvernement prend les devants. Le ministre de l’Intérieur et de l’Administration du territoire, confirme l’information dans un communiqué lu à la télévision nationale.
Cheick Boikary, un guide religieux, un acteur de premier plan
L’homme est connu comme un cadre de banque. Un intellectuel donc. Et c’est l’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo, le recevant en compagnie de l’autre leader religieux, Idriss Koudouss, saluait à la fois le guide religieux et « le fondé de pouvoir. ». Il est en effet entré à la société ivoirienne de banque (SIB) en 1972. Il a terminé sa carrière en 2000 en qualité de directeur des relations sociales, de la formation et du personnel.
Il a étudié à l’université du Caire en Égypte et est titulaire d’une licence ès-Sciences commerciales.
« Au cours des quarante dernières années, il a su insuffler un réel dynamisme à la communauté musulmane. », expliquent ses proches. Il a été élu Chef suprême de la communauté musulmane de Côte d’Ivoire, le 26 avril 2006, par l’ensemble des imams.
Un chef religieux respecté, un conseiller écouté
Le Cheick Boikary Fofana était une influence naturelle et un interlocuteur pour les hommes politiques. Il été membre de la commission d’enquête sur les événements survenus à la cité universitaire de Yopougon en 1991, membre du conseil consultatif constitutionnel et électoral, chargé de la rédaction de la nouvelle constitution ivoirienne en 2000.
Il était régulièrement consulté par les hommes politiques même si certains lui reprochaient ses accointances avec le pouvoir actuel en Côte d’Ivoire.
Une grande perte
Il a servi sa communauté. Il a fait sa part. Dieu l’a rappelé à lui. La douleur est immense. Le moment où justement les croyants font le point de leurs rapports au créateur. Beaucoup de fidèles sont encore tétanisés. Un vide. Mais les chefs religieux eux-mêmes nous l’enseignent, « toute âme goûtera à la mort. Passage obligé. Le seul carrefour que nul ne peut éviter. ».
Mes condoléances attristées à toute la communauté musulmane, à la famille biologique du guide religieux.
Par Fernand Dédeh