Abidjan, 19-01-2021 (lepointsur.com) À Barthelemy Zouzoua Inabo : Appelons les P pour le camp de ton camarade et O pour le camp de l’opposition.

P est un jeune cadre qui a tout donné pour le rassemblement de ton camarade et qui a surtout épousé le discours sur le passage du flambeau. Dans sa région, dans le Nord du pays, il a activement participé à la mobilisation des militants de son parti, incité les jeunes à s’inscrire massivement sur les listes électorales. Il s’est rendu disponible, régulièrement présent sur le terrain. À l’heure du choix pour les législatives, la vieille garde s’est imposée. Gros coup de colère : « Ce sont des sorciers. Nous irons en indépendants. C’est non négociable ».

O est lui un jeune cadre de l’opposition. Dans le Centre-Ouest du pays. Il a rongé ses freins, bataillé pour maintenir la flamme de ses militants pendant les moments de braise.

Le samedi 16 janvier 2021 et le dimanche 17 janvier 2021, il a participé à la réunion-marathon de la coalition au siège du vieux parti à Cocody. L’unité de l’opposition pendant la présidentielle 2020 avait fait naître en lui, l’espoir d’un front commun pour les législatives. « Je viens de retirer ma candidature. Nous n’avons pas pu avoir de consensus. J’ai laissé tomber. Il y a deux Indépendants et quatre partis politiques en course ». Et il ajoute, d’un ton désabusé : « Je vais les faire perdre sur le terrain ».

“ Le cumul des postes est devenu la règle : Le même est ministre, député, maire. Il est à la fois, l’Exécutif et le Législatif, donc juge et partie. Il sait à l’avance qu’il ne siégera pas à l’Assemblée nationale, mais se dédouane avec la présence de son suppléant. ’’

Les législatives ont montré une autre face de la politique en Côte d’Ivoire. Les anciens ne sont pas rassasiés. Les jeunes sont ambitieux et pressés. Personne ne veut céder du terrain. Le cumul des postes est devenu la règle : Le même est ministre, député, maire. Il est à la fois, l’Exécutif et le Législatif, donc juge et partie. Il sait à l’avance qu’il ne siégera pas à l’Assemblée nationale, mais se dédouane avec la présence de son suppléant.

En réalité, plus que le service, la bataille en cours est celle de l’intérêt personnel, de l’enrichissement. Etant donné qu’en en général, en Côte d’Ivoire, la politique est la courte échelle pour garnir les comptes en banque, bénéficier de privilèges divers. Et surtout, se mettre à l’abri des déboires judiciaires.

La même logique prévaut dans l’opposition. 10 ans de dèche pour certains. 10 ans à contempler les nouveaux riches du pays. Les législatives offrent une lucarne pour récupérer de la main droite, ce que beaucoup ont perdu de la main gauche. Les jeunes ont le temps de grandir. L’avenir leur appartient. Ils peuvent attendre.

P et O sont deux désillusionnés de la politique en Côte d’Ivoire. Comme beaucoup de jeunes. Pour paraphraser les sportifs ivoiriens, ils ne maîtrisent pas les rouages de la politique. Ils y sont engagés par passion, avec toute la naïveté qui caractérise leur génération. Ils ont cru aux promesses et aux discours de leurs leaders respectifs. « Le temps des débats francs et ouverts au parlement est arrivé. Notre génération doit prendre son destin en main et aborder toutes les questions qui secouent la société ivoirienne à l’hémicycle », rêve P.

O lui, a découvert que les intérêts personnels primaient sur la volonté de changement dans le groupement de l’opposition. « Ils étaient tous là, à des degrés divers. Ils refusent tout dialogue. Nous allons créer une autre plate-forme », s’énerve-t-il.

Justement, l’autre plate-forme n’a pas tardé. Les wagons des locomotives de l’Opposition se sont détachés et désolidarisés. Ils seront sur le terrain. Dans l’armée, les spécialistes disent que le terrain fait le chef.

Le groupement de ton camarade aura ses Indépendants. L’opposition aura ses « vers… ». Une autre forme de vitalité démocratique, peut-être…

Fernand Dédeh

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