Côte d’Ivoire-Sécurité/Rafle systématique ou opération coup de point
lepointsur.com (Abidjan, le 3-4-2015) Des Ivoiriens sont traumatisés et inquiets à cause des rafles généralisées et systématiques entre 20h30mn et 21 H dans certaines communes d’Abidjan. Cette situation perdure depuis deux mois.
‘’ Je ne sais pas s’il s’agit d’un couvre-feu ou de rafle. Il n’est que 21h. Mon fils et moi, étions en train de prendre de l’air, non loin de notre domicile, situé en bordure de la route quand des éléments des forces de l’ordre lui ont intimé l’ordre de monter dans le cargo avec eux. Qu’a-t-il fait pour que vous le rafliez ? a interrogé M. Maurice Kouakou, père du jeune junior raflé quelques minutes plus tôt, torse nu avec une culotte en tissu fleurie bleu, à un sous-officier en face de lui.
‘’ Monsieur, écoutez, moi cet enfant a 16 ans et demi. Il doit passer le BAC blanc, voici sa carte scolaire et sa convocation comme preuve que sa maman vient d’envoyer, vous pouvez regarder’’ a dit en substance le géniteur de l’élève. Malgré toutes ces pièces justificatives, le jeune homme a été embarqué.
De fait, le jeune Moussa, menuisier, de retour du travail, son sac au dos contenant son matériel de travail a été interpellé par un sous-officier à 50 m du Lycée moderne de Koumassi ‘’ Où vas-tu ? Passes ici, tu es raflé ‘’. ‘‘Chef je viens du travail, je viens à peine de descendre du bus 25 et j’habite juste à côté, voici ma carte d’identité, ‘’ a justifié le jeune menuisier, l’air surpris et inquiet.
A cause de cette situation de terreur, une fois la nuit tombée, affolés, les habitants de Koumassi Sicogi 2 courent dans tous les sens pour fuir les agents des forces de l’ordre. Surtout ceux qui sont dans les environs de la voie qui mène du Lycée moderne de Koumassi, au carrefour petit marché en passant par le boulevard Antanarivo de la ligne du bus 25 pour faire rentrer leurs effets ou faire appel à des proches qui sont encore dehors. En tout état de cause, le constat est sans équivoque. Les rues et devantures des domiciles en bordure des rues se vident et les habitants n’hésitent pas à fermer leurs portes. Pour être prisonniers chez eux-mêmes aux environs de 19h30mn.
‘’ Pourquoi vous voulez nous faire vivre des situations traumatisantes encore, alors que la guerre est loin derrière nous. Nous ne somme plus en situation de crise. S’il y a quelque chose qui ne va pas, dites-le nous? Vous pourchassez ces enfants jusque dans les maisons, comme s’ils étaient des voleurs. ’’ S’est interrogé impuissant un sexagénaire du quartier qui assiste à la scène.
Quand notre équipe de reportage s’est approché du cargo, l’un des sous-officiers en mission, nous a envoyé balader en nous renvoyant au camp de la gendarmerie. ‘’ Allez poser vos questions au camp, ici nous on ne sait pas lire, ni écrire, on nous a demandé d’atteindre un nombre de raflés et le nombre n’est pas encore atteint, donc on continue,’’ avant d’interpeller un jeune homme d’une trentaine d’années environ qui revenait du petit marché de Sicogi 2 ; où il était allé acheter du poisson braisé pour sa femme enceinte. Le poisson et lui ont été embarqués manu militari.
Le véhicule de la gendarmerie de Koumassi affecté pour la mission à partir de 21h 10 a commencé le ramassage de ces jeunes raflés en direction du camp commando de Koumassi où les parents ont été invités à s’y rendre. Nous décidions de nous y rendre également après le troisième convoyage.
A notre arrivée, des dizaines de parents venus pour libérer leurs enfants ont été refoulés et invités à quitter les environs du camp commando de Koumassi pour prendre place derrière la rue qui fait face à cet escadron. Pendant ce temps, certains parmi eux appelaient leurs proches. D’autres étaient joints par des parents et amis par téléphone pour avoir des informations sur les raisons de ces rafles systématiques.
Joint par téléphone par APA, le service de la communication du Ministère de la Défense a été surpris par l’heure de la rafle que nous avons communiquée, avant de soutenir que les patrouilles peuvent se faire à tout moment à la suite d’une information d’insécurité reçu dans une zone.
« Il peut avoir des informations dans une zone et on demande souvent de faire des patrouilles pour rechercher la personne ciblée ». Nous a- t-on appris.
Le service communication du ministère de l’Intérieur et de la sécurité que nous avons joint également par téléphone a aussi marqué son étonnement face a cette situation et a promis nous revenir dans quelque instant afin d’obtenir de plus amples informations auprès de son hiérarchie. Au regard de tout ce qui précède, l’on est en droit de se poser certaines questions. Entre autres, ces rafles qui surprennent plus d’un seraient-elles liées à la menace djihadistes relayées par certains médias de la place. En tout état de cause, les populations qui sortent progressivement de la hantise de la crise postélectorale a plus que besoin de quiétude et de sécurité.
Une collaboration particulière de MC
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