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[Côte d’Ivoire] Les politiciens se font peur !


Abidjan, 15-06-2021 (lepointsur.com) À Barthelemy Zouzoua Inabo : Bon retour à Abidjan. Les politiciens se font peur, jouent leurs intérêts perso ou ceux de leurs parkings, pendant que le pays est sous la menace de l’extrémisme violent. Pas encore la peur-panique, les forces de défense et de sécurité sont dans leurs rôles. Les Ivoiriens et les Ivoiriennes doivent cependant prendre conscience du danger et apprendre à parler d’une voix, face à l’ennemi sans visage.

“ Les villes ivoiriennes, frontalières du Burkina Faso, du Mali et du Ghana subissent depuis le mois de juin 2020, des attaques régulières non revendiquées. ’’

« Nous avons peur… », soupire un élu local au téléphone. Il est le premier magistrat d’une ville de la région du Bounkani. Il vit de très près, la réalité du terrain. « Ces gens-là viennent de l’autre côté de la frontière. Ils opèrent et repartent. Nous avons encore de la chance. Ils ne s’installent pas chez nous », dit-il avant d’ajouter : « ils viennent à motos, cherchent les moyens de subsistance. Ils sont reconnaissables à la couleur de leur peau ». L’autorité décrit ainsi les scènes quotidiennes dans sa circonscription, l’infiltration des personnes inconnues. « Il y a même eu une prise d’otages une fois. Les parents ont dû débourser de l’argent pour obtenir la libération des personnes enlevées ».

Pression constante

Les villes ivoiriennes, frontalières du Burkina Faso, du Mali et du Ghana subissent depuis le mois de juin 2020, des attaques régulières non revendiquées. Auparavant, les coupeurs de route sévissaient. Avec les attaques contre les forces de défense et de sécurité et surtout, les explosions des engins explosifs improvisés qui font des victimes dans les rangs des militaires et des gendarmes, la situation devient davantage préoccupante. Les populations vivent désormais dans la peur. Des troupes sont déployées pour la sécurité des biens et des personnes. Mais la collaboration avec les populations est plutôt difficile : « problème de confiance. Les gens ici se méfient des forces de l’ordre ». Nécessité d’un dialogue entre les civils et les militaires, des actions civile-militaires aussi, pour briser la glace.

“ Ce n’est pas encore la grande panique mais la réalité sur le terrain a de quoi inquiéter. ’’

Le bourbier

Ce n’est pas encore la grande panique mais la réalité sur le terrain a de quoi inquiéter. « Nous apprenons que dans les villages proches, de l’autre côté de la frontière, ces gens-là ont construit des mosquées, compensent l’absence de l’Etat par des actions sociales ou sont carrément installés ». Ils pénètrent ainsi les cœurs des populations par les actions sociales qu’ils entreprennent. Puis s’installent durablement. Une conquête par dérivation. Le diable dans la peau d’un ange.

Des pistes de solutions

Les autorités locales ont des propositions pour stopper la pénétration de l’extrémisme violent dans les villes frontalières. Entre autres, l’installation de camps militaires, le contrôle rigoureux des personnes qui entrent en Côte d’Ivoire, l’identification de celles-ci et surtout la sensibilisation des leaders de la société civile et des chefs des communautés ethniques et religieuses. L’implication des cadres dans la sensibilisation sur la question est primordiale.

“ « Aucun centimètre carré du territoire national ne sera cédé » ’’

Des dispositions pratiques

Le chef d’Etat-major général est formel : « aucun centimètre carré du territoire national ne sera cédé ». De quoi motiver les troupes sur le terrain. Le risque zéro n’existe pas en termes de sécurité. Le dispositif de sécurité est renforcé aux frontières. La base tactique militaire de M’bengué a été actionnée pour les manœuvres côté Popo. Un commissariat mixte a été installé à Kong. Des équipes de veille à réaction rapide sont en place. « Si le même dispositif existait de l’autre côté… », regrette un officier.

“ Aucun pays ne peut mener tout seul la guerre contre ceux que le professeur Moritié Camara appelle « les entrepreneurs de la mort. » ’’

Le ministre ivoirien de la Défense a parlé de la coopération pour le renforcement de la lutte contre le terrorisme avec les voisins (Burkina Faso et Mali, 9-11 mai 2021). Aucun pays ne peut mener tout seul la guerre contre ceux que le professeur Moritié Camara appelle « les entrepreneurs de la mort ».

Des arrestations

Les forces ivoiriennes ne sont pas inactives. Elles ratissent les zones concernées, procèdent à des arrestations. Des éléments qui ont attaqué la ville Kafolo le 29 mars 2021, ont été appréhendés à Ouangolo au corridor nord, route Burkina, selon nos informations. Des réseaux dormants sont aussi secoués.

L’inquiétude grandit en raison des méthodes utilisées par ces hommes armés inconnus : le piège des engins explosifs improvisés et selon des sources sécuritaires, des drones.

Le 28 mai 2021, les populations de Boley, ont constaté le survol de leur village par des drones. « Au départ, nous pensions que les drones appartenaient aux forces ivoiriennes. Mais renseignements pris, les appareils étaient ceux de l’ennemi. Il s’en est suivi des tirs nourris du côté de nos forces ».

“ Face à l’extrémisme violent, la nation entière doit se dresser. Le gouvernement et l’opposition doivent se rencontrer, discuter et parler le même langage. ’’

Les villes ivoiriennes qui ont en commun le Parc national de la Comoé subissent le harcèlement des inconnus armés. Mais pas que. D’autres villes du pays sont sous surveillance accrue.

La collaboration populations-forces de défense et de sécurité est l’une des clés de réussite de la riposte régionale et nationale. Les terroristes n’ont d’autres projets que la déstabilisation des pays pour s’ouvrir les portes des trafics. De tous les trafics. Ils ne sont pas des bâtisseurs. Ils déconstruisent et détruisent. Face à l’extrémisme violent, la nation entière doit se dresser. Le gouvernement et l’opposition doivent se rencontrer, discuter et parler le même langage. Quelqu’un a dit : « on est intelligent à plusieurs ».

Par Fernand Dédeh

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